Ces dernières semaines – et en lien, certes, avec ses promesses électorales, mais de manière toutefois quelque peu décalée étant donné la conjoncture économique et sociale actuelle – le Président de la République s’est montré pressé de s’emparer du dossier des retraites, ne cachant pas sa préférence pour une réforme rapide, susceptible de reposer largement sur une ou des mesure(s) d’âge brutale(s).
En l’espace de quelques jours, plusieurs éléments sont pourtant venus remettre quelque peu en cause ces menées présidentielles sur le sujet. En effet, après que le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) a récemment publié son rapport annuel, qui propose un constat équilibré de la situation et des perspectives du système de retraite français, deux nouvelles pièces versées au dossier viennent poser la question de la nécessité d’enclencher rapidement une réforme impliquant un allongement de la durée de cotisation ou un report de l’âge de la retraite.
Il s’agit d’une part de l’avis rendu hier du comité de suivi des retraites (CSR), comité d’experts placé auprès du Premier ministre. Ce neuvième avis du CSR sur la manière d’assurer la pérennité du système des retraites est balancé. S’il reconnaît en effet la nécessité de “trouver une réponse” aux risques de “de déséquilibres résiduels significatifs à court et moyen terme” des régimes, du moins juge-t-il que cette réponse n’est pas nécessairement une mesure d’âge. Envisageant, outre une telle mesure, des actions sur le niveau des cotisations ou le niveau des prestations, ainsi que leurs conséquences économiques et sociales, le CSR paraît ainsi préconiser non pas d’agir dans la précipitation mais d’ouvrir pleinement le débat sur l’avenir des retraites.
Quelques heures seulement après la publication de cet avis est intervenue la publicisation de l’état des comptes de l’AGIRC-ARRCO, le régime de retraite complémentaire des salariés du secteur privé. Or, là encore, force est de constater que la situation ne semble pas être critique. Bien au contraire : le régime devrait finir l’année sur un excédent d’environ 3,7 milliards d’euros. Ce surplus interviendrait après celui observé l’an passé, d’un montant de quelque 2,6 milliards d’euros. La situation comptable favorable de l’AGIRC-ARRCO pourrait fort bien ne pas emporter uniquement des débats relatifs à la revalorisation des pensions servies par le régime, mais également des considérations bien plus générales quant à la réalité de la nécessité d’engager rapidement une réforme des retraites.
Alors que l’exécutif doit présenter prochainement le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 – projet de loi au sujet duquel l’exécutif a laissé entendre qu’il pourrait contenir des mesures de durcissement de l’accès aux pensions de retraite – les vents contraires soufflent de plus en plus fort pour la majorité.