“Gilets jaunes” : les soutiens syndicaux toujours aussi timides

Alors qu’un peu partout en France, les “gilets jaunes” réfléchissent à la suite à donner à leur mouvement, plusieurs organisations syndicales ont fini par se montrer moins négatives à l’égard de cette mobilisation. Leur attitude demeure toutefois ambivalente : si les problèmes de fond soulevés à l’occasion des manifestations sont jugés légitimes par certains représentants syndicaux, ils n’en refusent pas moins, dans l’ensemble, de soutenir les gilets jaunes. 

Les routiers réservés

L’information a quelque peu fait parler d’elle : il y a deux jours, la fédération FO des transports – tenue par Patrice Clos, candidat à la succession de Pascal Pavageau – a exprimé sa “solidarité avec le mouvement citoyen “Gilets jaunes””. Plus encore, l’organisation syndicale a invité “tous ses militants, adhérents et sympathisants à participer et organiser toutes actions visant à revendiquer l’augmentation du pouvoir d’achat”. Un appel à rejoindre les gilets jaunes, en somme. FO transports précise même qu’elle “n’exclut pas de durcir le mouvement par un appel à la grève de l’ensemble des secteurs qu’elle représente”. Ceci signifie toutefois que son appel à venir prêter main forte aux gilets jaunes ne constitue en rien un appel à faire grève. Avec sa prise de position, Patrice Clos incarne ainsi l’aile dure de sa centrale, tout en se ménageant des marges de manoeuvre. 

Du côté des autres fédérations salariales du transport, les réactions sont bien plus timorées. Hier, la CFDT Transports a fait savoir qu’elle partageait les mots d’ordre de sa confédération. Autrement dit : bien qu’elle entende continuer “à défendre farouchement le pouvoir d’achat des salariés”, elle “n’appellera pas à rejoindre ce mouvement”. En outre, la CFDT Transports appelle le gouvernement à rétablir “un dialogue social normalisé”, c’est-à-dire à discuter avec les syndicats plutôt qu’avec les gilets jaunes. Emboîtant le pas de la CFDT, la CFTC Transports a, elle aussi, signifié qu’elle ne prendrait pas part au mouvement des gilets jaunes. L’organisation préfère laisser ses adhérents et sympathisants “se déterminer en tant que citoyens”. La CGT Transports, pour sa part, ne devrait pas non plus opter pour la même orientation que FO. 

La CGT veut reprendre la main

Il faut dire que depuis le début de la semaine, la CGT tente d’une part de démontrer qu’elle porte, sur le fond, les mêmes revendications que celles des gilets jaunes et d’autre part de reprendre la main sur l’organisation des opérations. Dans un communiqué publié mardi, la commission exécutive de la CGT s’est érigée en porte-parole de la “colère légitime” des “salariés actifs et retraités, des citoyens” – l’expression de “gilets jaunes” n’est pas citée – qui veulent “avoir les moyens de vivre dignement, pour plus de justice sociale”. Revendiquant un SMIC à 1800 euros, des hausses des retraites et minima sociaux, la prise en charge du transport par les employeurs, la TVA à 5,5 % sur les produits de première nécessité et la mise en oeuvre d’une “fiscalité juste”, la CGT appelle à manifester le 1er décembre prochain. 

Ceci étant dit, la centrale ouvrière ne peut s’empêcher de dire le mal qu’elle pense de la mobilisation des gilets jaunes. Elle réaffirme qu’elle la considère comme étant indissociablement liée à l’extrême-droite : “la CGT appelle les citoyens à ne pas laisser dévoyer leur colère par ceux distillant des idées xénophobes, racistes, homophobes”. N’ayant pointé le bout de son nez sur aucun barrage et se fondant donc des récits médiatiques d’altercations aussi isolées que malheureuses, l’organisation de Philippe Martinez renvoie une fois de plus au statut de fascistes, au pire, ou de naïfs manipulés, au mieux, les Français qui se lèvent depuis samedi dernier contre le sort qui leur est fait par le gouvernement et le capital mondialisé. Si, comme elle le dit, la CGT croit que nous vivons une “période de clair-obscur où peuvent surgir les monstres”, alors on saisit mal son intérêt à continuer à jeter l’anathème sur ceux qui osent dire : “Non !”. En agissant de la sorte, que fait-elle d’autre, en effet, que de prendre le risque de les rejeter irrémédiablement vers le camp d’en face ? 

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