Mixité chez les représentants du personnel : quel effet de l’annulation d’une élection ?

Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFDT.

La Cour de cassation continue la construction jurisprudentielle des règles relatives à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au CSE entrées en vigueur le 1er janvier 2017. Dernière décision en date : un arrêt du 22 septembre 2021, dans lequel la Haute juridiction précise l’application des règles de suppléance en cas d’annulation de l’élection d’un titulaire pour non-respect de la mixité proportionnelle. Cela est désormais clair : le siège concerné doit être laissé vacant. Cass.soc. 22.09.2021, n° 20-16.859, publié.

Non-respect des règles de mixité et annulation de l’élection

En vue de la mise en place du CSE d’établissement, le syndicat CFE-CGC a présenté une liste composée de deux candidats hommes dans le 2è collège. L’un d’eux est élu membre titulaire.

Le tribunal d’instance (aujourd’hui tribunal judiciaire) a été saisi aux fins d’annuler l’élection du candidat CFE-CGC en raison de la méconnaissance des règles relatives à la représentation équilibrée des femmes, et en conséquence, d’attribuer le statut d’élu titulaire dans le collège concerné à un candidat présenté sur la liste du syndicat CGT.

La société, quant à elle, a exigé le rejet de cette demande et, à titre subsidiaire en cas d’annulation, a demandé que l’élue suppléante CFE-CGC pour ce même collège soit désignée comme titulaire. 

Finalement, le tribunal a annulé cette élection en application des règles relatives à la mixité des listes. Cela dit, le juge a décidé qu’aucun remplaçant ne pouvait être désigné pour occuper le siège de membre titulaire laissé vacant.

C’est ainsi que la société s’est pourvue en cassation. Selon elle, les règles de suppléance prévues par le Code du travail devaient s’appliquer (1).

Qu’il soit temporaire ou définitif, la loi prévoit des règles de remplacement des membres titulaires du CSE qui doivent être appliquées dans un ordre défini.

– D’abord, l’élu titulaire doit être remplacé par un suppléant élu sur une liste présentée par la même organisation syndicale (la priorité est donnée au suppléant de la même catégorie professionnelle, ensuite au suppléant d’une autre catégorie professionnelle mais du même collège, ensuite au suppléant d’un autre collège).

– S’il n’existe pas de suppléant élu sur une liste présentée par la même organisation syndicale, le remplacement est assuré par un candidat non élu présenté par la même organisation (celui qui vient sur la liste immédiatement après le dernier élu titulaire ou, à défaut, le dernier élu suppléant).

– A défaut, le remplacement est assuré par le suppléant élu n’appartenant pas à l’organisation du titulaire à remplacer, mais appartenant à la même catégorie et ayant obtenu le plus grand nombre de voix (2).

Aussi, la Cour de cassation devait répondre à la question suivante : faut-il procéder au remplacement, par un élu suppléant, du membre titulaire du CSE dont l’élection est annulée en raison de la violation des règles relatives à la mixité proportionnelle ?  

Pas d’application des règles de suppléance

La haute juridiction donne raison au juge d’instance : il n’y avait effectivement pas lieu de désigner un remplaçant pour occuper le siège de membre titulaire laissé vacant. En effet, la Cour rappelle que les dispositions relatives à la suppléance autorisent « le remplacement par un suppléant du titulaire d’un mandat momentanément empêché de l’exercer ou du titulaire d’un mandat qui vient à cesser ses fonctions pour l’un des événements limitativement énumérés à l’article L. 2314-33, alinéa 3 » du Code du travail.

En d’autres termes, les règles de suppléance s’appliquent uniquement en cas de décès, de démission, de rupture du contrat ou de perte des conditions d’éligibilité de l’élu titulaire (3).

L’annulation de l’élection ne figure pas au nombre des causes de cessation des fonctions prévues par l’article L. 2314-33 du Code du travail.

Il en va de même lorsque les élections sont annulées pour une cause étrangère aux règles de mixité proportionnelle.

Le siège ayant fait l’objet de l’annulation doit donc être laissé vacant.

Néanmoins, la chambre sociale rappelle que, dans l’éventualité où un collège électoral ne serait plus représenté à la suite de ces annulations, ou si le nombre de membres titulaires de la délégation au CSE venait à être réduit de moitié ou plus, des élections partielles devraient être organisées par l’employeur – sauf si ces événements intervenaient moins de 6 mois avant le terme du mandat (4).

Cette décision fait sens. En effet, comme le précise la chambre sociale, ces dispositions, tout comme celles relatives à la mixité proportionnelle des listes aux CSE, sont d’ordre public absolu. Il ne pourrait y être dérogé, même dans un sens plus favorable. Du reste, l’annulation de l’élection des élus du sexe surreprésenté constitue une sanction de la violation des règles de mixité proportionnelle. Cette sanction perdrait tout son sens en cas d’application des règles de suppléance…

(1) Art. L.2314-37 C.trav.

(2) Art. L.2314-37 C.trav.

(3) Art. L.2314-33 C.trav.

(4) Art. L.2314-10 C.trav.

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