Cet article provient du site du syndicat de salariés CFDT
Lorsqu’un syndicat a présenté une liste sous une étiquette syndicale, puis se désaffilie après avoir nommé un représentant syndical au comité d’entreprise, la confédération ou l’une de ses fédérations peut-elle désigner un nouveau représentant ? Oui, répond la Cour de cassation, donnant raison à la fédération CFDT des services dans une affaire l’opposant au SCID : cette désignation met fin au mandat du salarié précédemment désigné par le syndicat désaffilié. Cass.soc., 6.3.19, n°18-15238.
- Faits, procédure, prétentions
Le syndicat commerce interdépartemental Ile-de-France (SCID) a présenté une liste CFDT aux élections des membres du comité d’établissement « Direction exécutive hypermarchés France ». Il atteint les 10% au premier tour, nécessaires pour être reconnu représentatif dans l’établissement.
Le SCID a alors désigné un représentant syndical CFDT à ce comité en janvier 2016. Puis il a été désaffilié de la CFDT et la fédération des services CFDT a désigné un autre salarié en qualité de représentant syndical au comité d’établissement.
Le syndicat a contesté cette nouvelle désignation devant le tribunal d’instance. Ce tribunal lui a donné raison et a annulé la désignation effectuée par la fédération. Selon les juges du fond, aucun élément ne permettait de déduire de cette désignation la volonté de mettre fin au mandat du militant précédemment désigné par le syndicat. PAr ailleurs, aucun accord ne permettait de désigner un représentant surnuméraire par rapport aux prévisions légales.
La fédération a alors décidé de former un pourvoi en cassation.
- L’affiliation confédérale constitue un élément essentiel du vote des électeurs
Pour répondre au pourvoi, une première question se posait à la Cour de cassation. En cas de désaffiliation d’un syndicat, qui hérite du vote des électeurs ? Le syndicat ou la confédération, voire ses fédérations ?
Dans son attendu de principe, la Haute juridiction rappelle à ce propos sa jurisprudence (1) aux termes de laquelle : « l’affiliation confédérale sous laquelle un syndicat a présenté des candidats au premier tour des élections des membres titulaires des comités d’entreprise ou d’établissement constitue un élément essentiel du vote des électeurs ».
Ce dont il résulte, selon la Cour, qu’en cas de désaffiliation du syndicat, le droit de désigner un représentant syndical au comité revient à la confédération ou à l’une de ses fédérations.
En l’espèce ce droit était consacré à l’article L.2324-2 du Code du travail, alors applicable. Il figure désormais à l’article L.2314-2 du Code du travail (pour les entreprises d’au moins 300 salariés) et à l’article L.2143-22 du Code du travail (entreprises de moins de 300 salariés dans lesquelles le délégué syndical en fait office). Le droit de désigner ces représentants est toujours reconnu aux seules organisations syndicales représentatives dans l’entreprise.
- La désignation du nouveau représentant met fin au mandat de celui précédemment désigné par le syndicat
Cependant, avant d’en désigner un nouveau, la fédération n’avait pas pris la peine de révoquer le représentant désigné par le syndicat désaffilié. C’est pourquoi le tribunal d’instance avait considéré la nouvelle désignation comme une désignation CFDT de trop, en d’autres mots, surnuméraire.
La Haute juridiction n’est pas de cet avis. Pour la Cour de cassation en effet, la désignation par la fédération d’un autre représentant syndical CFDT au comité d’établissement « met fin au mandat du salarié désigné par ce syndicat avant sa désaffiliation ».
Autrement dit, non seulement le droit de désigner appartient à la confédération, ou à l’une de ses fédérations, mais encore dispose-t-elle du pouvoir par cette seule désignation de mettre fin au mandat du représentant désigné par le syndicat qui, au final, n’est plus légitime pour ce faire.
Une victoire attendue mais néanmoins fort appréciable dans l’épopée judiciaire qui nous oppose à ce syndicat !
(1) Cass.soc.18.05.11, droit social 2011, note F. Petit.