Discrimination syndicale : la lutte salariale au défi de l’idéologie victimaire

C’est hier que le “défenseur des droits” a publié son “12ème baromètre de la perception des discriminations dans l’emploi”, consacré en l’occurrence “aux discriminations syndicales”.

 

Intéressant en cela qu’il donne des indications relatives à la manière dont les salariés et les syndiqués perçoivent les conséquences de leur activité syndicale sur leur vie professionnelle, le propos du défenseur des droits l’est plus encore en cela qu’il donne à voir la manière dont l’idéologie victimaire véhiculée par les pourfendeurs des “discriminations” mine la lutte salariale. 

Les constats de la “discrimination” syndicale

Repris ici ou là dans la presse, les chiffres contenus dans le baromètre du défenseur des droits permettent d’objectiver quelque peu la manière dont les salariés et les syndiqués perçoivent la discrimination syndicale au travail. Au niveau le plus général, on apprend que “près d’une personne active sur trois (29%) et une personne syndiquée sur deux (52%) considèrent que les discriminations syndicales se produisent souvent ou très souvent, ce qui fait de la discrimination syndicale au travail un phénomène perçu comme répandu”. Plus encore, l’activité syndicale est perçue comme “un risque” pour l’emploi et “l’évolution professionnelle” par 42% des actifs et par 66% des personnes syndiquées. 

Dans le détail, les actifs syndiqués estiment que c’est notamment en matière de promotion, d’évolution professionnelle et d’avancement que leur engagement syndical a le plus de conséquences néfastes (autour de 50 %, p. 24). Viennent ensuite la “dégradation du climat de travail” et des “conditions de travail” – citées par 35 % à 45 % des personnes interrogées – ainsi que l’absence ou le refus d’augmentation salariale – citées dans environ 30 % des cas. Les sanctions disciplinaires, mutations forcées et changements de poste sont évoqués par moins de 20 % des répondants, et le refus de formation professionnelle ou le refus de congés encore moins (environ 10 % des cas). Enfin, relevons que les licenciements, non-renouvellements de contrats de travail et refus d’embauche semblent très minoritaires. 

Une affaire d’hommes du petit peuple

Outre ces données relatives à la perception de la “discrimination” – nous ne cesserons de mettre ce terme entre guillemets tant il nous semble, sur le fond, tout à fait problématique, l’acte de choix étant inhérent à toute vie en société – syndicale par les actifs et les syndiqués, le baromètre du défenseur des droits donne quelques informations, bien trop sommaires, quant à la répartition de cette perception au sein de la population active. On y apprend d’abord que “les salariés syndiqués du secteur privé sont plus nombreux (50%) à déclarer avoir été discriminés en raison de leur activité que les agents du secteur public (40%)”. 

On y apprend surtout que “certaines catégories de personnes syndiquées rapportent plus de discriminations que les autres”. En particulier, les syndiqués issus des catégories sociales populaires en déclarent bien plus fréquemment – à 57 % – que les syndiqués issus de catégories sociales supérieures – 43 %. En outre, les hommes sont surreprésentés parmi les personnes syndiquées rapportant de telles “discriminations” : 54 % des hommes syndiqués en font état, contre 38 % des femmes syndiquées. 

Ainsi donc, si l’on en croit le baromètre du défenseur des droits, la “discrimination syndicale” apparaît être une affaire qui concerne avant tout les classes populaires et, plus précisément encore, les hommes des classes populaires. 

La gêne du défenseur des droits

Or, à l’évidence, ce constat perturbe le défenseur des droits lui-même. A plusieurs reprises dans son baromètre, il semble en effet tenir à relativiser ses propres données, afin, toujours, de bien montrer qu’en réalité les “discriminations” au travail concernent bien plutôt les personnes d’origine étrangère et les femmes que ces fameux hommes du petit peuple, sans doute supposés blancs par les rédacteurs de l’étude. 

Ainsi, alors même que cette dernière concerne le fait syndical et ses conséquences sur la vie professionnelle, le premier graphique fourni concerne le sujet, bien plus général, des “discriminations au travail”, par “critère” et par “sexe” (p. 11). Il montre que la “discrimination” syndicale est la moins souvent citée, loin derrière les têtes d’affiche des motifs de “discrimination” : “couleur” ou “origine”, “religion”, “quartier d’habitation”, “sexe”, “âge”, “état de santé” ou encore “orientation sexuelle”. S’apprêtant à quitter, le temps d’une étude, sa zone de confort des traditionnelles complaintes victimaires, le défenseur des droits tient ainsi tout de même à baliser le sentier. 

Au cas où certains en viendraient à se perdre ensuite en chemin, les rédacteurs de l’étude se livrent en cours de route à une tentative d’explication pour le moins curieuse de la raison pour laquelle “être une femme ou une personne perçue comme non-blanche, catégories de population fortement discriminées,diminue la probabilité de déclarer une expérience de discrimination syndicale” (p. 22-23). Défenseurs scrupuleux des opprimés, à la condition qu’ils ne soient pas trop des hommes blancs, les rédacteurs de l’étude formulent ici trois hypothèses explicatives, à la lecture desquelles il apparaît que la première, selon laquelle “les hommes perçus comme blancs” seraient effectivement les plus susceptibles d’être syndicalement discriminés, se trouve tout à fait minorée. Ouf ! L’honneur de l’idéologie victimaire est sauf ! 

Le fardeau de l’homme blanc

Au total, la lecture du baromètre du défenseur des droits relatif à la “discrimination” syndicale donne lieu à des sentiments pour le moins partagés. D’un côté, elle permet d’objectiver quelque peu un phénomène social qui n’est pas sans poser problème à l’heure de la décentralisation accrue des relations sociales. 

De l’autre, elle démontre comment les éternels pourfendeurs des “discriminations”, partisans de l’idéologie victimaire qui tend à faire de tout ce qui n’est pas un homme blanc une victime de l’oppression dudit homme blanc – beaucoup d’entre ces individus étant eux-mêmes des hommes blancs… – tentent de miner de l’intérieur le combat syndical. D’une part en divisant les troupes selon des critères qui leur bien souvent étrangers. D’autre part, plus fondamentalement, en dénigrant insidieusement le fameux homme blanc issu du petit peuple, maillon pourtant fondamental de l’action syndicale. 

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