Cette publication a été initialement publiée sur le site du syndicat de salariés FO.
Plutôt que de généraliser la réglementation du travail en vigueur à la SNCF ( près de 150 000 cheminots) à l’ensemble des entreprises privées qui voient le jour dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire ( environ 5 000 cheminots à ce jour), employeurs et gouvernement ont choisi d’abroger celle-ci et d’imposer à l’inverse un nivellement par le bas à l’ensemble des cheminots.
Pour que les trains puissent circuler normalement, un cheminot ne peut pas effectuer ses 35 heures hebdomadaires comme les autres salariés. Il doit donc être soumis à une réglementation spécifique de l’organisation du travail, qui adapte le Code du travail de manière à assurer la continuité du service public en toutes circonstances. Les cheminots peuvent par exemple travailler plus de six heures sans pause et même 24 heures d’affilée en cas d’accident. Cette réglementation fixe aussi les droits des cheminots, en termes de récupération, de repos, de congés…
Avant la loi de 2014 portant réforme du secteur ferroviaire, les cheminots de la SNCF, sous statut ou contractuels, étaient ainsi soumis à une réglementation adoptée par décret (RH0077, décret 99-1161). Mais la SNCF n’a plus le monopole du transport ferroviaire…
La loi de 2014, porte ouverte au dumping social
La loi de 2014 prévoit trois niveaux de réglementation pour l’ensemble du secteur ferroviaire, la SNCF et les entreprises privées : un décret socle que le gouvernement a présenté en mars 2016, une convention collective nationale du ferroviaire (CCNF) et des accords d’entreprise.
Au passage, autant dire que dans ce contexte, les cheminots FO surveillent comme le lait sur le feu toutes les évolutions de la hiérarchie des normes (loi, accord de branche et accord d’entreprise).
À ce jour, le décret socle présenté par le gouvernement et qui constitue donc le plancher minimum de droits pour l’ensemble des cheminots, loin de reprendre la réglementation qui existait à la SNCF comme le revendiquait FO, a au contraire réduit les droits des cheminots, diminuant par exemple leurs temps de repos.
Quant à la convention collective, en cours de négociation, FO en a déjà rejeté les trois premiers volets (le champ d’application, l’organisation du travail, la formation professionnelle), faisant même valoir son droit d’opposition sur les deux premiers.
Non seulement cette convention collective améliore à peine le décret socle en tirant vers le bas la réglementation sur l’organisation du travail, mais elle ouvre la porte au dumping social, son champ d’application excluant de nombreux cheminots, ont expliqué leurs délégués FO réunis en congrès du 2 au 6 octobre.
Elle ne s’appliquera pas, par exemple, aux entreprises sous-traitantes sur les chantiers d’infrastructures qui restent soumises à la convention collective du Bâtiment, moins favorable. Les entreprises de réparation du matériel roulant en sont également écartées, tout comme d’autres entreprises de transport de voyageurs, telles Thello qui exploite des trains entre la France et l’Italie et utilise la convention collective de la restauration pour… ses contrôleurs !
FO entend défendre les classifications contre la polyvalence
À la SNCF, la réglementation par décret (RH0077), abrogée en décembre 2016, est remplacée par un accord d’entreprise qui… prévoit la possibilité de négocier des dérogations au niveau des établissements locaux avec les délégués syndicaux des seules organisations syndicales qui ont validé l’accord (CFDT, UNSA qui l’ont signé et CGT qui ne s’y est pas opposée), voire même avec les délégués du personnel en l’absence de délégués syndicaux.
Les étapes à venir ne réservent rien de meilleur. Un quatrième volet de la CCNF est en cours de négociation qui porte sur la classification des différents métiers des cheminots et la rémunération. D’ores et déjà, l’organisation patronale, l’Union des Transports Publics (UTP) a déjà évoqué la possibilité de réduire la classification des métiers en deux catégories seulement : d’un côté ceux liés à la production et le restant de l’autre.
En clair, la polyvalence est à l’ordre du jour. Les cheminots FO ont réaffirmé leur revendication d’une classification des métiers au moins équivalente à celle reprise dans le dictionnaire des filières de l’opérateur historique qui a fait ses preuves et garantit un haut niveau de sécurité, de savoir-faire, de compétence et de qualification des postes.
Encore un point qui démontre à quel point la qualité du service public dépend des conditions de travail des cheminots.