Que doit préciser le règlement intérieur sur le télétravail ?

Si l’accord collectif est bien l’instrument le plus pertinent pour mettre en place et encadrer le télétravail, les entreprises doivent également adapter leur règlement intérieur afin d’intégrer cette nouvelle organisation de travail

 

Le règlement intérieur, un outil de complément à l’accord collectif

En analysant les pratiques des entreprises qui ont intégrées le télétravail dans leur organisation, il apparait que le recours à l’accord collectif est fréquent. Il faut dire que le télétravail touche majoritairement les grandes sociétés, qui disposent des ressources nécessaires pour négocier. Dans ces cas-là, le règlement intérieur n’intervient qu’en complément de l’accord collectif, sur des thématiques restreintes. Et plus l’accord collectif est précis, moins il y aura besoin d’étoffer son règlement intérieur … 

Pour autant, un accord n’est pas indispensable, et toutes les entreprises désirant développer le télétravail n’ont pas la même facilité pour conclure des accords (le frein peut résider dans l’absence de présence syndicale, par exemple). Celles qui souhaitent toutefois fixer un cadre général (sans se limiter à la conclusion d’avenants individuels) peuvent alors recourir à diverses normes patronales (chartes, codes de conduite …), qui couvriront un champ relativement large: fixation des principes généraux, du personnel éligible, de la procédure de mise en œuvre, des conditions de réversibilité, ou encore des obligations réciproques des parties … 

Cette fonction ne peut être assumée seule par le règlement intérieur, dont le champ d’intervention est limité par le Code du Travail. L’art. L 1321-1 dispose en effet qu’il « fixe exclusivement » les règles relatives à l’hygiène, la sécurité et la discipline (en prévoyant notamment l’échelle des sanctions). Logiquement, toute disposition extérieure à ces thèmes devrait en être exclue. Le recours à des normes patronales « atypiques » permet de faire sauter ce verrou, tout en passant outre la procédure d’adoption du règlement intérieur. 

Cette limitation du champ du règlement intérieur apparait également dans le texte de l’article L 1222-9 du Code du Travail : il prévoit que les conditions de passage en télétravail et de retour à une exécution du contrat hors télétravail sont précisées dans « le contrat de travail ou son avenant ». De même, les modalités de contrôle du temps de travail sont établies « à défaut d’accord collectif applicable », par le contrat de travail. Aucune référence n’est faite au règlement intérieur, qui n’a pas compétence pour intervenir. 

 

L’adaptation du règlement intérieur aux situations de télétravail

Le règlement intérieur n’a donc pas vocation à régir toute la mise en place et l’application du télétravail au sein de l’entreprise. Néanmoins, quelques mises à jour sont nécessaires dans les domaines de l’hygiène, la sécurité ou la discipline, notamment afin de se ménager la possibilité de sanctionner le salarié qui manquerait à ses obligations. Globalement, la prudence conduira à préciser d’emblée que l’ensemble des dispositions s’appliquent aux salariés en situation de télétravail, quitte à nuancer par la suite. 

En matière d’hygiène et sécurité, le règlement intérieur pourra prévoir une formation préalable à la mise en place du télétravail (sur les risques électriques, l’ergonomie du poste de travail …), la nomination d’un « référent télétravail », ou encore la possibilité pour le salarié de solliciter une rencontre avec le Médecin du Travail ou une visite de son espace de travail, notamment par le CHSCT. En cas d’accident, le règlement rappellera aussi l’obligation pour le salarié en télétravail d’en informer immédiatement la Direction, en précisant la date, l’heure, les circonstances de l’accident et les éventuels témoins. 

Le règlement intérieur pourrait également fixer l’amplitude des journées de travail, les règles relatives aux absences, et les horaires où le salarié peut être joint (on se situe bien dans le champ de la discipline interne), mais il s’agit bien souvent d’un thème traité par accord, et réaffirmé dans l’avenant individuel. 

Par contre, le règlement intérieur est un outil particulièrement pertinent pour établir les règles d’utilisation du matériel professionnel mis à disposition du salarié en télétravail, et les restrictions à leur utilisation personnelle. Il édictera également des consignes de sécurité et de confidentialité destinées à assurer la protection des données utilisées par le télétravailleur. Cette protection est de plus en plus cruciale pour les entreprises, dont les échanges d’information se dématérialisent. Généralement, les règlements intérieurs n’ont pas attendu le télétravail pour intégrer des dispositions relatives à l’utilisation de l’informatique. D’autres entreprises ont préféré y consacrer des Chartes spécifiques. 

Le règlement intérieur servira ainsi à étendre le respect des dispositions visant à sécuriser l’utilisation du matériel informatique au télétravail, et rappeler les sanctions en cas de manquement. 

Le règlement intérieur ne nécessite donc que des retouches sans envergure pour être « à jour » et compatible avec l’instauration du télétravail, principalement sur le volet de l’utilisation du matériel informatique. Le reste sera fixé prioritairement par accord ou dans le contrat de travail du télétravailleur. 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer

Travail temporaire dans les établissements publics : les plafonds de dépenses sont fixés

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui, fixe les plafonds des dépenses pour les missions de travail temporaire dans les établissements publics de santé et médico-sociaux. Le plafond est établi à 2 681 € par jour pour un médecin, odontologiste ou pharmacien. Pour les autres professions, il varie entre 54 € et 78 € de l’heure : 54 € pour un infirmier diplômé d’État, 73 € pour un infirmier de bloc ou anesthésiste, 56 € pour un manipulateur en...

Services de prévention et de santé au travail : la composition des dossiers d’agrément est mise à jour

Un arrêté paru au Journal officiel d'aujourd'hui, fixe la nouvelle composition des dossiers de demande ou de renouvellement d’agrément des services de prévention et de santé au travail (SPST). Le texte distingue les pièces à fournir selon qu’il s’agit d’un service autonome, interentreprises ou chargé du suivi des travailleurs temporaires. Il précise notamment les informations relatives aux effectifs suivis, aux médecins et infirmiers recrutés ou à recruter, aux...

Comité national de l’organisation sanitaire et sociale : une nouvelle personnalité qualifiée est nommée

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui, actualise la composition du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale et désigne une nouvelle personnalité qualifiée. À la section sanitaire, siègent notamment :- la Fédération hospitalière de France (4 sièges) ;- les conférences des présidents de CME de CHU, de CH et de CHS (1 siège chacune) ;- la FEHAP (1 siège) et Unicancer (1 siège) ;- la Fédération de l’hospitalisation...

Une nouvelle nomination à l’inspection générale des affaires sociales

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui acte la nomination d’une nouvelle personne au sein de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS). À compter du 1er octobre 2025, Nadège Grataloup, actuellement directrice d’hôpital, occupera un emploi de groupe II des services d’inspection générale ou de contrôle. Sa nomination est prononcée pour une durée de cinq ans, avec une période probatoire de six mois. ...

Le conseil d’administration de la caisse de retraite de la RATP accueille de nouveaux membres

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui acte plusieurs nominations au sein du conseil d’administration de la caisse de retraites du personnel de la Régie autonome des transports parisiens (RATP). Sont nommés membres titulaires : Stéphane Bidaud, qui remplace Olivier Galle, et Elisabeth Correia, qui succède à Marc Galliot. Côté suppléants, Magaly Cleuet est désignée en remplacement de Stéphane Bidaud et...