Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFTC
Il nous vient de la Silicon Valley et se propose d’apporter le bonheur au travail. Le Chief Happiness Officer (« responsable du bonheur »), ou CHO, est le dernier avatar d’un management se voulant bienveillant. Les prérogatives de ce nouveau collègue sont pour le moins surprenantes : à grand renfort de déjeuners bio, de cours de yoga — mais aussi d’interventions sur les horaires et le télétravail, il doit vous mener vers le bonheur. S’il convient de saluer ce qui, a priori, passe pour une plus grande considération des personnes, à y regarder de plus près, cette reconnaissance a quelque chose du trompe-l’œil.
D’un bonheur conçu comme performance
À l’origine du phénomène, entre autres, une étude rapportée par la Harvard Business Review en 2012, qui établit que le bonheur des salariés se traduit par des gains en productivité de l’ordre de 31 %. Seulement voilà, les entreprises tentées par l’aventure peinent à intégrer telle visée dans des organisations du travail qui, jusqu’à présent, ne se sont pas donné pour fin de nous rendre heureux.
Ainsi, 60 % des postes de CHO reviennent à des assistants de direction ou aux services généraux, et, dans 38 % des cas, la fonction est confiée… à des stagiaires ! Du bonheur à peu de frais, en somme. Dans d’autres cas, plus sérieux, le CHO est rattaché au marketing et à la communication, ou aux ressources humaines. L’objectif, toutefois, reste le même : maximiser l’implication des salariés.
Option préférentielle pour les élus du personnel
Reste que les fondamentaux du bonheur au travail n’ont varié en rien — santé préservée, juste salaire, respect de la personne et conciliation des temps de vie permettant de faire son bonheur… tel qu’on l’entend. Kant ne remarquait-il pas déjà, par ailleurs, qu’« il est (…) contradictoire de dire que l’on est obligé à travailler de toutes ses forces à son propre bonheur.» ? Lien de subordination oblige.
Si le CHSCT fusionne avec les nouvelles instances, ses attributions demeurent, et ce sont nos élus qui sont chargés de veiller, certes non pas au bonheur, mais à la santé des salariés et à la prévention des risques — psychosociaux, ou non. Et, comme on le sait, c’est déjà beaucoup.