La CFDT critique l’attitude du patronat

Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat la CFDT

 

Dans un long entretien publié sur le site de Paris Match le 26 janvier 2016, Laurent Berger expose les doutes de la CFDT quant au plan 500 000 et fustige l’attitude peu constructive du patronat. 

Le plan d’urgence pour l’emploi de François Hollande est-il à la hauteur ? 

Nous sommes favorables aux mesures sur la formation des chômeurs, mais leur mise en œuvre déterminera leur pertinence. Nous sommes en désaccord sur le plafonnement des indemnités prud’homales. C’est une mesure sans effet sur l’emploi et injuste pour les salariés. Elle va aussi rendre plus complexe la vie des entreprises. Les questions de harcèlement et de discrimination n’étant pas concernées, elles vont se développer comme motifs de recours auprès d’autres juridictions. La prime pour les PME revient, elle, à arroser le sable. 

Cette prime ne déclenchera-t-elle pas d’embauches ? 

Elle est très chère, et je ne suis pas certain que, pour un chef d’entreprise, 2000 euros d’allègement de cotisations supplémentaires déterminent une embauche. Il est évident que les effets d’aubaine seront nombreux. Peut-être y aura-t-il quelques effets leviers, mais ce sera si diffus ! Cette prime doit être prise sur l’enveloppe allouée au pacte de responsabilité. Comme lors de la signature de ce pacte, se pose la question de la conditionnalité des aides versées aux entreprises. 

Selon vous, le patronat, qui pourrait encore recevoir une prime sans condition, joue-t-il le jeu ? 

Non, les organisations patronales ne jouent pas toutes le jeu. Certaines branches, comme la métallurgie, se sont engagées, mais seules 14 branches ont signé des accords qu’il faut encore mettre en œuvre. Dans l’agro-alimentaire, les engagements ne sont pas tenus. C’est à l’Etat de faire le bilan et d’en tirer les conséquences en instaurant davantage de conditionnalité pour le versement de la dernière tranche en 2017. 

Le Medef a remisé ses pin’s « un million d’emplois», est-ce un aveu d’échec ? 

Je constate que les marges des entreprises ont été restaurées, il faut donc aller beaucoup plus loin dans leur utilisation pour l’investissement, l’embauche et la formation des salariés. La logique du patronat, c’est « toujours moins de règles et de contraintes, toujours plus d’aides ». C’est intenable. Je ne mets pas tous les chefs d’entreprises dans cette catégorie, mais le Medef a eu un discours qui n’a pas été à la hauteur après le pacte de responsabilité. Au lieu de jouer un rôle moteur, il a choisi la surenchère, les plaintes et les revendications incessantes. 

Bercy calcule que le plan d’urgence pourrait faire baisser le nombre de chômeurs de 0,5% à condition que la croissance atteigne 1,5%. Est-ce réaliste ? 

Le positionnement de la CFDT part de la réalité du vécu des chômeurs. Les éléments statistiques, je m’en fiche. On crève d’une approche macroéconomique du chômage. Le chômage n’est pas qu’une courbe, mais une réalité sociale durement vécue par les personnes. 

C’est François Hollande qui a lui-même mis comme condition à sa réélection une inversion de cette courbe… 

Parler de courbe au lieu de parler des personnes, je pense toujours que c’est une mauvaise expression. Quant au reste, ce n’est pas mon problème. 

Emmanuel Macron vient de déclarer que les aménagements envisagés sur les heures supplémentaires signaient «de facto» la fin des 35 heures. Qu’en pensez-vous ? 

Emmanuel Macron dit ce qu’il veut. J’ai entendu le Premier ministre assurer qu’il n’était pas question de toucher à la durée légale du travail. Nous y sommes attachés, ainsi qu’à la négociation collective dans les entreprises. 

Que pensez-vous du rapport Badinter sur le Code du travail ? 

Il est utile car il rappelle les éléments fondamentaux du Code du travail, comme le respect et la dignité de l’être humain au travail. Il aurait été souhaitable qu’il intègre les travailleurs qui ne sont pas salariés, comme les indépendants. Il faut que la loi El Khomri soit une loi de progrès. 

Vous allez discuter de la convention Unedic entre partenaires sociaux. Le gouvernement et la Cour des comptes suggèrent de diminuer le montant de l’indemnisation des chômeurs. Y êtes-vous favorable ? 

Nous sommes contre. Encore une fois, c’est une approche économique de l’assurance-chômage, qui est pourtant un filet de sécurité pour des milliers de personnes. Laisser penser qu’il faudrait avoir une logique budgétaire (revenir à l’équilibre sans se soucier des conséquences sociales), ou punitive (les gens sont au chômage car ils ne veulent pas retravailler), est insupportable. S’il n’y avait pas eu d’assurance chômage depuis 2008, la situation sociale serait encore plus dégradée qu’aujourd’hui. La vraie économie pour l’assurance chômage, c’est quand les chômeurs auront retrouvé un emploi. 

Comment expliquez-vous le faible nombre d’accords signés sur le travail du dimanche, et le droit d’opposition exercé notamment par la CGT à la Fnac ? 

Il y a des accords (Fnac, Zara, dans la branche de la bijouterie, sur le territoire du Pays de Rennes…). Les syndicats, comme à la Fnac, qui font opposition, devront rendre compte aux salariés. Je n’ai aucun problème pour leur expliquer que l’engagement de la CFDT a permis d’obtenir de fortes majorations le dimanche, des aides aux transports, des embauches… Là où nous n’arrivons pas à signer d’accords, c’est aussi que les entreprises ne mettent pas suffisamment de contreparties pour les salariés. 

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