Santé et prévoyance collective : le casse-tête de la cotisation solidarité

La généralisation de la complémentaire santé s’est accompagnée de la mise en place du degré élevé de solidarité associé à la recommandation d’un organisme assureur. Le décret du 11 décembre 2014 prévoit que cette solidarité doit être financée par une cotisation d’au moins 2% de la prime ou de la cotisation prévue par le régime collectif. Cette disposition semble relativement simple à mettre en oeuvre lorsqu’elle concerne soit un régime frais de santé, soit un régime prévoyance. Mais comment interpréter la cotisation lorsque l’accord collectif créant le régime porte simultanément sur la prévoyance et la santé ? 

 

Des accords collectifs hétérogènes

Dans le cadre de la réforme de la complémentaire santé généralisée, les partenaires sociaux sont nombreux à avoir conclu des accords au niveau des conventions collectives. La majorité de ces accords vise uniquement la mise en place d’un régime frais de santé. Dans ces nombreux cas, l’interprétation du montant de la cotisation minimale du degré élevé de solidarité n’entraine à première vue pas de grande difficulté : il suffit de rapporter le pourcentage au montant de la cotisation conventionnelle au régime prévue par l’accord. 

Cependant, quelques-unes des conventions signées portent à la fois sur un régime frais de santé et sur un régime de prévoyance. Selon les accords, des difficultés différentes peuvent être rencontrées, laissant parfois les organismes assureurs dans le doute sur la bonne interprétation à avoir. Mais l’enjeu principal est de savoir comment répartir un financement de 2% de la cotisation brute totale entre les régimes. Est-ce 2% de la cotisation santé puis 2% de la cotisation prévoyance ? Ou bien est-ce 1% de chacune des deux cotisations ? Si deux organismes assureurs couvrent la santé pour l’un et la prévoyance pour l’autre, qui recouvre les cotisations ? Toutes ces questions ne trouvent pas toujours de réponse et dépendent largement de l’interprétation des accords collectifs. 

 

La solidarité dans les accords suggérant un seul organisme en santé et en prévoyance

Parmi les accords collectifs proposant à la fois un régime frais de santé et un régime prévoyance, il en existe qui semblent imposer qu’un seul organisme assureur propose les deux régimes à l’entreprise. Dans ces cas précis, une entreprise ne pourra donc pas s’assurer auprès d’un premier organisme en santé, et auprès d’un second en prévoyance. Elle devra trouver un organisme capable de lui proposer des couvertures santé et prévoyance. 

C’est notamment le cas dans la radiodiffusion (IDCC 1922) où l’accord du 17 décembre 2015 précise que le financement de la solidarité est assis sur la cotisation brute totale, santé et prévoyance, versée à l’organisme assureur. Dans un tel cas de figure il est difficile d’imaginer que deux organismes différents puissent gérer la santé pour l’un, la prévoyance pour l’autre, et vérifier que l’entreprise verse bien une cotisation solidarité conforme à ce qui est prévu par l’accord. Le bon fonctionnement du dispositif posé par les partenaires sociaux implique que ce soit un seul organisme assureur qui gère les deux régimes et reçoive l’intégralité du financement lié à la solidarité : “Cette part de la cotisation globale est collectée directement par l’organisme assureur sur les cotisations qu’il perçoit des entreprises”. 

Dans l’immobilier (IDCC 1527), cette notion est plus diffuse. L’accord du 20 juillet 2015 définissant les régimes frais de santé et prévoyance précise simplement que l’entreprise peut choisir “un” autre organisme assureur que celui qui a été recommandé. Mais une fois de plus, la cotisation solidarité est assise sur le “total des cotisations” versées à l’organisme assureur. Pour éviter toute mauvaise interprétation, il serait donc plus sûr que la cotisation soit versée uniformément à un seul organisme assureur. 

 

Une répartition de la cotisation entre plusieurs organismes assureurs ?

Malgré des accords qui suggèrent fortement qu’un seul organisme assureur prend en charge à la fois la santé et la prévoyance, certains acteurs peuvent être tentés de ne proposer qu’un seul des deux régimes à l’entreprise. Dans un tel cas de figure, comment déterminer la répartition de la cotisation solidaire ? En admettant que le financement de la solidarité soit à 2% de la cotisation globale des 2 régimes, chacun des deux organismes assureur pourrait prélever une partie de la cotisation. Mais l’organisme en santé n’aura pas nécessairement les moyens de vérifier que la fraction de la cotisation solidarité qu’il aura captée permette bien de compléter ce qui aura été versé à l’organisme de prévoyance. Si le premier récupère un montant égal à 1,2% de la cotisation globale, comment vérifier que le second a bien prélevé 0,8% de cette cotisation ? 

Cette problématique trouve parfois des réponses dans les accords eux-mêmes : par exemple dans l’immobilier, la cotisation solidaire doit être versée uniquement à l’organisme assureur recommandé. Ainsi, même si un organisme assureur non recommandé décide de ne proposer qu’un régime frais de santé à une entreprise relevant de cette convention collective, elle n’aura pas à se soucier du financement de la solidarité. 

Dans l’accord de la production agricole du 15 septembre 2015, la cotisation à verser au titre de la solidarité est d’au moins 1% de la cotisation santé et de la cotisation prévoyance. Si deux organismes assureurs différents couvrent la santé pour l’un et la prévoyance pour l’autre, l’accord est clair sur la manière de répartir la cotisation liée au degré élevé de solidarité. 

C’est donc au cas par cas, selon l’accord applicable, que l’organisme assureur devra réfléchir à son positionnement sur le degré élevé de solidarité. La prudence reste de mise face à des dispositions conventionnelles parfois vagues. 

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