Le Conseil d’Etat a été saisi d’une affaire relative à l’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi. Dans sa décision du 21 octobre 2015, il revient sur chaque moyen des requérants pour rechercher la légalité de la décision d’homologation.
Une entreprise touchée par un plan de sauvegarde de l’emploi
La société Vauban 2020 a été placée en liquidation judiciaire. Le 9 juillet 2013, le tribunal de commerce de Bobigny l’a placée en plan de cession. Le 26 juillet, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi d’Ile de France a homologué le plan de sauvegarde de l’emploi de l’entreprise.
Sur requête de la délégation unique du personnel de la clinique Vauban 2020, du syndicat CFDT santé sociaux et de Mme E, le tribunal administratif a annulé cette décision d’homologation du plan de sauvegarde de l’emploi.
Le liquidateur judiciaire, l’administrateur judiciaire et le ministre du travail, ont alors interjetté appel et ont obtenu gain de cause. La cour d’appel a annulé le jugement du tribunal administratif. C’est pourquoi, les requérants forment un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.
La cour d’appel n’ayant pas statué sur un moyen opérant, moyen qui concernait l’absence d’avis de la délégation unique du personnel sur le futur plan de sauvegarde et son application, le pourvoi est par conséquent fondé.
La procédure cadrée de consultation et d’information du comité d’entreprise
Le pourvoi est fondé sur une absence d’avis de la délégation du personnel. Le Conseil d’Etat va traiter point par point les moyens des parties relatifs à cet avis.
Avant cet examen, il explique, de manière étendue, le régime juridique qui encadre l’établissement du plan de sauvegarde de l’emploi et met en avant, l’importance du contrôle exercé par l’autorité administrative sur la procédure d’information et de consultation du comité d’entreprise. En effet, lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi doit être pris, l’avis, émis en toute connaissance de cause, du comité d’entreprise est obligatoire.
Le 15 juillet 2013 la délégation du personnel a demandé une expertise aux frais de l’employeur, réalisée par un cabinet d’expertise comptable. L’administrateur judiciaire a refusé de payer l’expertise. La délégation unique du personnel voit dans ce refus, une impossibilité pour elle, de rendre un avis en toute connaissance de cause. Le Conseil d’Etat considère que tel n’a pas été le cas, car un expert-comptable est réellement intervenu. Même s’il n’a pas été financé par l’employeur, l’expert a pu mettre en œuvre sa mission et a eu accès aux documents nécessaires.
Le Conseil d’Etat écarte le moyen selon lequel l’administrateur judiciaire n’aurait pas informé et consulté la délégation du personnel sur le projet de licenciement économique puisque le procès-verbal du 15 juillet témoigne du contraire.
Les requérants tentent de contester le plan de cession arrêté par le tribunal de commerce, mais ceci n’est pas possible devant le juge de cassation saisi d’une requête à l’encontre d’une autre décision administrative.
La circonstance selon laquelle l’ordre du jour a été fixé unilatéralement par l’employeur est sans incidence car l’article L. 2325-15 du code du travail dispose que l’ordre du jour peut être fixé unilatéralement par l’employeur ou le secrétaire quand la consultation est rendue obligatoire par une disposition législative, réglementaire ou par un accord collectif de travail. La procédure de licenciement n’est donc pas viciée. De plus, les procès-verbaux ayant été signés par la secrétaire de la délégation unique du personnel, ils ne peuvent avoir été dressés uniquement par l’administrateur.
La présence de l’avocat de l’administrateur judiciaire n’a aucunement vicié la procédure d’information et de consultation dès lors que ce dernier n’a nullement influencé les membres de la délégation.
Enfin, les catégories professionnelles mentionnées dans le document homologué, document établit par l’employeur dans le but d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi, doivent correspondre aux catégories mentionnées dans le plan de cession qui prévoit des licenciements économique. C’est le cas en espèce, la demande contestant cette similitude est rejetée.
En conséquence, le jugement du tribunal administratif est annulé puisque la décision d’homologation était régulière. L’arrêt d’appel est lui aussi annulé pour ne pas avoir traité du moyen des parties relatif à la procédure de consultation et d’informaiton. Le Conseil d’Etat rapelle ainsi que le juge ne doit pas statuer infra petita.