C’est aujourd’hui que les partenaires sociaux toujours représentés à la négociation paritaire sur les retraites : MEDEF et CPME, côté patronal, et CFDT, CFE-CGC et CFTC, côté salarial, se retrouvent pour ce qui doit être leur ultime séance de discussions.

S’il paraît désormais exclu qu’un éventuel accord revienne sur la retraite à 64 ans, d’autres thèmes pourraient nourrir un compromis paritaire sur les retraites.
Le retour sur les 64 ans évacué des débats
Comme nous en avons fait état en fin de semaine dernière, les trois confédérations syndicales de salariés ont fini par acter le refus catégorique du patronat français d’avancer vers un retour sur la principale mesure introduite par la dernière réforme des retraites : le recul progressif à 64 ans de l’âge de départ à la retraite. Les trois organisations salariales, plus précisément, ne font plus d’un tel retour une condition sine qua none dont dépendrait leur capacité à s’engager sur un accord paritaire. Si la victoire du patronat français sur ce point est indiscutable, il n’en demeure pas moins que cette évolution de la position salariale ne signifie pas pour autant que l’enjeu de l’âge de la retraite n’est plus en cause dans les débats. La CFTC continue ainsi de revendiquer un abaissement à 66 ans – contre 67 actuellement – de l’âge de suppression de la décote pour départ à la retraite à taux plein sans cumul de tous les trimestres nécessaires.
La retraite anticipée pour “pénibilité”
Surtout, du point de vue des négociateurs salariaux, l’abandon de la revendication d’un abaissement de l’âge de la retraite implique inévitablement la mise en œuvre de mesures de prise en compte de la pénibilité dans la détermination concrète de l’âge d’ouverture des droits à la retraite des salariés. Ils escomptent obtenir un âge d’ouverture inférieur à 64 ans pour les salariés ayant travaillé dans des conditions pénibles. Si, à ce stade, le patronat n’apparaît guère favorable à l’instauration d’une telle prise en compte de la pénibilité, il s’est néanmoins montré disposé à améliorer celle de l’inaptitude et invalidité – avec un départ possible à 61 ans, contre 62 ans actuellement – et celle de l’incapacité permanente – avec un départ anticipé de deux ans par rapport à la situation actuelle, à 60 ans. Ces améliorations de dispositifs de préretraite pourraient concerner, selon diverses sources, jusqu’à un départ à la retraite sur sept.
Une possible amélioration du sort des femmes
Parallèlement à ces questions d’âge de la retraite, les syndicats se trouveraient en position de discuter d’une amélioration des modalités de constitution des pensions de retraite des femmes. Il serait question, en particulier, d’une réduction à 23 ou 24 années – contre 25 dans la règlementation en vigueur – de la période de référence, qui sert à calculer le montant des pensions. Dans ce domaine, l’enjeu pour les négociateurs salariaux serait toutefois d’éviter que cette mesure fût prise moyennant la dégradation d’autres éléments de la règlementation des conditions de définition des pensions de retraite, comme par exemple les majorations dont bénéficient les parents d’enfants, que le patronat se verrait bien rogner quelque peu. Les échanges paritaires sur ces éléments risquent fort d’être animés.
L’enjeu de la gestion des retraites
Ils risquent d’être d’autant plus animés que, pour l’heure, on peine effectivement à identifier les sources d’économies budgétaires que les partenaires sociaux sont censés dégagés dans le cadre de leur accord. Aux dernières nouvelles, elles devaient tout de même atteindre plus de 6 milliards d’euros à l’horizon 2030, dans l’objectif d’un rééquilibrage comptable des régimes de retraite des salariés du secteur privé. Etant donné les améliorations des régimes de retraite envisagées par les partenaires sociaux, les mesures d’économies sur lesquelles ils vont devoir s’entendre pourraient s’avérer d’une ampleur non négligeable : durcissement des règles de revalorisation des pensions, alourdissement de l’imposition des retraités, dégradation du dispositif des carrières longues, par exemple. Quoi qu’il en soit, la capacité des négociateurs paritaires à dégager des sources d’assainissement des comptes de la retraite devrait constituer un facteur déterminant de leur légitimité à revendiquer une prise de contrôle élargie de la gouvernance de l’ensemble des régimes de retraite obligatoires des salariés du privé.
Un accord jouable à “50-50”
On l’a compris, avant l’entame de la dernière séance de négociation paritaire, les points demeurant à clarifier afin d’esquisser un compromis sur l’avenir des retraites sont à la fois nombreux et importants. Or, si le Premier ministre a fait savoir hier qu’il était prêt à accorder “quelques jours de plus” aux partenaires sociaux afin de finaliser un projet d’accord, la secrétaire générale de la CFDT, Marylise Léon, a affirmé ce matin qu’elle n’entendait pas prolonger ainsi les discussions : “il faut que ça se termine ce soir” a-t-elle déclaré sur RTL. Dans une telle configuration, pour la CFDT comme d’ailleurs pour le MEDEF, les chances de réussite de la négociation sont aussi élevées que celles de son échec. Ces deux organisations au coeur du paritarisme ont en effet évalué ces chances à “50-50”.