Présentation aux élections : le syndicat doit respecter les valeurs républicaines

Cet article provient du site du syndicat FO.

 

Dans une décision en date du 12 décembre 2016, à la forte publicité (PBI), la Cour de cassation pose la condition que doit nécessairement remplir un syndicat pour se présenter à des élections professionnelles, à savoir le respect des valeurs républicaines (Cass. soc., 12-12-16, n°16-25793).L’arrêt a été rendu dans une affaire opposant le syndicat des travailleurs corses (STC) à la CGT à propos de la présentation de la candidature du STC aux élections TPE.La solution rendue par la Cour de cassation dépasse le cadre de ce litige et amène à se poser la question plus générale de ce que constitue le respect des valeurs républicaines.Le tribunal d’instance saisi par les Confédérations CFDT, CGT, CFTC et FO, se fondant sur les statuts du syndicat STC et sur sa profession de foi, a retenu que ce syndicat apparaissait comme l’outil de diffusion de la doctrine de certains courants politiques et une organisation régionaliste défendant des intérêts régionalistes. Le tribunal a ainsi pu en déduire que ce syndicat avait un objet illicite. 

La chambre sociale de la Cour de cassation, saisie d’un pourvoi par le STC, a cassé le jugement du tribunal d’instance au motif qu’il convenait de rechercher si un syndicat, indépendamment des mentions figurant dans ses statuts, poursuivait dans son action syndicale un objectif illicite, contraire aux valeurs républicaines (Cass. soc., 9-9-16, n°16-20605).Cette solution était, selon la note explicative de la Cour de cassation, conforme à une jurisprudence bien établie de la chambre sociale (Cass. soc., 13-10-10, n°10-60130). 

Après cassation, l’affaire a été renvoyée devant le même tribunal d’instance autrement composé.Le tribunal d’instance a alors validé la candidature du STC aux élections TPE. Il a relevé que si la recherche d’un emploi local se fait nécessairement par référence à une origine corse ou à une résidence corse depuis plusieurs années, il s’agit donc d’une référence à une discrimination liée à l’origine, directe ou indirecte. Il convient toutefois de distinguer un comportement de provocation à l’existence d’une discrimination. 

En conséquence, pour le tribunal d’instance, le STC ne faisait qu’user de sa liberté d’expression et ne portait aucune atteinte aux valeurs républicaines. La candidature du STC aux élections TPE devait donc être validée.A la suite de cette décision, la CGT a décidé de se pourvoir en cassation. Le 12 décembre 2016, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la CGT. 

Les Hauts magistrats ont relevé que c’est à celui qui conteste le respect, par une organisation syndicale, des valeurs républicaines, d’apporter la preuve de sa contestation.Ce point est contestable s’agissant d’une question de discrimination. La CGT demandait, à juste titre, l’application du mécanisme probatoire de l’article L 1134-1 du code du travail (mécanisme probatoire prévu en matière de discrimination) au présent litige.La chambre sociale ne l’a malheureusement pas suivi. 

En outre, la Cour de cassation a toutefois noté que méconnait les valeurs républicaines un syndicat qui prône des discriminations directes ou indirectes, en raison de l’origine du salarié.La chambre sociale se désolidarise ainsi de la motivation du tribunal d’instance. Pour la première fois, elle donne un élément de la définition des valeurs républicaines. Comme elle le souligne dans sa note explicative, le refus des discriminations selon l’origine des salariés, est une composante du respect des valeurs républicaines. 

Cette vision du respect des valeurs républicaines se situe dans la droite ligne des arrêts de la chambre mixte (ch. Mixte, 10-4-98, n°97-17870) et de la position commune du 9 avril 2008.Ainsi, pour se voir reconnaître le droit d’exercer les prérogatives reconnues à un syndicat par le code du travail (négocier un PAP, déposer des listes aux élections professionnelles, constituer une section syndicale, être reconnu représentatif), celui-ci ne peut prôner de distinctions selon l’origine des salariés. 

Néanmoins, dans le cas d’espèce, la Cour de cassation valide la candidature du STC dans la mesure où les éléments produits par la CGT sont – selon la Cour de cassation – insuffisants à apporter la preuve que l’action syndicale du STC prônait des distinctions fondées sur l’origine. 

En d’autres termes, la preuve que le STC prônait des discriminations selon l’origine des salariés, à l’occasion de son action en faveur de l’emploi local, n’a pas été suffisamment rapportée.Une décision en somme en demi-teinte…qui appelle à revoir la définition de la notion de valeurs républicaines, celle-ci devant nécessairement être précisée pour éviter à l’avenir toute candidature de cette nature. 

 

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