Le décret du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement du contentieux du travail a été publié au journal officiel. Pris en application de la loi Macron, il prévoit en son titre I, l’inscription de la juridiction prud’homale dans un cadre processuel nouveau. Le titre II, quant à lui, définit la procédure suivie devant le tribunal d’instance, juge du contentieux des élections dans l’entreprise, lorsque celui-ci connaît d’un recours formé à l’encontre d’une décision de l’autorité administrative en matière préélectorale. Enfin, le titre III précise les conditions dans lesquelles les juridictions judiciaires pourront saisir pour avis la Cour de cassation en interprétation de conventions et d’accords collectifs.
L’élargissement du bureau de conciliation
En l’état actuel, les délais des conseils prud’homaux peuvent pénaliser les salariés-défendeurs contraints d’attendre plusieurs années pour obtenir une indemnisation.
La Cour européenne des droits de l’homme, par un arrêt du 8 avril 2003, n° 42277/98, JUSSY contre la France, n° 23, est venue préciser que les conflits du travail « portant sur des points qui sont d’une importance capitale pour la situation professionnelle d’une personne doivent être résolus avec une célérité particulière ». La décision judiciaire doit donc être rendue dans un délai raisonnable comme le prévoit l’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
L’élargissement des pouvoirs du bureau de conciliation consiste notamment à orienter l’affaire devant la formation restreinte du bureau de jugement composée d’un conseiller employeur et d’un conseiller salarié ou devant la formation du bureau de jugement de départage composée de deux conseillers prud’hommes employeurs et de deux conseillers prud’hommes salariés et présidée par un magistrat professionnel désigné par le TGI.
En cas d’échec de la conciliation, le bureau de conciliation et d’orientation (BCO) assure la mise en état de l’affaire jusqu’à la date qu’il fixe pour l’audience de jugement. A l’article 13 du décret, il est prévu que le BCO « peut dispenser une partie qui en fait la demande de se présenter à une séance ultérieure du bureau de conciliation et d’orientation ».
Dans ce cas, la communication entre les parties est faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par notification entre avocats et il en est justifié auprès du bureau de conciliation et d’orientation dans les délais impartis.
Ensuite, le BCO peut entendre les parties en personne, les inviter à fournir les explications nécessaires à la solution du litige ainsi que les mettre en demeure de produire dans le délai qu’il détermine tous documents ou justifications propres à éclairer le conseil de prud’hommes.
Conformément à l’article 14 du décret, « lorsqu’au jour fixé pour la tentative de conciliation, le défendeur ne comparaît pas sans avoir justifié en temps utile d’un motif légitime, le BCO ne peut renvoyer l’affaire à une audience ultérieure du bureau de jugement que pour s’assurer de la communication des pièces et moyens au défendeur ».
De plus, dans les cas où l’affaire est directement portée devant lui ou lorsqu’il s’avère que l’affaire transmise par le bureau de conciliation et d’orientation n’est pas prête à être jugée, le bureau de jugement peut prendre toutes mesures nécessaires à sa mise en état. Il peut ordonner toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves ou des objets litigieux.
En outre, la demande est portée à une audience tenue à cet effet aux jour et heures habituels des référés, lorsqu’il est prévu que le conseil de prud’hommes statue en la forme des référés.
Selon l’article 22 du décret, elle est formée, instruite et jugée dans les conditions suivantes : « 1° Il est fait application des articles 486 et 490 du code de procédure civile ; « 2° Le conseil de prud’hommes exerce les pouvoirs dont dispose la juridiction au fond et statue par ordonnance ayant l’autorité de la chose jugée relativement aux contestations qu’elle tranche ; « 3° L’ordonnance est exécutoire à titre provisoire, à moins que le conseil de prud’hommes en décide autrement, sous réserve des dispositions de l’article R. 1454-28 ».
*Nota : La création d’une formation restreinte du bureau de jugement va permettre de traiter avec l’accord préalable des parties, des litiges portant sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.
La mise en place de modes alternatifs de règlement à l’amiable
De nombreux avocats se voient de plus en plus proposer de recourir aux médiations. L’article 2066 du Code civil modifié par la Loi Macron prévoit que les parties ne sont pas dispensées de la phase obligatoire de conciliation lorsqu’en cas d’échec, elles saisissent le conseil de prud’hommes.
D’après l’article 31, le bureau de conciliation et d’orientation ou le bureau de jugement peut, quel que soit le stade de la procédure : « 1° Après avoir recueilli l’accord des parties, désigner un médiateur afin de les entendre et de confronter leurs points de vue pour permettre de trouver une solution au litige qui les oppose ; « 2° Enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur qui les informe sur l’objet et le déroulement de la mesure. « L’accord est homologué, selon le cas, par le bureau de conciliation et d’orientation ou le bureau de jugement ».
Le renforcement de la procédure de licenciement
Il est prévu à l’article 23 du décret qu’ «en cas de recours portant sur un licenciement pour motif économique, et dans un délai de huit jours à compter de la date à laquelle il reçoit la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation, l’employeur dépose ou adresse au greffe par lettre recommandée avec demande d’avis de réception les éléments mentionnés à l’article L. 1235-9 pour qu’ils soient versés au dossier ». « Dans le même délai, il adresse ces éléments au demandeur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. « La convocation destinée à l’employeur rappelle cette obligation. »
Le tribunal d’instance statuera en dernier ressort concernant les contestations relatives à une décision de l’autorité administrative prise, le cas échéant après recours gracieux.
L’interprétation d’une convention ou d’un accord collectif par la Cour de cassation
La formation appelée à se prononcer sur une demande d’avis sur l’interprétation d’une convention ou d’un accord collectif comprend, outre le premier président, le président de la chambre sociale, un président de chambre désigné par le premier président, quatre conseillers de la chambre sociale et deux conseillers, désignés par le premier président, appartenant à une autre chambre.
L’article 42 prévoit qu’« en cas d’absence ou d’empêchement de l’un d’eux, il est remplacé par un conseiller désigné par le premier président ou, à défaut de celui-ci, par le président de chambre qui le remplace ».