Cette publication provient du site du syndicat de salariés FO
En conflit depuis deux mois avec leur direction, les salariés d’Air France qui demandent une augmentation générale des salaires de 5,1% pour 2018 étaient en grève ce 24 avril pour la onzième fois depuis la journée d’actions du 22 février. Lancé à l’appel de l’intersyndicale composée de dix organisations, dont FO, le mouvement affronte désormais une manœuvre de la direction laquelle entend contourner les syndicats en organisant du 26 avril au 4 mai une consultation de tout le personnel de la compagnie. Par ce scrutin sans valeur juridique mais pour lequel le P-DG de la compagnie met son poste dans la balance, la direction vise à faire approuver sa proposition salariale qui consiste notamment en un plan triennal de modération salariale. Plan rendu possible par les ordonnances de la loi Travail. Neuf syndicats de l’intersyndicale, FO notamment, ont appelé ce 24 avril à voter contre cette offre qui ne permet aucun rattrapage du pouvoir d’achat. Ces organisations appellent à poursuivre la mobilisation
.
La démarche traduit à l’évidence une volonté de diviser les salariés et de contourner les organisations syndicales. Le 20 avril Le P-DG du groupe Air France-KLM et Président d’Air France, M. Jean-Marc Janaillac, a annoncé l’organisation par voie électronique d’une consultation de l’ensemble des salariés (44 000 personnes) de la compagnie.
Ce vote qui n’a pas de valeur juridique aura lieu à partir du 26 avril. Les résultats seront connus le 4 mai au soir vient d’indiquer la direction ce 24 avril, date d’un onzième jour de grève depuis le 22 février. La question posée sera : pour permettre une issue positive au conflit en cours, êtes-vous favorable à l’accord salarial proposé le 16 avril 2018 ?
L’objectif de la direction est d’obtenir l’assentiment des personnels envers sa dernière proposition salariale laquelle a toutefois été rejetée le 20 avril par l’intersyndicale composée de dix organisations, dont FO. En cas de revers pour la direction lors de ce scrutin, M. Janaillac annonce qu’il démissionnera.
Les syndicats ne se laissent pas troubler par cette annonce. Elle constitue selon eux une nouvelle manœuvre de la direction et cette fois en forme de chantage puisque le P-DG semble dire que s’il part, disparaîtra avec lui toute perspective salariale
souligne Christophe Malloggi, le secrétaire général du syndicat FO-Air France.
La direction est responsable de cette situation
Réunie ce 24 avril l’intersyndicale a étudié la conduite à tenir vis-à-vis de cette consultation. Un syndicat de pilotes a opté pour un boycott du scrutin. Les neuf autres organisations, à l’instar de FO-Air France, appellent les salariés à participer à cette consultation afin qu’ils confirment, par un bulletin « non » leur opposition à l’offre salariale de la direction.
Alors que celle-ci tente de rallier les non-grévistes et semble vouloir plonger l’ensemble des personnels dans l’inquiétude
concernant l’avenir de la compagnie s’indigne Christophe Malloggi, les syndicats ont décidé de lancer une information aux personnels, notamment à travers des tracts. Il faut mobiliser, expliquer les enjeux
insiste FO-Air France qui depuis le début du conflit a reçu le soutien de la fédération FO de l’Equipement, de l’Environnement, des Transports et Services (FEETS-FO) dont relève le syndicat.
La direction qui prétend s’alarmer du coût du conflit –300 millions d’euros désormais– est responsable de la situation
rappelle Christophe Malloggi. À un règlement rapide du conflit né en février dernier d’une revendication légitime d’augmentation des salaires, la direction a préféré jouer la montre au risque d’augmenter les pertes financières de la compagnie au fil des journées de grève et donc de l’immobilisation des avions.
Des propos peu crédibles…
En février, la direction affirmait qu’elle ne pouvait accorder une augmentation salariale supérieure à 0,5% ou 0,6% sur 2018 sans mettre l’entreprise en péril. Or, deux mois après le début du conflit, elle a plus que doublé son offre d’augmentation salariale. Comment donner crédit aux propos de cette direction !
fulmine Christophe Malloggi.
Depuis le 22 février, les trois catégories de personnels (salariés au sol, navigants commerciaux/PNC et pilotes) ont lancé des journées d’actions –assorties de rassemblements tel ce 24 avril devant le siège de la compagnie sur le site de Roissy– à l’appel de l’intersyndicale composée de dix organisations dont FO (pour les PNC et les personnels au sol).
Pour les salariés qui ont subi six années de gel des salaires entre 2012 et 2017, il s’agit d’obtenir une augmentation substantielle des salaires susceptible d’apporter un rattrapage de pouvoir d’achat. En février l’intersyndicale a demandé ainsi une augmentation générale de 6% tandis que la direction décidait unilatéralement d’une hausse de 1% et encore en deux temps.
Un entêtement désastreux…
Cette proposition d’augmentation rudimentaire reprenait les termes de l’accord salarial 2018 signé le 1er février par deux syndicats (CFDT et CFE-CGC) mais invalidé depuis, d’autres organisations dont FO (affichant à eux tous une représentativité de plus de 50% des suffrages aux dernières élections professionnelles) s’étant opposés à l’accord.
L’intersyndicale a alors demandé à la direction de rouvrir des négociations salariales. Les syndicats soulignaient les bons résultats commerciaux de la compagnie. En 2017, celle-ci a en effet réduit sa dette. Le groupe Air France-KLM a affiché l’an dernier par ailleurs un bénéfice d’exploitation en hausse de 42% à 1,48 milliard d’euros dont 588 millions pour Air France. Après avoir subi des années de gel des salaires mais aussi des plans de restructuration qui ont entraîné la perte de milliers d’emplois, les personnels revendiquent une juste récompense de leurs efforts.
Le moins que l’on puisse dire c’est que malgré l’accumulation des jours de grève depuis la fin février, la direction a pris son temps avant de rencontrer les syndicats. Ce fut fait, enfin, le 4 avril. Ce rendez-vous n’a pas signifié pour autant que la revendication salariale était entendue. En effet, la direction est venue les mains vides
. En réponse, l’intersyndicale a quitté la séance.
Le rejet du plan de modération salariale
Depuis ? La direction a reçu les syndicats, les 13 et 16 avril. Lors de la dernière rencontre, elle a fait ce qu’elle considère comme une ultime proposition
: une augmentation générale de 2% pour 2018, associée à une hausse des salaires de 5%… Mais répartie sur trois ans (2019-2021), soit 1,65% d’augmentation par an.
L’intersyndicale s’est opposée à ce plan triennal de modération salariale
indique Christophe Malloggi. La direction a discuté et construit avec les syndicats non-grévistes [CFDT et CFE-CGC, NDLR] un accord destiné à stopper le conflit
s’insurge encore le syndicat FO-Air France.
Un tel accord salarial sur la base d’un plan triennal –possibilité introduite par les ordonnances de la loi Travail
fulmine FO– ne permet même pas de rattraper la perte de pouvoir d’achat depuis 2012 remarquent les organisations. La direction admet elle-même que l’inflation glissante entre 2012 et 2017 atteignait 3,8% et que l’inflation pour 2018 devrait s’élever à 1,3%.
La recherche d’un accord salarial annuel négocié
Soucieuse d’obtenir un accord qui puisse satisfaire les salariés, l’intersyndicale a alors demandé le 16 avril une augmentation générale des salaires à hauteur de 5,1% sur 2018 (contre une demande de 6% initialement) mais en deux temps : +3,8% en avril et +1,3% en octobre prochain.
Cette proposition a été refusée par la direction qui a mis fin à la négociation en demandant aux organisations qu’elles se prononcent d’ici le 20 avril sur sa dernière offre.
Les réponses ne se sont pas fait attendre. Les dix organisations engagées dans la grève, dont FO, ont rejeté la proposition de la direction, notamment le plan salarial triennal. Ce que celle-ci propose n’est pas à la hauteur de ce que demandent les salariés souligne FO Air France.
Le bras de fer continue donc entre la direction et les personnels d’Air France. Pour les syndicats tel FO qui appellent à voter contre le projet de la direction l’issue rapide du conflit ne dépend pas de cette consultation mais d’un accord négocié
. Un accord salarial annuel et non un plan triennal au rabais.