Cette publication provient du site synidcal de la CFDT
Durant un séminaire de travail qui se déroule sur plusieurs jours, la distinction entre les temps relevant de la vie professionnelle et ceux relevant de la vie privée n’est pas forcément évidente. Ainsi, un salarié peut-il être licencié pour des faits survenus lors d’une soirée durant un séminaire professionnel ? Pour la Cour de cassation, un tel licenciement n’est pas nécessairement justifié. Cass.soc.18.10.17, n°16-15.030.
- Faits et procédure
Lors d’un séminaire professionnel organisé sur deux jours dans une station balnéaire, un chef de ventes et son équipe ont prolongé la soirée clôturant la première journée de travail, en se retrouvant sur la plage à 3 heures du matin. Malheureusement, à cette occasion, un accident est survenu, blessant l’un des salariés de l’équipe. Suite à cet incident, l’employeur a licencié le chef de ventes en lui reprochant des fautes dans son management.
En conséquence, ce dernier a saisi le Conseil de Prud’hommes pour contester son licenciement. En appel, les juges du fond ont débouté l’employeur qui s’est alors tourné vers la Cour de cassation en faisant valoir plusieurs arguments.
Pour lui, de tels comportements lors d’un séminaire de travail se rattachent nécessairement à la vie professionnelle des participants. En dehors des périodes travaillées et particulièrement le soir et la nuit, les salariés en séminaire ne se trouvaient pas nécessairement sur un temps ressortant de leur vie privée. Par ailleurs, pour l’employeur, le salarié ne peut pas à la fois demander le remboursement des frais occasionnés par une soirée présentée comme un élément de gestion de son équipe, et en outre soutenir que cette soirée relevait de sa vie privée ainsi que de celle de ses collègues.
En conséquence, la question posée à la Cour de cassation consiste à savoir si une sortie nocturne organisée au cours d’un séminaire professionnel peut justifier un licenciement.
- Une sortie organisée durant un séminaire professionnel relève de la vie privée
Tout d’abord, la Cour de cassation vient distinguer entre ce qui relève de la vie professionnelle et de la vie privée. Si la participation des salariés au séminaire professionnel se rattachait à la vie de l’entreprise et s’inscrivait dès lors dans le cadre de leurs activités professionnelles, cela ne signifiait pas pour autant que ceux-ci ne bénéficiaient pas de temps relevant de la vie privée. Bien au contraire, la sortie nocturne durant laquelle se sont déroulés les événements reprochés au salarié constituait une période non travaillée et relevait ainsi de sa vie privée.
- Seuls les faits entrainant un trouble caractérisé à l’entreprise peuvent justifier un licenciement
Un licenciement ne peut reposer sur des faits intervenus au cours de la vie privée(1), sauf à ce que ces faits : entrainent un trouble objectif caractérisé au sein de l’entreprise(2), ou constituent un manquement du salarié à une obligation découlant de son contrat de travail(3) ou se rattachent directement à la vie professionnelle du salarié(4).
Or, dans la présente affaire, la Cour précise que les événements qui se sont déroulés dans un temps relevant de la vie privée n’ont pas eu pour conséquences d’affecter « la qualité du travail réalisée le lendemain » par « l’absence ou la fatigue des salariés ». Le licenciement prononcé à l’égard du chef de ventes est par conséquent sans cause réelle et sérieuse.
Par cet arrêt, la Cour de cassation vient finalement confirmer sa jurisprudence sur les faits relevant de la vie privée qui peuvent être sanctionnés. Une solution logique et protectrice des salariés.
(1) Cass.soc. 03.05.11, n°09-67.464.(2) Cass.soc. 30.11.05, n°04-13.877.(3) Cas.soc. 03.05.11, n°09-67.464.(4) Cass.soc.06.02.02, n°99-45.418.