Des économies ciblées dans les politiques sociales : la feuille de route des Hauts Conseils

Dans le rapport publié en juin 2025, les trois Hauts Conseils proposent des économies durables fondées non pas sur des réductions brutales de prestations, mais sur une réorganisation profonde des politiques sociales. Nous avons déjà analysé dans nos colonnes les grandes lignes de ce travail commun. Nous revenons ici sur trois volets du rapport, centrés sur la santé de l’enfant, les politiques familiales et le soutien à l’autonomie.

Le rapport présente les pistes les plus structurantes dans ces trois volets, en détaillant pour chacun les principales mesures proposées ainsi que les logiques de maîtrise des dépenses qui les sous-tendent.

Prescriptions infantiles et prévention : un gisement d’économies sous-exploité

Dans le champ de l’enfance, le Conseil de l’enfance et de l’adolescence du HCFEA insiste sur un double enjeu : améliorer la prévention et encadrer les soins jugés excessifs. Le rapport cible particulièrement la consommation de médicaments psychotropes chez les enfants et adolescents, qui ne cesse de progresser sans base scientifique toujours solide.

Les Hauts Conseils recommandent une surveillance renforcée des prescriptions, notamment via le développement d’outils numériques de repérage des situations à risque. En parallèle, ils plaident pour un déploiement massif des actions de prévention ciblées, en milieu scolaire et auprès des familles, notamment sur les troubles du comportement, l’usage des écrans, et les facteurs de surmédicalisation.

Cette approche vise un double gain : améliorer la pertinence des soins tout en réduisant des dépenses évitables à moyen terme.

Politiques familiales : des économies rendues possibles par une meilleure redistribution

Dans leur lecture de la branche famille, les Hauts Conseils estiment qu’un redéploiement partiel des prestations permettrait de générer des économies sans remettre en cause la fonction redistributive du système. Ils proposent d’abord de réexaminer la majoration de pension de retraite de 10 % accordée aux parents de trois enfants et plus, jugée peu équitable car concentrée sur les ménages les plus aisés.

Ils suggèrent également de revoir l’architecture des prestations familiales d’entretien, en ciblant davantage les familles modestes et en limitant les effets d’universalité peu justifiés. Enfin, ils appellent à rehausser le plafond de ressources pris en compte dans le calcul des participations familiales aux modes de garde, notamment dans le barème PSU, afin d’accroître la contribution des foyers les mieux dotés.

Accompagnement du grand âge : les nouvelles priorités budgétaires du grand âge

Le Conseil de l’âge du HCFEA, en charge du champ du grand âge, alerte sur la soutenabilité financière de la politique d’autonomie à moyen terme. Sans réforme, la dépense risque de dériver sous l’effet du vieillissement accéléré. Pour l’éviter, les Hauts Conseils proposent une transformation en profondeur du modèle d’accompagnement.

Ils insistent d’abord sur l’importance de retarder l’entrée dans la dépendance, en intervenant dès les premières fragilités autour de 60 ans. Le repérage précoce, la prévention des chutes et le maintien de l’activité physique sont présentés comme des leviers efficaces, à la fois sur le plan humain et financier. Dans le même temps, les auteurs du rapport appellent à revoir les outils d’évaluation des besoins, souvent jugés trop rigides ou inadaptés à la diversité des situations. Un meilleur ajustement des plans d’aide permettrait de réduire les effets de surprotection ou de sous-compensation, et donc d’optimiser les dépenses engagées.

La question de l’aide à domicile fait aussi l’objet d’un positionnement clair. Les Hauts Conseils encouragent une réorganisation autour de solutions mutualisées, comme les habitats regroupés ou les plateformes de services, plus efficaces que le maintien à domicile isolé. Enfin, ils estiment nécessaire de redéfinir le rôle des établissements, en recentrant les Ehpad sur l’accueil des personnes en situation de dépendance lourde. Ce recentrage impliquerait un ajustement du financement, afin de concentrer les moyens sur les fonctions médicales et d’hébergement essentielles.

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