Un pas de plus vers la soviétisation des soins en France ? L’Assurance maladie a présenté son projet pour réduire le reste à charge des patients lors de la pose d’une prothèse dentaire. Seulement, le remboursement varierait suivant la dent à soigner.
Ce n’est une surprise pour personne : les soins en optique et dentaires sont les soins les plus chers en France. La Drees estimait même que le reste à charge pour les patients couvrait entre 20 et 25% des dépenses quand la Sécurité Sociale est censée prendre en charge moins de 30% pour les premiers et 40% pour les seconds.
Promesse d’Emmanuel Macron accompagné d’Agnès Buzyn, l’idée du reste à charge zéro pour les patients continue de faire son bout de chemin. L’Assurance-Maladie vient d’ailleurs de publier le compte-rendu des négociations conventionnelles concernant les chirurgiens-dentistes. Un document qui devrait tout aussi bien plaire aux patients qu’aux praticiens.
Un remboursement très variable selon la dent à soigner
Pas besoin d’éplucher le document pour voir comment le reste à charge zéro peut s’appliquer. L’idée est simple : en diminuant la qualité des prestations de soins. De ce fait, les frais à rembourser seront moindre.
Premier exemple en page 11, l’Assurance-maladie précise que les paniers de soins seront différenciés selon la localisation de la dent et le matériau utilisé. En clair, les soins concernant les dents antérieures dites “visibles” dans le document (incisives et canines) seront mieux remboursés que ceux pratiqués sur les prémolaires, eux-mêmes mieux remboursés que les soins sur les molaires.
Deuxième effet “kiss-cool”, les remboursements seront moindres si la qualité du matériau utilisé est supérieure.
Soviétisation et machine à gaz
Le reste à charge zéro ne sera pas non-plus universel ni universalisé. Plus précisément, il y aura trois niveaux de reste à charge : zéro, modéré et tarif libre du médecin. On commence déjà à apercevoir la complexité du système qui est en train de se mettre en place. Une situation que résume parfaitement le site Capital.fr :
Pour une couronne céramo-métallique actuellement remboursée par la Sécurité Sociale à 75,25€ alors que le tarif moyen de la prothèse est de 540€. Le patient n’aurait [avec le nouveau système] rien à débourser si sa dent à soigner était une incisive, une canine ou une première prémolaire. Il devrait assumer un “reste à charge modéré” s’il s’agissait de sa deuxième prémolaire ou de sa première molaire (le tarif plafonné pourrait être fixé à 520 euros). Enfin, s’il devait soigner sa deuxième molaire, le patient serait soumis au tarif librement fixé par le dentiste.
Il faudra maintenant que les spécialistes expliquent pourquoi un même soin n’est pas remboursé de la même manière suivant l’emplacement de la dent. Mais les professionnels de santé dénoncent aussi ce nouveau système car il fait craindre le risque d’une baisse de la qualité des soins pratiqués.
Le dentiste posera des prothèses en céramique jusqu’à la première prémolaire, au-delà ce sera du métal, comme dans les années 1970.
Les incohérences des discours politiques
Pour les professionnels, le compte n’y est absolument pas. Catherine Mojaïsky, présidente de la Confédération Nationale des Syndicats Dentaires, estime que “la difficulté, c’est que les assureurs vont devoir payer mais sans augmenter les cotisations. Le gouvernement fait finalement payer aux autres les promesses qui ont été faites“.
Mais les professionnels de santé et les assureurs ne sont pas les seuls à être impactés par les discours alambiqués de nos hommes et femmes politiques. Ce document de travail met aussi fortement l’accent sur la prévention avec par exemple la création d’un examen bucco-dentaire pour les enfants de trois ans. Dans le même temps, les promotions sur le Nutella n’ont jamais été aussi fortes.
Avec ce document, le gouvernement réussi un pari incroyable : arriver à mettre sur les dents et les praticiens et les patients. Reste maintenant à savoir ce qui sera finalement décidé. La prochaine réunion avec les syndicats est prévue pour mi-mars.