Le forfait jours dans les cabinets de conseil

Cet article provient du site Décider&Entreprendre.

Le cas des forfait-jours dans les cabinets de conseil illustre bien comment un accord de branche vise à rendre impossible l’accès des TPE à des dispositifs favorables que les grandes entreprises veulent se réserver. Ainsi, dans la branche du conseil, l’accord au forfait-jour est réservé aux entreprises qui ont négocié un accord collectif sur le sujet. Pour les TPE, c’est un accord de branche très défavorable qui s’applique. 

Le forfait jours permet de rémunérer certains salariés sur la base d’un nombre de jour travaillés dans l’année, sans décompte du temps de travail. Selon l’article L3121-63 du code du travail, un accord collectif d’entreprise, d’établissement, ou, à défaut, une convention collective ou un accord de branche, doit établir les conditions d’application du forfait jours. 

Depuis 2011, de nombreuses conventions de forfait en jours fixées par convention collective ont été annulées par la Cour de cassation au motif qu’elles n’assuraient pas une protection suffisante de la sécurité et santé des salariés concernés. 

Parmi ces conventions, nous retrouvons par exemple celle des bureaux d’études, dite Syntec, dont la convention de forfait a été annulée par un arrêt du 24 avril 2013, ce qui a conduit à la conclusion d’un nouvel accord le 1er avril 2014. 

Les dispositions du code du travail sur le forfait jours sont-elles adaptées aux TPE ?

Comme indiqué en introduction, les entreprises peuvent signer un accord collectif pour encadrer le recours au forfait jours en leur sein. 

Cependant, les très petites entreprises comptent moins de 10 salariés et n’ont ni délégué syndical, ni délégué du personnel. Elles n’ont donc aucune possibilité de négocier en interne un accord de forfait jours qui soit adapté à leur activité. 

Les TPE dépendent donc, dans une majorité des cas, des accords de leur branche ou de leur convention collective, comme c’est le cas dans le Syntec : les dispositions du code du travail relatives au forfait jours sont donc bien peu adaptées aux petites entreprises. 

Que doit respecter une TPE soumise à la convention Syntec ?

La convention de forfait jours du Syntec est soumise à certaines conditions. 

La première concerne les fonctions que doivent occuper les salariés concernés par le forfait jours. En effet, seuls les personnels exerçant des responsabilités de management élargies ou des missions commerciales, de consultant et qui accomplissent des tâches de conception/création/conduite et supervision de travaux, peuvent être soumis au forfait jours. Ces derniers doivent, de plus, disposer d’une large autonomie, liberté et indépendance lorsqu’ils organisent et gèrent leur temps de travail. 

La seconde est une contrainte pécuniaire : tout salarié en forfait jours dans le Syntec doit relever au minimum de la position 3 de la grille de classification des cadres ou bénéficier d’une rémunération annuelle supérieure à 2 fois le plafond annuel de la sécurité sociale ou enfin, être mandataire social. De plus, sa rémunération annuelle doit au moins être égale à 120% du minimum conventionnel du coefficient concerné. Autrement dit, un cadre relevant de la position 3.1 (la position minimum) ne peut être éligible au forfait jours que s’il perçoit un salaire minimal brut mensuel de 4106.52€. 

La troisième condition se déploie en un ensemble de contraintes qui imposent une organisation drastique au patron de TPE : l’avenant du 1er avril 2014 impose des obligations de suivi, de contrôle, et d’entretiens à mettre en œuvre afin d’encadrer le salarié soumis au forfait jour. L’employeur doit par exemple établir un document, qui prévoit, entre autres, le nombre et la date des journées travaillées des salariés ou le positionnement des jours non travaillés. Il est également tenu par certains impératifs permettant la garantie des temps de repos et l’obligation de déconnexion des salariés : affichage dans l’entreprise d’informations sur le repos quotidien et hebdomadaire des salariés, mise en place d’outil de suivi pour assurer le respect des temps de repos mais également le droit à la déconnection des salariés. 

L’organisation du travail du salarié est également contraignante pour l’employeur, qui doit contrôler la charge de travail de son salarié, l’amplitude de ses journées et prévoir l’organisation de deux entretiens individuels minimum dans l’année et d’un entretien spécifique en cas de difficultés « inhabituelles » pour le salarié. 

Enfin, l’accord rappelle l’obligation légale et réglementaire d’information et de consultation, et ce chaque année, du comité d’entreprise mais également du CHSCT. Cette obligation est manifestement problématique pour les TPE. 

L’application de toutes ces dispositions, pour une TPE de la convention collective Syntec, est de toute évidence très coûteuse, chronophage et parfois tout bonnement impossible pour des raisons aussi bien matérielles que pratiques. 

 

Salaire minimal pour un forfait-jour

Un cadre relevant de la position 3.1 (la position minimum) ne peut être éligible au forfait jours que s’il perçoit un salaire minimal brut mensuel de 4106.52€. 

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