Déjà dans le viseur de la Cour des comptes il y a quatre ans mais aussi en 2017, les douaniers en prennent encore pour leur grade. Au-delà de la gestion aléatoire du renouvellement de leurs équipements, ce sont cette fois leurs missions qui sont critiquées par la Cour.
Le conseil constitutionnel a rendu, le 15 février dernier, une décision qui devrait faire couler encore un peu d’encre du côté des douaniers. Alors qu’il avait été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative au droit de communication aux agents de douanes des données de connexion.
Si dans un premier temps l’institution avait jugé en 2012 conforme à la Constitution ce droit, elle a finalement viré de bord à cause d’un “changement de circonstances”. Avec cette décision, ce sont directement les pouvoirs d’intervention des douaniers français qui sont retoqués.
Ont été opposés le droit à la vie privée et les prérogatives des douaniers. Avec ce droit, les douaniers pouvaient obtenir les données de connexion d’individus directement auprès des opérateurs ou des prestataires de télécommunication s’ils étaient au coeur d’une enquête pour travail dissimulé et blanchiment aggravés.
Le Conseil constitutionnel est donc revenu sur sa décision donnée en 2012 en s’appuyant sur une jurisprudence venue de la Cour de justice de l’Union Européenne, avec notamment l’arrêt Télé 2. Ainsi, l’institution française a estimé que les douaniers ne pouvaient agir de la sorte sans fournir plusieurs garanties.
La communication des données de connexion est de nature à porter atteinte au droit au respect de la vie privée de la personne intéressée. Si le législateur a réservé à certains agents des douanes soumis au respect du secret professionnel le pouvoir d’obtenir ces données dans le cadre d’opérations intéressant leur service et ne leur a pas conféré un pouvoir d’exécution forcée, il n’a assorti la procédure prévue par les dispositions en cause d’aucune autre garantie. Dans ces conditions, le législateur n’a pas entouré la procédure prévue par les dispositions contestées de garanties propres à assurer une conciliation équilibrée entre, d’une part, le droit au respect de la vie privée et, d’autre part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions.
Conseil Constitutionnel
Le droit des douaniers français ne devrait néanmoins pas être abrogé immédiatement. Le Conseil constitutionnel souligne que la décision peut être “reportée dans le temps” afin que l’ordre public continue d’être préservé.
Pour le moment, les agents des douanes ayant au moins le grade de contrôleur peuvent continuer d’avoir accès aux données de télécommunications d’individus en contactant directement leur opérateur. Mais les données doivent être détruites “à l’extinction de l’action pour l’application des sanctions fiscales.”
Malgré les éloges dressés par Gérald Darmanin sur les résultats des actions menées par la douane, il ne s’agit pas de la première fois que ce corps se voit attaqué. Régulièrement la Cour des comptes pointe du doigt plusieurs incohérences.
En 2018, et contrairement à ce qu’affirme le ministre de l’Action et des comptes publics, le gendarme financier expliquait que la mission fiscale, le contrôle et la taxation des marchandises entrant sur le territoire dont le tabac, était peu performante et rapportait peu.
Sachant que les douanes sont directement rattachées à ce ministère, ces rapports semblent aussi montrer plusieurs manquements au sommet de l’Etat. Et que surtout, malgré ces alertes, rien ne change.