La Cour de Cassation vient de confirmer une décision de la Cour d’Appel de Paris, pour qui un chauffeur Uber était un salarié et non un travailleur indépendant. Cette décision devrait modifier en profondeur l’économie des plate-formes en France.
Voilà une décision de la Cour de Cassation bien désagréable pour Uber et son modèle économique fondé sur l’externalisation des coûts auprès de ses chauffeurs. En France, les chauffeurs seront désormais considérés comme salariés et non comme travailleurs indépendants. L’impact économique de la décision devrait être terrible.
Pourquoi la Cour de Cassation a pris cette position
La Cour de Cassation a pris soin de replacer sa décision dans l’application du droit communautaire. Dans la pratique, la jurisprudence française considère que, indépendamment de la volonté des parties, une relation salariale se caractérise par le pouvoir de donner des instructions, le pouvoir d’en contrôler l’exécution, et le pouvoir de sanction.
Les juges de la chambre sociale ont considéré comme la relation entre Uber et ses chauffeurs répondait bien à ces trois critères. Elle a donc validé la requalification d’un ancien chauffeur Uber en salarié. Potentiellement, ce précédent pourrait bénéficier à tout chauffeur qui en demanderait l’application.
Le modèle Uber est moribond
Cette décision est particulièrement négative pour Uber. L’entreprise américaine a en effet creusé ses pertes récemment. Celles-ci atteignent 1,16 milliard $ sur un an.
La requalification des chauffeurs en salariés en France annonce un renchérissement de la main-d’oeuvre et donc une augmentation des charges de l’entreprise. Qui plus est, l’intégration de milliers de salariés au statut de chauffeur suppose des coûts transverses colossaux.
Alors que les investisseurs doutaient déjà de la capacité d’Uber à atteindre la rentabilité, la décision de la Cour de Cassation ne peut que les conforter dans le sentiment qu’Uber ne gagnera jamais d’argent…
Un impact sur l’ensemble des plate-formes
Pour l’ensemble des plate-formes, cette décision est annonciatrice de jours difficiles, et le bon temps où l’on pouvait ubériser tranquillement en demandant à ses « employés » de se déclarer indépendants touche à sa fin.
Les entrepreneurs du secteur en ont conscience, puisqu’ils encouragent les plate-formes à pourvoir à une protection sociale complémentaire pour leurs travailleurs indépendants.
Reste que, selon la jurisprudence qui vient de sortir, et qui confirme une jurisprudence précédente portant sur une plate-forme de livraison de repas, ce n’est pas seulement à une protection sociale complémentaire que les plate-formes vont devoir pourvoir. Mais à une protection sociale tout court…
L’économie du secteur, déjà confronté à des problèmes de rentabilité, devrait en souffrir fortement.
Rien n’exclut à l’étouffement dans l’oeuf d’un modèle naissant, par internalisation de coûts sociaux venus de l’ancien monde.