Dans son programme de travail 2018 qui vient de paraître, la Drees présente les actions en cours notamment permises par son accès permanent aux données de santé du SNDS (système national des données de santé). Rappelons que c’est la loi portée par Marisol Touraine et promulguée le 26 janvier 2016 qui a créé le nouveau SNDS qui contient notamment les données de soins de ville, de soins hospitaliers, ou encore les causes de décès.
C’est ensuite un décret du 26 décembre 2016 qui a dressé la liste des organismes chargés d’une mission de service public habilité en permanence à accéder au SNDS. La Drees en fait partie.
En quoi consiste l’accès permanent de la Drees au SNDS ?
Depuis l’entrée en fonction du SNDS dans le courant de l’année 2017, les équipes de la Drees ont un accès permanent aux données de santé du nouveau système. Le décret précité en introduction donne la liste des catégories d’informations auxquelles l’organisme a accès. Il en ressort que l’accès dont bénéficie la Drees est le plus étendu qui existe.
En effet, les équipes de l’organisme public ont accès à “l’ensemble des données individuelles du système national des données de santé avec croisement des identifiants potentiels, les échantillons généralistes avec croisement des identifiants potentiels, les données semi-agrégées, individualisées pour les professionnels ou établissements de santé et agrégées pour les bénéficiaires, et les données agrégées présentant un risque résiduel de réidentification“. On se rend bien compte que la Drees dispose de l’accès permanent le plus large possible aux données de santé du SNDS : on s’attend donc à ce qu’il soit utilisé au maximum. Cela ne semble pas si simple.
La connaissance des données de santé impactée par la prise en main difficile du SNDS
Le programme d’études et d’enquêtes 2018 publié par la Drees l’annonce d’emblée : l’année 2018 a surtout été axée sur l’amélioration des compétences du personnel pour une utilisation optimale du SNDS. Ainsi, les travaux menés cette année par le bureau de l’état de santé de la population (BESP) ont avant tout consisté à trouver un moyen d’apparier le plus simplement possible les données de santé du SNDS avec celles de l’échantillon démographique permanent (EDP) qui contient de nombreuses données sociodémographiques.
Le travail de la Drees a aussi consisté à créer une documentation liée aux indicateurs synthétiques calculés à partir du SNDS. Ces données “prémâchées” seront utilisées pour enrichir les enquêtes de la Drees. En revanche il semble que les autres acteurs que sont les exclus de l’accès permanent ne soient pas invités à bénéficier de ces indicateurs synthétiques. Le document publié par l’organisme publique signale que “la documentation s’adressera […] aussi bien aux utilisateurs internes qu’externes“. Mais qui sont ces utilisateurs externes ? Sont-ce uniquement des privilégiés qui ont un accès permanent ? Ou bien tous les bénéficiaires d’un accès, même ponctuel, au SNDS pourraient en profiter ? Aucune précision n’est donnée.
Finalement, en 2018, 9 études ont été menées par la Drees en utilisant l’accès permanent au SNDS. 5 d’entre elles ont utilisé uniquement des données de santé issues de cette base. Les 4 autres ont aussi utilisé d’autres données issues d’enquêtes.
Signalons toutefois que d’autres bureaux, tels que le bureau d’appui à l’évaluation et aux études régionales (BAEER) ont aussi consolidé leur maîtrise des données de santé issues du SNDS mais l’année 2018 ne semble pas encore avoir porté ses fruits. L’objectif du BAEER est d’utiliser le SNDS pour réaliser des études et aider au développement d’outils d’aide à la décision, notamment pour les Agences régionales de santé (ARS). L’année 2019 devrait être plus prolifique en la matière d’après le programme publié.
La légitimité de l’accès permanent aux données de santé en question
Certains organismes publics ou privés qui ne bénéficient pas de l’accès permanent aux données de santé peuvent s’interroger sur la légitimité d’une telle disposition. On voit que la Drees qui bénéficie de l’accès permanent le plus large possible continue de perfectionner sa maîtrise du SDNS plus d’un an après son entrée en fonction.
Par ailleurs, nous savons que parallèlement à cela, de nombreuses autorisations d’accès sélectif aux données de santé du SNDS ont été délivrées par la CNIL depuis septembre 2017. Parmi elles, la moitié proviennent d’acteurs privés. Nous voyons bien qu’il y a une réelle volonté en France de produire de la recherche dans le domaine de la santé sur des thèmes variés.
Le fait que des acteurs listés par décret bénéficient d’un accès permanent leur impose, d’une certaine manière, de se montrer à la hauteur de ce privilège en produisant des études utilisant au maximum la précision et la profondeur des données de santé qui leur sont rendues accessibles. Il faudrait donc que la Drees mette à profit ses opérations de formation de son personnel et de simplification de certains processus pour accroître sa production d’études en santé utilisant le SNDS dès l’année 2019.