Plusieurs rapports relatifs à la sécurité sociale ont été récemment publiés par la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS), la Cour des comptes ou encore le Haut conseil de financement de la protection sociale (HCFi-PS). Ces rapports multiples permettent de tirer plusieurs enseignements sur les pistes d’évolution du fonctionnement de la protection sociale en France.
La certification des comptes de la sécurité sociale émise avec de nombreuses réserves
Le 22 juin 2015, la Cour des comptes a publié le rapport de certification des comptes du régime général de la sécurité sociale pour l’exercice 2014.
Il est ressorti de ce rapport que le déficit est moins important qu’en 2013 mais reste conséquent : 9,7 milliards d’euros.
De nombreuses réserves ont été émises par la Cour des comptes.
La branche maladie est encore victime d’un trop grand nombre d’erreurs qui ont des répercussions financières élevées sur les comptes : le dispositif de contrôle interne de la CNAMTS doit être renforcé.
La branche accident du travail et maladie professionnelle doit améliorer le recensement des contentieux relatifs à l’application de la législation ainsi que la détermination des taux de cotisations.
Dans la branche familiale, la Cour des comptes souligne que l’incidence financière des anomalies et erreurs affectant les prestations légales est encore trop importante.
Concernant la branche vieillesse, des erreurs importantes affectent de manière significative le calcul des pensions de retraite nouvellement attribuées ou révisées d’après la Cour des comptes. La fiabilité des données reportées aux comptes de carrière reste également insuffisante. La CNAVTS est donc invitée à poursuivre la réduction de ces dysfonctionnements.
Enfin, s’agissant du recouvrement et de l’ACOSS, des progrès comme le déploiement d’un plan national de contrôle de l’ordonnateur ont été salués. Cependant, des incertitudes significatives affectent toujours les prélèvements sociaux des travailleurs indépendants. C’est pourquoi la Cour des comptes souhaite que l’ACOSS renforce le dispositif de contrôle interne national et mesure le risque financier pesant sur les montants recouvrés par la branche.
Un déficit de la sécurité sociale réduit pour 2015 ?
D’après le rapport rendu par la Commission des comptes de la sécurité sociale en juin 2015, le déficit global et celui du régime général de la sécurité sociale seraient en baisse pour l’année 2015.
En effet, le déficit global atteindrait 13,0 milliards d’euros, soit 100 millions d’euros de moins qu’en 2014, et celui du régime général devrait s’établir à 9,5 milliards d’euros en 2015, contre 9,7 milliards d’euros en 2014.
Cette baisse du déficit n’est pas homogène et plusieurs branches de la sécurité sociale voient leur déficit s’accroître.
Le déficit de la branche maladie atteindrait 7,5 milliards d’euros en 2015. Cette augmentation résulte du fait que les dépenses de l’assurance maladie progressent plus rapidement que celle de ses recettes (3,2% contre 3,0%).
Le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) se creuserait à 3,6 milliards d’euros, soit 700 millions d’euros de plus par rapport à l’objectif fixé dans la loi de financement de sécurité sociale (LFSS).
La branche famille verrait également son déficit augmenter de 2 milliards d’euros.
La collecte des cotisations retraites complémentaires bientôt confiée aux URSSAF ?
Le rapport rendu par le HCFi-PS le 15 juillet 2015 au directeur-adjoint du cabinet du Premier Ministre envisage trois évolutions possibles concernant la collecte des cotisations de retraite supplémentaires par les Urssaf.
Les caisses de retraites complémentaires Agirc-Arrco se verraient retirer la mission de collecte selon trois scénarios possibles selon le HCFi-PS. Ces scénarios auraient une application progressive et ne sont pas nécessairement exclusifs les uns des autres.
Scénario à court terme : le contrôle des assiettes
Dans un premier temps, les URSSAF se verraient confier le contrôle des assiettes de cotisations pour le compte des régimes complémentaires (page 300 du rapport). Ce contrôle devrait pouvoir être mis en œuvre à très court terme et représente un réel intérêt financier immédiat pour l’Agirc et l’Arrco.
Scénario à moyen terme : élargissment des fonctions transférées
Dans un second temps, à moyen terme, le HCFi-PS propose de confier aux URSSAF le traitement des déclarations mensuelles et des encaissements, le contrôle des assiettes de cotisations, la gestion des procédures contentieuses et pré-contentieuses, et une partie de l’interlocution avec les entreprises (page 302 du rapport). Cependant, les auteurs du rapports reconnaissent que le transfert des fonctions de recouvrement serait nécessairement partiel et entrainerait des problèmes de responsabilités réciproques entre les URSSAF et l’Agirc-Arrco. Cela engendrerait forcément des coûts supplémentaires pour une adaptation à ce nouveau mode de fonctionnement. De même, un tel scénario n’apporterait aucune simplification du point de vue des entreprises qui auraient toujours deux interlocuteurs différents.
Scénario à long terme : les fonctions de recouvrement confiées aux URSSAF
Enfin, la troisième situation envisagée, applicable à l’horizon 2020, propose de transférer aux URSSAF l’ensemble des activités de recouvrement pour le compte de l’Agirc-Arrco, incluant la gestion des affiliations et l’interlocution avec les entreprises (page 303 du rapport). Le HCFi-PS envisage alors deux évolutions possibles : soit les URSSAF laissent aux entreprises déclarantes la responsabilité de calculer les cotisations de retraite complémentaire, soit les URSSAF récupèrent cette prérogative. La première variante est actuellement la plus plausible. Cependant, ce troisième scénario implique des coûts en terme de reconversion et d’accompagnement des personnels au sein des groupes de protection sociale ou des URSSAF : 200 à 250 millions d’euros dans le premier cas, 400 à 450 millions d’euros dans le seconds cas.
L’unification financière des régimes d’assurance maladie
Le HCFi-PS propose différentes pistes d’unification financière.
La première piste implique une unification sans aucune modification des structures de gestion. Soit cette intégration financière s’accompagne d’une simplification des mécanismes d’affiliation, soit elle s’accompagne de la création d’un régime unique d’affiliation. Pour aider à la réalisation de cette évolution, la mise en place d’un fichier unique des assurés serait nécessaire.
La seconde piste évoque l’évolution de la structuration même des régimes. Soit cela se concrétiserait pas une organisation de l’assurance maladie autour d’un régime unique, soit cela se caractériserait pas la mise en œuvre d’un régime propre aux non salariés annexe au régime général.
Le premier cas serait une révolution dans l’organisation de la sécurité sociale, cela aurait des conséquences lourdes en termes de gestion des ressources humaines des organismes cédant leurs compétences. Le second cas aurait pratiquement les mêmes conséquences en ajoutant de la complexité avec une dualité de régimes d’affiliation.