Les syndicats et le referendum: une histoire délicate

L’affaire du referendum organisé par l’entreprise SMART en Alsace ne manque pas d’intérêt. Il met en effet les organisations syndicales dans un corner qui pose de façon aiguë la question de leur représentativité et de leur légitimité.  

Referendum et temps de travail

Dans le cas de l’entreprise SMART, le referendum a prévu une dégradation des clauses substantielles du contrat de travail. En l’espèce, il s’est agi d’augmenter la durée du travail en dérogeant négativement aux dispositions sur les heures supplémentaires.  

Dans la pratique, ce sont les cadres qui ont largement approuvé l’accord (à 74%), en échange d’un renoncement à dix jours de réduction du temps de travail. Les ouvriers ont pour leur part voté majoritairement non à ce referendum (39% de oui seulement). Cette distorsion est intéressante parce qu’elle fait peser un doute sur l’éventuelle légitimité du résultat final par collège. 

En outre, les organisations syndicales rappellent que ce referendum est purement consultatif et n’a pas de valeur légale. C’est toute la difficulté de l’exercice: si les organisatins représentatives ne sont pas dépouillées de leur pouvoir de négocier par le recours au referendum dans ce ces de figure, la crédibilité de leur position en prend quand même un sérieux coup. Comment justifier l’opposition à un accord quand une majorité de salariés a voté pour? 

Légitimité et représentativité en question

Les organisations syndicales de SMART viennent d’annoncer la mise en place d’une intersyndicale pour faire valoir leur droit d’opposition à l’accord. La CFDT l’explique notamment par le fait que les résultats financiers de l’entreprise sont bons et qu’aucune circonstance économique ne justifie une baisse effective de la rémunération. Ce point de vue est évidemment partiel: dans la pratique, Daimler met son usine alsacienne en concurrence avec un site de production installé en Slovénie, où les coûts sont moins élevés. C’est pour relever ce défi que les salariés français ont accepté une diminution de leur rémunération. 

Face à ce choix majoritaire, les organisations syndicales pourront-elles légitimement s’opposer à l’accord? Le referendum pose à nouveau la question de la différence entre légitimité et représentativité. Le fait que les organisations syndicales soient représentatives parce qu’elles recueillent plus de 10% aux élections d’entreprise leur permet-il de s’opposer à une disposition sur laquelle les salariés se sont exprimés directement? 

Traditionnellement, les organisations syndicales rappellent qu’elles défendent une visin d’ordre public général, c’est-à-dire dépassant la seule problématique de l’entreprise. C’est ce qui justifie leur emprise sur la négociation dans l’entreprise.  

Avec la montée de la négociation d’entreprise, on peut toutefois imaginer que cette question cruciale se posera à nouveau sous un jour plus favorable aux consultations locales. 

Incontestablement, les accords possibles sur le travail du dimanche devraient donner l’occasion de reformuler la question.  

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmarkClose
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer

La FNSEA change de suppléante à la sous-commission “protection sociale complémentaire” de la CNNCEFP

La sous-commission de la protection sociale complémentaire de la commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP) accueille un nouveau membre. Il s'agit de Yuliia Fedenko qui devient représentante suppléante de la FNSEA à la place de Claire Ruaud. Retrouvez l'arrêté de nomination en cliquant...

Avis d’extension d’un avenant à la CCN des entreprises au service de la création et de l’évènement

La ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, envisage d’étendre, par avis publié le 4 février 2025, les dispositions de l'avenant n° 1 du 17 décembre 2024 relatif à la révision de la convention collective du 27 juin 2024 concernant les entreprises techniques au service de la création et de l’événement (IDCC...

Avis d’extension d’accords territoriaux (Indre-et-Loire et Loiret) dans la métallurgie

La ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles envisage d’étendre par avis publié le 4 février 2025, les dispositions deux accords du 8 janvier 2025 relatifs aux mesures urgentes en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle, conclus dans le cadre de la convention collective nationale de la métallurgie (Indre-et-Loire et Loiret ...