Réforme de l’assurance-chômage : les syndicats s’opposent en bloc

La présentation de la réforme de l’assurance chômage a donné lieu à plusieurs réactions syndicales, dont celles de la CFE-CGC, de la CFDT et de l’UNSA.

Pour la CFE-CGC, la réforme se fera aux dépens des demandeurs d’emploi :

Le gouvernement a présenté le 2 mars sa réforme de l’assurance chômage dont l’application commencera au 1er juillet prochain, malgré l’opposition unanime des syndicats. Décryptage avec Jean-François Foucard, secrétaire national CFE-CGC. 

Que faut-il retenir des annonces faites hier aux partenaires sociaux par la ministre du Travail, Élisabeth Borne ?La réforme gouvernementale de l’assurance-chômage, plusieurs fois repoussée en raison de la pandémie de Covid-19, entrera en vigueur le 1er juillet prochain concernant le nouveau mode de calcul de l’indemnisation des demandeurs d’emploi et la modification du calcul du salaire journalier de référence (SJR).Le durcissement de l’ouverture des droits – de 4 à 6 mois de travail sur les 24 derniers augmentés d’une période de neutralisation liée aux confinements – entrera en vigueur au plus tôt au 1er novembre 2021. Cela dépendra d’une amélioration du marché de l’emploi appréciée sur 6 mois à partir du 1er avril 2021 plus un mois pour avoir les résultats, ainsi qu’au nombre de déclarations préalables à l’embauche (DPAE) sur 4 mois. Ces deux indicateurs forment le système de retour à bonne fortune.Concernant la dégressivité des allocations pour les rémunérations supérieures à 4 500 euros mensuels brut, elle interviendra au bout de 8 mois à partir du 1er juillet 2021 et sera ramenée à 6 mois en fonction du même système de retour à bonne fortune.Quid du bonus-malus pour lutter contre l’abus des contrats courts ?Le bonus-malus sur la cotisation chômage des entreprises considérées comme trop grandes consommatrices de contrats courts sera appliqué à partir de septembre 2022 après une période d’un an d’observation du comportement des entreprises. Le dispositif doit concerner sept grands secteurs d’activité (hébergement/restauration, transports…).Quels messages a fait passer la CFE-CGC ?Nous avons rappelé notre opposition totale à cette réforme gouvernementale dogmatique à laquelle s’opposent les cinq organisations syndicales représentatives de salariés (voir ici le communiqué intersyndical du 23 février).Pour la CFE-CGC, cette réforme est avant tout l’occasion de faire d’importantes économies budgétaires aux seuls dépens des demandeurs d’emploi. Alors que le pays fait face à une grave crise sanitaire et économique qui fragilise grandement les salariés, le gouvernement s’apprête à mettre en œuvre une réforme dont les conséquences pèseront lourdement sur le quotidien de ceux et celles qui perdent leur emploi. Nous sommes en profond désaccord avec le principe selon lequel la baisse des allocations chômage inciterait à un retour plus rapide à l’emploi. La CFE-CGC défend un régime assurantiel où les demandeurs d’emploi doivent bénéficier d’une assurance chômage garantissant à la fois un revenu de remplacement approprié à la situation que vivent les travailleurs privés d’emploi, notamment les plus précaires, et d’un accompagnement adapté aux besoins de chacun.Enfin et comme l’a rappelé hier François Hommeril, président confédéral, la dégressivité des allocations des cadres est particulièrement scandaleuse. Dans son livre programme « Révolution » en 2016, le candidat Emmanuel Macron faisait lui-même valoir son opposition au dispositif, jugé « inefficace ». Il faut croire que le président a changé d’avis…Que va-t-il se passer au niveau de la gouvernance de l’assurance chômage, un régime jusqu’ici géré de manière paritaire par les partenaires sociaux ?Le gouvernement veut nous revoir au mois d’avril. La ministre s’est montrée assez prudente sur le sujet, comme pour se laisser le maximum de marge de manœuvre sachant qu’il faudra, en 2022, renégocier une nouvelle convention d’assurance chômage car celle en cours se termine fin octobre 2022. Ne doutons pas que la dimension financière avec le retour à l’équilibre, même à moyen terme, influencera grandement les critères de ce régime. 

 

L’UNSA rappelle son rejet de la réforme :

La ministre du Travail vient de présenter ses arbitrages concernant la réforme de l’assurance chômage qui entrera en vigueur à partir du 1er juillet 2021. L’UNSA reste opposée à cette réforme pour deux raisons : c’est un recul pour les demandeurs d’emploi et totalement hors sol en pleine crise sanitaire et économique. 

S’obstiner à réformer l’assurance chômage, amortisseur social permettant de ne pas tomber dans la précarité, au moment où aucun scénario de sortie de crise COVID n’est stabilisé, est incompréhensible et totalement injuste. 

Il n’est pas acceptable de dégrader la sécurité financière des demandeurs d’emploi tant pendant la crise qu’en sortie de crise. D’autant plus que le chômage risque de fortement augmenter et qu’il sera plus difficile d’accéder à un emploi, surtout durable. 

L’UNSA demande le retour à la convention d’assurance chômage de 2017 afin de rassurer l’ensemble des actifs. C’est sur cette base que pourront commencer sereinement des discussions tripartites dans le but de rendre le système d’assurance chômage plus protecteur, sécurisant et facilitant le retour sur le marché du travail. 

 

La CFDT estime que la réforme est injuste pour les demandeurs d’emploi :

La ministre du travail a annoncé ce matin les ajustements de la réforme de l’assurance chômage que le gouvernement porte depuis juillet 2019. 

La CFDT demeure en profond désaccord avec sa philosophie et ses objectifs premiers : inciter les demandeurs d’emploi – notamment les plus précaires – à reprendre un emploi en baissant fortement leurs allocations et faire des économies budgétaires. 

Les conditions d’ouverture d’un droit à l’assurance chômage (6 mois) et la dégressivité de 30% des allocations pour les hauts salaires continuent d’être suspendues, le temps d’un retour à une conjoncture du marché du travail plus favorable. Pour la CFDT, le maintien des conditions d’entrée dans le régime à 4 mois est indispensable pour permettre à un maximum de personnes d’être sécurisées. 

En revanche, la réforme du calcul de l’allocation (salaire journalier de référence) entrera bien en vigueur le 1er juillet 2021 avec l’introduction d’un plancher pour en atténuer les effets. D’après les premiers chiffrages, 290 000 demandeurs d’emploi auraient une moindre baisse de leur allocation. Mais le nombre de perdants de la réforme demeure colossal : 830 000 au minimum. Certains demandeurs d’emploi, notamment ceux qui connaissent le plus de précarité dans leur emploi, verront ainsi leur allocation baisser de 250 € par mois (de 900 € aujourd’hui à 650 €). 

Cette réforme reste donc pour la CFDT injuste, inadaptée au contexte et déséquilibrée. 

Pour les plus précaires, c’est la double peine : non protégés par l’activité partielle en 2020, ce sont les premiers qui subissent la baisse de l’activité économique et ont moins de possibilités de retrouver du travail. 

Dans le contexte actuel, en pleine crise sanitaire ce sont près de 3 à 4 milliards d’économies budgétaires qui se feront sur le seul dos des demandeurs d’emploi. 

Pour la CFDT, cette réforme demeure déséquilibrée. Les chômeurs vont voir leur allocation baisser immédiatement et les entreprises de seulement sixsecteurs se verront appliquer un éventuel malus mi-2022. 

Ces premiers chiffres illustrent une réforme en trompe-l’œil. Même « aménagée » elle aura des conséquences désastreuses pour les plus précaires. Une étude d’impacts actualisée et très approfondie de cette réforme est indispensable. La CFDT mobilisera l’Unédic pour cette étude permettant d’alimenter le débat public sur cette réforme. 

La CFDT conteste cette réforme injuste et déséquilibrée et n’aura de cesse dans les mois à venir de dénoncer les conséquences concrètes de cette réforme sur le parcours et les conditions de vie de ces travailleurs, trop souvent invisibles. La CFDT le redit, le chômage n’est pas un choix, et en période de crise qui plus est, notre responsabilité collective, c’est de protéger tous ceux qui perdent leur emploi.  

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