Réduire la protection des travailleurs ne conduit pas à une croissance plus forte

Cet article de l’OIT (Organisation internationale du travail) a été publié le 20 juillet 2015.  

Lorsque la crise financière mondiale était à son paroxysme en 2008, quelques pays, européens notamment, ont introduit des changements législatifs qui réduisaient le niveau de protection des travailleurs. Dans un contexte de marges de manœuvre budgétaires limitées et de chômage grandissant, ces pays ont fait valoir que de tels changements aideraient à stimuler la croissance économique et la création d’emplois, mais une étude récente de l’OIT a montré l’absence de corrélation entre une protection des travailleurs réduites et une croissance plus forte. 

 

Cela a-t-il fonctionné? 

Le récent rapport phare de l’OIT (disponible en anglais) : « Emploi et questions sociales dans le monde 2015: Des modalités d’emploi en pleine mutation », qui analysait des données en provenance de 63 pays, y compris les économies les plus avancées, ainsi que plusieurs pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, au cours des 20 dernières années, montre que l’abaissement de la protection des travailleurs ne stimule pas la croissance de l’emploi. 

Les résultats de la recherche ont montré que la force relative de la législation du travail dans un pays donné n’a pas d’effets sur les taux d’emploi et de chômage – ni positifs, ni négatifs. Cette observation est constante pour les différentes données économétriques, ainsi que pour les pays avancés, émergents et en développement. 

«Le rapport montre clairement que, si elle est soigneusement élaborée, la réglementation de l’emploi peut offrir une protection aux travailleurs sans nuire à la création d’emplois», explique Steven Tobin, l’un des auteurs du rapport. M. Tobin ajoute: «En fait, plusieurs pays émergents et en développement ont renforcé la protection de leurs travailleurs sans porter atteinte à la création d’emplois». 

 

La conception des politiques est cruciale 

Selon le rapport, l’enjeu est de savoir comment concevoir une réglementation en fonction de la situation économique et du marché du travail d’un pays en particulier. Les réglementations trop laxistes peuvent être aussi contreproductives pour la croissance économique, la création d’emplois, l’égalité et la cohésion sociale que celles qui sont trop strictes. De la même manière, un système judiciaire efficace est vital pour garantir que la législation du travail est effectivement appliquée. 

En outre, les politiques adoptées en matière de législation du travail ont plus de chances d’être équilibrées quand le dialogue social fonctionne bien entre les pouvoirs publics, les employeurs et les travailleurs et permet de trouver la voie à suivre. 

«Notre rapport parvient à la conclusion que réduire la protection des travailleurs ne fait pas reculer le chômage. En effet, il montre que les changements mal conçus qui affaiblissent la législation en matière de protection de l’emploi peuvent être contreproductives pour l’emploi, à court terme comme à long terme. Trouver le parfait équilibre dépend des caractéristiques structurelles propres à chaque pays, ainsi que de l’état du cycle économique, raison pour laquelle il faut absolument associer les organisations syndicales et patronales au processus de réforme», conclut Steven Tobin. 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Découvrez nos analyses et capsules vidéos
Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #4 : zoom sur le médico-social non lucratif

Lancer la vidéo

Webinaire Tripalio #4 : zoom sur les dernières grandes actus CCN santé/prévoyance

Lancer la vidéo

Webinaire Tripalio #3 : les CCN face à l'assurance obsèques de l'enfant de -12 ans

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #1 : le régime santé de la CCN Syntec

Vous pourriez aussi aimer
Lire plus

La charge moralisatrice d’Elisabeth Doineau contre les Ocam

Les représentants des organismes complémentaires d'assurance maladie (Ocam) ont probablement eu quelques sifflements d'oreilles hier (mardi 18 novembre). La rapporteure générale de la commission des affaires sociales au Sénat, Elisabeth Doineau (Union centriste) n'a pas mâché ses mots pour expliquer pourquoi la taxe de 2,05% des cotisations doit figurer dans le projet de loi de financement de la sécurité...

Avis d’extension d’un accord dans la CCN des métiers du commerce de détail alimentaire spécialisé

Le ministre du travail et des solidarités, envisage d’étendre, par avis publié le 19 novembre 2025, les dispositions de deux accords du 21 octobre 2025 relatif à la mise en place d'un régime de participation et à la mise en place d'un dispositif d'intéressement, conclu dans le cadre de la convention collective nationale du commerce de détail alimentaire spécialisé (...