Ce texte a été, initialement, publié sur le site du syndicat CFE-CGC.
Déclaration faite le 17 octobre 2016 lors de la rencontre entre le président de la République et les élus d’Arcelor Mittal Florange (Moselle) :
Monsieur le président de la République,
Avant d’aborder la situation de la filière sidérurgique en France, en Europe, la CFE-CGC tient d’abord à revenir sur le dossier spécifique de Florange, l’objet de votre présence sur le site aujourd’hui.
En préambule, la CFE-CGC n’a jamais cru qu’une loi – quelle qu’elle soit – pouvait empêcher la fermeture de la filière de production d’acier à Florange ! Ce ne sont pas les lois qui font fonctionner les usines, mais les carnets de commande, les marges… Et la commande publique ou parapublique, contrairement à un autre dossier d’actualité, ne pouvait pas agir sur le dossier Florange.
La nationalisation de la seule usine de Florange aurait été une aberration, sur le plan industriel, économique… La CFE-CGC se félicite de l’arbitrage qui a été fait à l’époque.
L’accord du 30 novembre 2012 entre ArcelorMittal et le gouvernement français a obligé le Groupe à s’engager sur une enveloppe d’investissement de 180 M€ sur 5 ans, ce qui n’est vraiment pas dans les habitudes de la « maison ». Des investissements majeurs pour la pérennité du site ont été réalisés ou sont actuellement engagés, pour une somme totale qui devrait sensiblement dépasser l’engagement initial. Citons par exemple :
– L’adaptation des capacités de production aux nouveaux produits (Usibor notamment) ;
– Le remplacement des moteurs du laminoir à chaud ;
– La soudeuse laser au couplage ;
– L’unité de désulfuration de la cokerie.
Sur l’aspect social, la CFE-CGC tient à préciser que même sans cet accord, nous aurions trouvé, entre partenaires sociaux responsables, les moyens d’éviter tout licenciement sec. Nous l’avions d’ailleurs affirmé au commissaire au redressement productif de Lorraine avant que Monsieur L. MITTAL ne soit reçu à l’Elysée le mardi 27 novembre 2012.
Concernant la situation de la filière sidérurgie, rappelons que depuis un peu plus d’une année, la Chine exporte une partie importante de sa production d’acier en faisant du dumping. Les exportations totales de la Chine en 2015 ont atteint un pic de 120 Mt, soit 12% de la consommation totale d’acier dans le monde, entraînant une baisse du prix de l’acier, fragilisant ainsi la situation de la filière en Europe.
Le gouvernement français s’est fortement mobilisé en 2016 sur ce dossier, mais rien n’est encore gagné ! Des mesures de « réajustement » ont été prises (citons les taxes provisoires annoncées le 7 octobre, après 8 mois d’enquête, concernant plusieurs produits d’aciers plats carbone, taxe atteignant au maximum 74 %). Rappelons que les Etats-Unis, par exemple, sont beaucoup plus réactifs que l’Union européenne et savent imposer des taxes douanières dissuasives d’un niveau pouvant atteindre les 300 % !
La question de l’obtention du statut d’économie de marché de la Chine n’est pas encore réglée, la décision devrait être rendue en décembre prochain. La Chine ne respecte aujourd’hui qu’un seul critère sur les cinq d’une économie de marché. Donner dans ces conditions le statut d’économie de marché à la Chine n’est pas envisageable. La Fédération Européenne des Syndicats de l’Industrie organise d’ailleurs, avec le soutien du patronat européen de l’acier, une manifestation à Bruxelles le 9 novembre prochain. Le gouvernement français ne doit pas baisser l’effort et faire en sorte que la Chine n’obtienne pas ce statut !
Nous souhaitons aussi vous interpeller sur les conséquences pour la sidérurgie française et européenne des mesures qui pourraient être prises dans le cadre de la révision de la directive encadrant le système d’échange de quotas d’émissions de CO2, dite directive ETS. Le projet de texte en cours de discussion conduirait, pour notre secteur, à un déficit de quotas gratuits, qui couvrent les émissions directes, de 35 % sur la période 2021-2030, et de 50 % pour l’année 2030. C’est la compétitivité et l’avenir de la filière liquide d’acier française qui sont en jeu dans ce débat.
Le Comité Stratégique de Filière Industries Extractives et Première Transformation a adressé un courrier le 29 juillet dernier au Premier ministre (lettre co-signée par 4 syndicats dont la CFE-CGC). Nous attendions un arbitrage de Matignon, une position française claire sur cette directive ETS. Le Premier ministre a répondu en renvoyant la balle au deux ministères concernés (Bercy et Ecologie). La CFE-CGC regrette cette absence d’engagement, d’autant que les positions prises par le ministère de l’Environnement ne nous apparaissent pas de nature à défendre l’industrie française qui reste disposée à continuer à investir dans l’amélioration de sa performance environnementale pour peu que cela soit rendu possible par la fin du dumping environnemental et social pratiqué par ses principaux concurrents étrangers.