Le partenariat Infogreffe-LinkedIn est-il conforme au RGPD ?

La nouvelle est tombée il y a peu de temps : le site Infogreffe s’est allié à LinkedIn pour créer des pages Entreprise directement sur le réseau social. A l’heure actuelle, cette information n’a fait réagir personne… pourtant il y a de quoi s’interroger sur cette annonce supposée être favorable au “rayonnement des entreprises françaises” (rien que ça), notamment à l’aube de l’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données (RGPD). 

 

Le contexte : que sont Infogreffe et LinkedIn

Plaçons les choses dans leur contexte : d’un côté nous avons Infogreffe, groupement d’intérêt économique des greffiers des Tribunaux de commerce qui répertorie, dans le cadre d’une mission de service public, toutes les informations relatives aux entreprises, toutes les formalités qui sont obligatoires pour les entreprises sont payantes et des amendes peuvent même être encourues. De l’autre côté, nous avons LinkedIn, réseau social américain bien connu, racheté par une certaine société nommée Microsoft en 2016. 

Pour résumer, un organisme chargé d’une mission de service public, auprès duquel les entreprises sont obligées de passer, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes, donnerait gentiment à une multinationale américaine toutes les informations nécessaires à la création de chacune des pages entreprise. 

La communication officielle d’Infogreffe est très évasive car elle ne donne aucun indice sur les modalités de cette collaboration et fait planer un doute certain sur la conformité au RGPD. La seule chose que nous savons à l’heure actuelle, c’est que le site d’Infogreffe en lui-même n’est pas encore conforme et serait soumis à un protocole destiné à le mettre en adéquation avec le Règlement d’ici le 25 mai 2018. 

 

Ce partenariat est-il RGPD compatible ?

Le RGPD ne semble pas être le premier soucis d’Infogreffe quand on lit le communiqué triomphant publié le 15 février. La seule véritable information est que “des Pages Entreprises sur Linkedin” seront créées. Mais à aucun moment Infogreffe ne prend la peine de nous dire quelles données seront proposées sur ces pages. Le nom de chef d’entreprise sera-t-il divulgué ? Une adresse mail sera-t-elle présente ? LinkedIn se contentera-t-il de reprendre des informations strictement liées à l’entreprise ? 

D’après nos informations, seules les informations à caractère non personnel seront publiées directement sur LinkedIn. L’application du RGPD serait alors écartée. On peut d’ailleurs voir un exemple de page entreprise créée automatiquement sur le réseau social grâce à ce partenariat : 

 

Que retenir de cette page bien peu attractive ? 

D’abord, seuls le nom de l’entreprise et le lieu de son siège social semblent être divulgués par Infogreffe sur LinkedIn. 

Ensuite, et c’est un point important, on apprend que la page a été créée “automatiquement par LinkedIn” et qu’elle n’est “pas maintenue, validée ou affiliée à” l’entreprise qui est supposée l’avoir créée. 

Enfin, c’est sûrement la phase la plus intéressante : un lien direct vers infogreffe.fr est proposé sur la droite de la page ! Pratique ! 

En résumé, Infogreffe crée, sans leur demander leur avis, des pages LinkedIn à toutes les entreprises qui n’en ont pas. Ces pages désuètes, sans grand intérêt, renvoient directement au site d’Infogreffe sur lequel sont en vente tous les documents liés à la société. On voit bien ce que les deux partenaires ont à gagner dans ce deal… on voit moins ce que les entreprises ont à en tirer. 

L’avenir nous dira si les entrepreneurs s’empareront de cette opportunité dépeinte comme une aubaine sans précédent par le communiqué d’Infogreffe. On restera toutefois sceptique devant la légèreté avec laquelle le partenariat est présenté, sans aucune information préalable des entreprises qui sont pourtant les premières concernées. 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmarkClose
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer

Nouvelles nominations (CGT) à la commission spécialisée pour la prévention des risques au travail

Un arrêté du 16 janvier 2025 officialise des nominations au sein de la commission spécialisée relative à la prévention des risques physiques, chimiques et biologiques. Cette commission relève du Conseil d'orientation des conditions de travail (COCT). La Confédération générale du travail (CGT) a proposé deux nouveaux représentants de salariés pour cette instance. Ainsi, Jean-Marie Mangeot est nommé membre titulaire, succédant à Pierre-Yves Haugel, tandis que Julien...
Lire plus

Ratio de soignants par patient à l’hôpital : un compromis politique à moindre frais pour le gouvernement

Lors de leur niche parlementaire du 23 janvier 2025, les députés socialistes sont parvenus à faire adopter tous leurs textes dont un qui fixe un ratio minimum de soignants par patient à l'hôpital public. Son objectif est de "garantir la qualité et la sécurité des soins". Mais si son objectif est globalement partagé par la représentation nationale, les moyens mis en œuvre pour y parvenir le sont beaucoup moins, certains y voyant un danger pour la pérennité de l'activité hospitalière dans les zones sous-denses...

Avis d’extension d’un avenants dans la CCN de la blanchisserie laverie

La ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, envisage d’étendre, par avis publié le 24 septembre 2024, les dispositions de deux avenants du 21 octobre 2024 et d'un accord du 18 novembre 2024 relatifs à l'annexe « Ingénieurs et Cadres », à l'annexe « Employés, Techniciens et Agents de maîtrise » et aux modifications de certains articles de la convention, conclus dans le cadre de la convention collective nationale...