L’indemnisation des conseillers prud’homaux est cours d’évaluation

Cet article a été rédigé pour le site du syndicat de salariés CFDT

 

Depuis 2016, année au cours de laquelle la dernière grande réforme de la procédure prud’homale a été mise en œuvre, la CFDT n’a de cesse de relancer la Chancellerie sur la nécessité qu’il y a à revisiter le système d’indemnisation des conseillers prud’hommes. Deux années pleines et un renouvellement général des conseils de prud’hommes plus tard, force est de constater que notre constance revendicative a fini par porter ses fruits puisque, comme cela avait été annoncé en Conseil supérieur de la prud’homie, un groupe de travail a commencé à plancher sur la question. Sa première séance s’est tenue le 25 mai au sein des locaux du ministère de la Justice.  

  • Le cadrage des travaux par la Chancellerie

Les représentants du ministère de la Justice ont ouvert la séance en rappelant ce que nous savons tous (pour le lui avoir tant de fois rappelé), à savoir que, d’une part, le décret du 20 mai 2016 a conséquemment modifié les règles de la procédure prud’homale et que, d’autre part, une évolution plus globale des textes a débouché sur davantage de « professionnalisation » des conseillers prud’hommes. 

Et d’en conclure que, dans un tel contexte, les décrets en vigueur (1) ainsi que la dernière circulaire d’application (2) pouvaient désormais sembler être particulièrement décalés. 

Enfin, à des fins de cadrage de la teneur de nos travaux, il nous a bien été précisé qu’il s’agissait, pour le groupe de travail, d’envisager des voies « réalistes » d’évolution. Dit autrement, le système d’indemnisation « plafonnée » ne saura pas remis en cause dans son fondement, il sera simplement adapté aux contingences de la « nouvelle » donne procédurale. 

  • La position et les demandes de la CFDT

La CFDT est intervenue pour se féliciter de voir aboutir sa revendication de mise sur pied d’un groupe de travail. Mais elle a aussi demandé à ce que, dans un premier temps, un bilan du système d’indemnisation « plafonnée » puisse être réalisé. Ce afin de nous permettre de savoir s’il a réellement permis d’atteindre l’objectif qui lui avait été initialement assigné (à savoir l’accès à une meilleure maitrise des coûts de fonctionnement des conseils de prud’hommes). 

Nous avons ensuite précisé que ne pouvions que souscrire aux propos que l’administration avait tenus en début de séance puisque, depuis fort longtemps, nous plaidons nous-mêmes pour une adaptation des textes qui régissent l’indemnisation des conseillers prud’hommes. 

Enfin, pour davantage d’efficacité, nous avons demandé à ce qu’ensemble, nous puissions nous mettre d’accord sur une méthode commune de travail. 

  • Les premiers éléments de réponse de la Chancellerie

Deux premiers éléments de réponse nous ont alors été livrés : l’un négatif, l’autre positif. 

S’agissant du bilan du système d’indemnisation « plafonnée », il nous a été répondu qu’il était techniquement impossible de le réaliser (!). 

– S’agissant de la méthode de travail, il nous a été précisé que l’administration était en attente de nos propositions, sur chacun des points que nous souhaiterions voir traités, et que les travaux du groupe partiraient de ces propositions afin d’élaborer des pistes d’évolution. 

  • Les premiers sujets à avoir été abordés

4 sujets ont d’ores et déjà commencé à être traités. 

 

– 1er sujet : le temps de préparation des BCO  

Avec FO, nous avons proposé : 

– d’en finir avec le plafonnement « par audience » pour passer à un plafonnement « par dossiers »

– de permettre un dépassement du plafonnement sur simple décision du président du conseil de prud’hommes. 

Nous sommes, par ailleurs, intervenus pour : 

– préciser que si cette option devait être retenue, il faudrait impérativement que nous puissions déterminer quelle serait la hauteur du temps indemnisable par dossier ; 

– insister sur le fait qu’il faudrait aussi prévoir une possible indemnisation du temps de préparation du conseiller qui ne préside pas la séance de conciliation et d’orientation (ce qui n’est pas le cas aujourd’hui). 

La CPME et le Medef ont, quant à eux, précisé que passer à un plafonnement par « tranches de dossiers »serait plus adéquat (un peu sur le modèle de ce qui existe aujourd’hui pour les séries (3)). 

Nous sommes alors intervenus pour faire savoir que dans ce cas, il faudrait que les tranches de dossiers ainsi retenues soient les plus fines possible, du type de 1 à 5 dossiers ; de 6 à 10 dossiers ; de 11 à 15 dossiers… 

L’administration a conclu sur ce point en précisant qu’il y avait donc 2 options : 

– soit un système par dossiers ou par tranches de dossiers ; 

– soit un système toujours par audience mais revalorisé en temps. 

 

– 2è sujet : le temps de préparation des BJ 

L’ensemble des acteurs participant au groupe du travail ont semblé admettre que le temps de préparation (aujourd’hui plafonné à 1 heure et octroyé au seul président d’audience) devait être augmenté. 

Nous avons souscrit à cette revendication et avons précisé que, pour la prochaine séance, nous ferions connaître à l’administration dans quelle proportion il nous semblerait souhaitable que cette revalorisation se fasse. 

 

– 3è sujet : le temps de rédaction des jugements 

C’est ici la question des nouveaux présidents d’audience qui a focalisé l’attention des participants au groupe de travail. 

Certains de ses participants sont intervenus pour affirmer que, les concernant, rien n’était prévu dans les textes à ce jour. 

Nous avons alors rappelé que, sous notre impulsion, la circulaire avait tout de même pris le soin d’aborder cette question en précisant que « l’inexpérience d’un conseiller, s’agissant des conseillers nouvellement élus ou nouvellement désignés comme président d’audience, doit aussi être appréciée comme motif pouvant justifier un temps de rédaction supérieur à celui fixé par l’article D. 1423-66 du code du travail (4) »

Mais nous avons aussi précisé que si cette base de texte ne suffisait pas, il faudra faire en sorte que ces intentions soient réglementairement traduites. 

 

– 4è sujet : le temps de rédaction des décisions motivées de radiation 

Le Medef et la CPME ont demandé que la rédaction de ces décisions (qui ne sont pour l’heure considérées que comme de simples mesures d’administration judiciaire) puisse accéder à l’indemnisation. Car elles sont redoutées des avocats et, en conséquence, à même de juguler le nombre des renvois. 

Nous avons fait nôtre cette revendication car, comme nous avons pu le rappeler, nous l’avions nous-même déjà ardemment défendue en 2009, mais hélas sans succès à l’époque… 

 

Le groupe de travail indemnisation doit tenir sa deuxième séance le 21 juin prochain. Dans cette perspective, la délégation CFDT qui y siège souhaite demeurer à l’écoute des attentes de nos conseillers prud’hommes. Aussi, si vous êtes conseiller prud’hommes CFDT, vous avez la possibilité de nous adresser vos contributions à l’adresse mail suivante : prud’homme@cfdt.fr. Elles ne pourront qu’enrichir nos réflexions et nous aider à arrêter les positions que nous serons amenés à défendre en séance. 

(1) Décrets n° 2008-560 du 16.06.09 n° 2009-1011 du 25.08.09, n° 2011-809 du 05.11.11 et n°2014-332 du 13.03.14 (articles R. 1423-55 à D. 1423-75 C.trav.). 

(2) Circulaire du 31.07.14 relative à l’indemnisation des conseillers prud’hommes (NOR : JUSB1418984C). 

(3) Art. D. 1423-67 C.trav. 

(4) Article du Code du travail qui plafonne les temps qui peuvent être consacrés, par le conseiller prud’homme, à son activité de rédaction. 

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