Engagés dans une négociation éclair – une de plus ! – sur la formation professionnelle, les partenaires sociaux se sont retrouvés vendredi dernier au siège du Medef pour une sixième séance de discussion. Ils ont parlé détection des compétences et définition des formations. La prouesse du jour est à mettre au crédit du Medef : il s’est mis tous les syndicats de salariés à dos.
“Prisme très restreint”…
Ayant pris connaissance d’un premier projet d’accord proposé par Florence Poivey, la chef de file du Medef, le moins que l’on puisse dire est que les représentants des salariés l’ont trouvé de fort mauvais goût. Ils ont d’une part critiqué le fait que le texte conçoit la formation professionnelle uniquement sous l’angle des solutions qu’elle apporte aux entreprises. Interrogée par l’AFP, Catherine Perret, de la CGT, le déplore : “les besoins ne sont vus qu’à travers le prisme très restreint de l’entreprise”. Michel Beaugas, pour FO, affirme également que le projet patronal ne fait aucun cas des “aspirations personnelles des salariés”. Ces critiques sont même relayées par Maxime Dumont, représentant de la très modérée CFTC, qui critique le fait que le Medef “oublie l’individu” et ses “projets”.
… et “manque de souffle”
Jugeant ces critiques insuffisantes, la CFDT et la CFE-CGC en ont rajouté une louche dans un autre domaine : le projet de Mme Poivey jouerait les petits bras. Jean-François Foucard, négociateur au nom de la CFE-CGC, a dénoncé le “manque de souffle” du texte. Yvan Ricordeau, pour la CFDT, a précisé cette appréciation peu positive, affirmant que le Medef “n’affiche que des ambitions”, sans évoquer “les moyens” à mettre en oeuvre. M. Ricordeau s’est d’ailleurs vanté d’avoir “clairement dit au patronat qu’on attendait qu’il change de braquet”. Ainsi le Medef avait-il réussi la prouesse, en ces temps sociaux perturbés, de souder l’ensemble des représentants syndicaux contre lui. Ils ont d’ailleurs prévu de proposer un projet d’accord unitaire lors de la prochaine séance de négociation.
Le triomphe modeste
Forcée de reconnaître sa victoire, Florence Poivey a préféré avoir le triomphe plutôt modeste, afin sans doute de ne pas charger la barque plus qu’elle ne l’était déjà. Elle a d’abord reconnu que négocier les ambitions avant de discuter des moyens pouvait avoir un côté perturbant : “Évidemment, un projet et une ambition, sans avoir les leviers de gouvernance et de ressources, ça peut créer de la frustration”. Elle a, certes, rappelé que la discussion sur les moyens était prévu lors de séances ultérieures. Ensuite, Mme Poivey a tenu à déminer l’opposition à venir entre les deux projets patronaux et salariaux : “Notre plume est plus entreprises, leur plume sera plus salariés”. Derrière une lapalissade qui vaut ce qu’elle vaut, un message d’apaisement : chacun ses raisons et la vérité est ailleurs.
Les négociateurs devant aboutir à un accord d’ici un mois, ils vont rapidement devoir trouver cette vérité. Ou alors l’Etat s’en chargera volontiers.