RSE : la CFE-CGC veut lui donner une bonne place dans le dialogue social

Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFE-CGC.

Président de la Plateforme RSE, Sylvain Boucherand passe en revue les principaux enjeux en lien avec la responsabilité sociale des entreprises et dresse un état des lieux sur l’évolution des pratiques. 

Quel est le rôle et quelles sont les missions de la Plateforme RSE ? Créée en 2013 et rattachée au Premier ministre dans le cadre de France Stratégie, la Plateforme RSE est une instance nationale de concertation et d’actions en faveur de la responsabilité sociétale des entreprises : politiques publiques, soutien aux initiatives d’acteurs privés, valorisation des pratiques, appui lors des négociations de normes internationales etc. Composée de diverses parties prenantes (entreprises, organisations syndicales, fédérations professionnelles, institutions publiques, associations, ONG, monde académique…), la plateforme répond à des saisines directes du gouvernement ou travaille par auto-saisine. Elle émet des avis et formule des recommandations sur les questions sociales, environnementales et de gouvernance en lien avec la RSE.Parmi d’autres sujets, le gouvernement a récemment demandé à la Plateforme de travailler sur la biodiversité.Sur saisine d’Emmanuelle Wargon (ndlr : secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire) en lien avec le plan gouvernemental sur la biodiversité, nous travaillons notamment sur le reporting réalisé par les entreprises à savoir les rapports RSE de déclarations de performance extra-financiers publiés par les entreprises soumises à ce dispositif ; et le reporting des PME et entreprises non soumises afin de déterminer comment elles prennent en compte les questions de biodiversité. Objectif : mieux intégrer, dans les démarches RSE des entreprises, la question cruciale de la biodiversité. Malgré une mobilisation émergente et quelques avancées notables comme la création de l’Agence française pour la biodiversité, la préservation des écosystèmes est un sujet majeur qui, à l’échelle des questions environnementales, demeure en retrait par rapport au défi climatique, à l’économie circulaire ou à l’usage du plastique. 

Sur quelles autres problématiques êtes-vous sollicités ? La plateforme a remis l’an dernier, après une saisine de la secrétaire d’État Brune Poirson, un rapport sur les Objectifs de développement durable avec des recommandations pour bien intégrer ces ODD aux démarches RSE des entreprises. Sur sollicitation de Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées, la plateforme a livré des recommandations pour identifier les leviers pour encourager les entreprises à prendre des initiatives volontaires en faveur de l’embauche et du maintien dans l’emploi en milieu ordinaire des travailleurs handicapés.On peut aussi citer les travaux sur la problématique des addictions (drogue, tabac, alcool) et nos 40 recommandations sur l’égalité femmes-hommes dans les multinationales françaises. En instaurant des pratiques responsables conduisant à un changement de culture d’entreprise, nos multinationales peuvent en effet faire avancer les droits des femmes. Toutes ces thématiques sont structurantes. Ce positionnement très transversal est à la fois l’intérêt et la difficulté de la RSE, qui consiste à prendre en compte les impacts des activités d’une entreprise sur la société et l’environnement. 

Quid des auto-saisines ? Nous avons récemment publié un rapport sur les données (indicateurs, statistiques) permettant d’évaluer les démarches RSE. La plateforme débute par ailleurs un travail sur le numérique responsable : gestion des données personnelles, transformation des organisations du travail, impact environnemental des nouvelles technologies etc. Autre sujet fondamental sur lequel nous sommes mobilisés : les relations entre les donneurs d’ordre et les sous-traitants.Constatez-vous une progression des pratiques RSE dans les entreprises ? La taille de celles-ci est-elle un facteur ?On observe globalement une mobilisation de plus en plus importante sur la RSE, à la fois sous l’effet de la pression réglementaire du législateur et du souci éthique affiché par un nombre croissant d’employeurs, de salariés, de clients et de consommateurs. Dire que les pratiques RSE sont davantage le fait des grandes entreprises n’est pas spécialement vrai : certaines ont engagé des démarches sincères mais d’autres n’ont pas encore complètement intégré les enjeux, continuant parfois à faire du greenwashing même si la pratique diminue.Il faut également saluer l’engagement et les efforts entrepris par bon nombre de PME de tous secteurs d’activité pour revoir complètement leur business model et l’adapter aux enjeux de RSE. C’est le sens de l’histoire : la RSE répond à des enjeux sociétaux pour une économie résiliente et soutenable sur le long terme. Au-delà des questions de compétitivité, d’attractivité et de recrutement, le tri va se faire naturellement entre les entreprises qui ont des engagements réels et celles qui seront restées à quai.Dans quelle mesure la RSE est-elle un enjeu de dialogue social en entreprise ?Il convient de favoriser la prise en compte de la RSE dans le cadre du dialogue social. Ces sujets transversaux concernent les collaborateurs qui sont une composante majeure de l’entreprise. Il est donc important que les représentants du personnel et les organisations syndicales puissent s’en saisir en étant force de proposition pour dresser un état des lieux et mettre en place des actions sur divers champs : qualité de vie au travail, santé et sécurité, égalité professionnelle, lutte contre les discriminations… Sans oublier tous les enjeux liés à la gouvernance d’entreprise (place des administrateurs salariés, nouveau statut de société dite à mission, etc.) et s’ouvrir à l’environnement. Comment se situe la France à l’échelle européenne ?Divers baromètres privés font état que la France est plutôt bien placée en matière de pratiques RSE, même si le leadership revient souvent aux pays nordiques. La France a notamment été pionnière sur plusieurs sujets, en particulier le reporting extra-financier mis en place dès 2001 avant que le dispositif soit progressivement étendu à l’Europe.Le cadre réglementaire est-il suffisant pour lever les freins qui subsistent ?La réglementation est un des outils pour favoriser la RSE mais il faut aussi aller plus loin pour susciter un effet d’entraînement. Cela passe par la remise en cause de certaines pratiques managériales pour mettre en cohérence les valeurs portées par la direction de l’entreprise et l’organisation du travail ; ou encore par l’association de toutes les parties prenantes par exemple. Par ailleurs, avec la Plateforme RSE, nous expérimentons aussi la mise en place d’approches sectorielles pour traiter les problématiques RSE spécifiques ciblées de telle ou telle filière. En la matière, les branches professionnelles ont un vrai rôle à jouer pour la mise en œuvre opérationnelle. 

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