L’Etat stratège réclamé par FO pour éviter la désindustrialisation en France

Cette publication provient du site du syndicat de salariés FO.

Un temps vantée par les gouvernements, la désindustrialisation, par ses dégâts sur le tissu économique hexagonal, a contraint l’État à prendre des initiatives. La dernière en date étant la mise en place d’un pacte productif. Mais prendre l’habit ne fait pas le stratège et bien des emplois ont disparu de ce fait, payant les pots cassés d’une passivité, voire d’une incurie de l’État en matière d’industrie, alors même que l’industrie contribue à la création de la richesse de notre pays, comme l’a rappelé FO Métaux le 21 juin 2019. 

Ce dossier a été publié le 26 juin 2019 dans L’inFO militante n°3309 

La désindustrialisation inquiète. Elle fut pourtant un temps le critère d’une modernité presque arrogante quand fut proclamé le concept de l’entreprise sans usine en 2001, par le patron d’Alcatel, entreprise dont les usines fondirent effectivement. Des sites, il n’en resta plus qu’un quart, des salariés plus qu’un tiers et de l’entreprise plus grand-chose. 

L’industrie, pour l’Insee, ce sont les activités économiques qui combinent des facteurs de production (installations, approvisionnements, travail, savoir) pour produire des biens matériels destinés au marché. Aujourd’hui, selon le classement des cinquante premiers sites industriels de France, établi par le journal L’Usine nouvelle, la plus grosse usine de France est celle d’Airbus, à Toulouse, où FO est en position de leader depuis des années. Airbus a même été classée en 2018 l’entreprise la plus aimée des Français selon le magazine Capital, prenant la place de Dassault. Ce qui peut dénoter un certain attachement des Français envers leur industrie. 

La désindustrialisation se traduit notamment par la perte d’emplois dans le secteur de l’industrie, dit secondaire, et par l’augmentation, notamment en termes de PIB, du secteur tertiaire, qui comprend commerce, transport, services marchands et non marchands. Ce n’est qu’en chiffres que le tertiaire profite de la baisse du secondaire. Les deux sont interdépendants, le tertiaire ne pouvant que subir les conséquences d’un secondaire moribond, à moins d’être un pays entièrement tourné vers le tourisme. En France, l’industrie dite manufacturière (non extractive) représente encore un pilier de l’activité économique du pays, même si elle est tombée à 10,1% du PIB en 2017 et employait 2,8 millions de salariés au deuxième trimestre 2018, selon la DGE (Direction générale des entreprises). Comme dans nombre de pays occidentaux, à des degrés divers, le phénomène de la désindustrialisation s’est poursuivi en France. De l’avis de l’Insee, trois phénomènes structurels handicapent l’industrie française : la concurrence étrangère, l’externalisation par les entreprises manufacturières d’une partie de leurs activités vers les services, et la progression de la demande des ménages pour les services. 

Secondaire et pertes d’emplois 

Engagée depuis les années 1970, la désindustrialisation a connu des pointes vers 1990 et 2000. Néanmoins, elle reste considérée comme synonyme de modernité jusqu’à la crise de 2007-2008. Après cette dernière, qui provoqua une nouvelle accentuation du phénomène, l’exécutif fut contraint de prendre un certain nombre d’initiatives. Parmi elles figurent les états généraux de l’industrie, les investissements d’avenir, la BPI (Banque publique d’investissement), le CICE, et une Conférence nationale de l’industrie, devenu aujourd’hui Conseil national de l’industrie (CNI), ambitionnant d’être l’un des principaux outils de la reconquête industrielle en France. FO y joue un rôle essentiel, participant activement à l’ensemble des comités stratégiques de filière et aux groupes de travail, agissant en tant qu’expert et force de proposition pour muscler un secteur créateur de richesses et d’emplois dans notre pays. Elle agit également au sein du CESE, dont elle a soutenu les différents avis sur la question industrielle, indique Éric Keller, secrétaire fédéral de FO Métaux. 

Malgré les quelques brefs signaux au vert dans l’économie hexagonale en 2018, à regarder les récentes annonces qui font la une des médias en ce printemps 2019 à propos de General Electric, Whirlpool ou encore Ascoval, il est bien difficile de croire que notre industrie serait enfin tirée d’affaire et qu’un nouvel avenir serait tracé pour tous les salariés qui, jour après jour, espèrent ne pas subir un plan social, voire la fermeture de leur entreprise, alerte Éric Keller. 

À l’occasion de la déconfiture, au printemps, dans la Sarthe, de l’entreprise Arjowiggins, où une nationalisation a été demandée par pétition, on a pu s’étonner de la passivité de l’État, pourtant actionnaire référent de la maison mère d’Arjowiggins, Sequana, via la BPI. 

L’État, quel stratège ? 

Ce qui amène à poser la question de l’État stratège. En 2014, le vice-président du Conseil d’État, Jean-Marc Sauvé, considérait que : À un État interventionniste, s’est substitué un État stratège et pilote, soucieux de faire participer les citoyens à l’élaboration des décisions administratives, sans pour autant se déposséder de ses compétences ni de ses prérogatives. Mais différentes conceptions existent. Certains voient un État réduit, qui cherchera à compenser, par l’intelligence de ses calculs, la faiblesse de ses moyens ?, un État architecte et/ou sauveur. Sans verser dans le dirigisme, un minimum d’anticipation s’impose pour éviter que ce soit les emplois qui paient les pots cassés et que les aides publiques, versées sans grandes contraintes et contreparties, ne servent qu’à nourrir des multinationales ou des fonds sans autre but qu’un profit rapide et maximal. Au final, dans ces deux cas, ce sont les contribuables qui paient la note. Pour Éric Keller, la base industrielle dont nous disposons encore aujourd’hui doit être protégée et soutenue par la puissance publique. Au lieu de cela, l’État a assisté ces dernières années, avec une passivité complice, à trop de gâchis industriel sur des secteurs des plus stratégiques. Ainsi de la session d’Areva T&D à Alstom et Schneider, qui s’est traduite in fine par des délocalisations de production. Et que dire du rachat d’Alstom Power par GE avec son cortège de suppressions d’emplois ?. À se demander si l’action de l’État ne relève pas plus de la tactique que de la stratégie… 

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