La Cour de cassation s’est prononcé sur cette question par un arrêt n° 2170 rendu le 8 décembre 2016.
En l’espèce, un syndicat CGT de cheminots a déposé le 14 décembre 2012 un préavis de grève illimité pour les vendredis à compter du 21 décembre 2012.Ce préavis a été suivi d’effet les trois vendredis suivants, les 22 et 29 décembre 2012 et le 4 janvier 2013. Le vendredi 11 janvier 2013, le travail a repris et aucun salarié n’était gréviste. Les vendredis 12 avril et 31 mai 2013, les salariés ont repris la grève.
La SNCF mobilités a saisi le TGI de demandes tendant à dire que le préavis a cessé de produire effet depuis le 11 janvier 2013 et que les arrêts de travail des 12 avril et 31 mai 2013 sont illicites.
La reprise du travail ne met pas un terme au préavis de grève illimité
La Cour de cassation a considéré que l’absence de salariés grévistes au cours de la période visée par le préavis, même en cas de préavis de durée illimitée, ne permet pas de déduire que la grève est terminée.
La haute juridiction ajoute que seuls les syndicats représentatifs à l’origine du préavis de grève peuvent prendre la décision de fin de la grève.
Le comportement abusif du syndicat n’est pas caractérisé selon la Cour de cassation
Dans sa décision du 8 décembre 2016, la Cour de cassation a entièrement censuré la décision rendue par la Cour d’appel de Riom sur cette affaire. En effet, celle-ci avait considéré notamment que s’agissant d’un préavis à durée illimitée, ses effets ont nécessairement pris fin lors de la cessation de la grève caractérisée par la reprise du travail le 11 janvier 2013. La Cour d’appel a jugé que le dispositif mis en place par le syndicat consistant à relancer à tout moment et sans aucune limitation dans le temps une grève interrompue depuis plusieurs mois, relève d’un abus.La Cour de cassation a écarté les arguments de la Cour d’appel, renforçant par cette décision la sacralité du droit de grève.
Quelles suites pour cette affaire renvoyée devant la Cour d’appel de Limoges ?
Alors que la Cour d’appel de Riom n’a pas hésité à taxer d’abusif le comportement des syndicats, la Cour de cassation a jugé que l’existence d’un abus n’est pas caractérisée.
Toutefois, la question de l’abus mérite d’être attentivement étudiée. La possibilité pour les syndicats ayant déposé un préavis de grève illimité de reconduire à tout moment la grève et ce, même après des mois de reprise du travail pourrait porter de graves atteintes à certains droits et obligations des employeurs.
Malgré sa décision, la Cour de cassation ne semble pas exclure totalement l’hypothèse d’un abus. La Cour d’appel de renvoi pourrait décider de se conformer à la décision de la Cour de cassation ou au contraire se rebeller contre cette décision.
Dans cette dernière hypothèse, il incomberait à la Cour de renvoi d’exposer des motifs suffisants à caractériser l’existence d’un abus de la part du syndicat dans son droit de maintenir ou lever son préavis de grève.
Le texte de l’arrêt est consultable ci-après.