Ce communiqué provient du site du syndicat de salariés FO.
Sauf dispositions légales particulières pour certains accords, le délai de prescription des actions en nullité, de tout ou partie d’un accord collectif, est passé de 5 ans…à 2 mois depuis les ordonnances « Macron » de 2017. Ce délai extrêmement bref court à compter, soit de la notification de l’accord d’entreprise aux organisations syndicales disposant d’une section syndicale, soit de la date de publication de l’accord dans la base de données nationale créée par la loi El Khomri pour tous les autres cas (art. L 2262-14 du code du travail).
Aux termes de l’article L 2231-5 du code du travail, la partie la plus diligente des organisations signataires d’une convention ou d’un accord en notifie le texte à l’ensemble des organisations représentatives à l’issue de la procédure de signature.
S’agissant d’un accord de branche, le délai de forclusion pour agir en nullité court à compter de la date à laquelle l’accord de branche a été rendu public par sa publication au bulletin officiel des conventions collectives qui, en conférant date certaine, répond à l’objectif de sécurité juridique. Le versement dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable, n’est qu’une mesure complémentaire répondant à l’objectif d’accessibilité de la norme de droit (Cass. soc., 21-9-22, n°20-23.500).
L’action en nullité peut être exercée par les organisations syndicales, qu’elles aient participé ou non à la négociation de l’accord. Les syndicats ayant participé à une négociation sont recevables à agir en nullité contre un accord collectif, dès l’instant qu’ils invoquent une nullité absolue, même s’ils ne l’ont pas signé (Cass. soc, 9-7-96, n°95-13010).
Lorsque le juge est saisi d’une action en nullité de l’accord dans le délai de deux mois, celui-ci doit rendre sa décision dans un délai de 6 mois (ce délai n’est assorti d’aucune sanction) : art. L 1226-14-1 du code du travail.
Un salarié peut toujours, par voie d’exception, invoquer le caractère illicite d’une clause d’un accord collectif qui lui est applicable. Lorsque l’illégalité de tout ou partie d’une convention ou d’un accord collectif est invoquée par voie d’exception, la durée de prescription est déterminée par la nature de la créance objet de la demande. Cet encadrement des délais d’action en nullité des accords collectifs est de nature à favoriser, à l’avenir, les recours individuels en série devant les conseils de prud’hommes, au détriment du contentieux collectif mené par les syndicats devant le tribunal judiciaire (ex TGI).
Toutefois, un syndicat est recevable, à l’occasion d’un litige, à soulever une exception d’illégalité d’une convention ou d’un accord, alors même qu’il n’a formé aucun recours en annulation de l’accord dans le délai de deux mois, sans aucune condition de délai (plus précisément le délai de prescription correspond à la demande principale), dès lors que l’une de ses prérogatives syndicales (en l’espèce la désignation d’un DS) est mise en cause par l’accord collectif (Cass. soc., 2-3-22, n°20-18442).
Le CSE peut aussi invoquer une exception d’illégalité, qui est toutefois limitée à la situation où un accord collectif met en cause l’un de ses droits propres (Cass. soc., 2-3-22, n°20-16002 et 20-20077). Dans l’arrêt n°20-16002, il s’agissait de la désignation d’un expert et de la problématique du niveau d’une consultation récurrente entre un CSE central et un CSE d’établissement.
Dans le cadre d’une exception d’illégalité, il se pourrait que la Cour de cassation fasse application de la jurisprudence du Conseil d’État selon laquelle seuls des moyens de fond peuvent être invoqués, à l’exclusion de vices de forme et de procédure (CE, 18-5-18, n°414583).
Ce délai de 2 mois pour agir en nullité d’un accord collectif ne s’applique pas aux accords dont la contestation est déjà soumise à des délais spécifiques :
accords de méthode conclus dans le cadre de licenciements économiques : 3 mois à compter du dépôt (art. L 1233-24) ;
accords relatifs aux PSE : 2 mois à compter de la décision administrative (art. L 1235-7-1) ;
accords sur les ruptures conventionnelles collectives : 2 mois à compter de la décision administrative (art. L 1237-19-8).
L’article L 2262-15 du code du travail envisage la possibilité pour le juge de moduler les effets dans le temps de ses décisions d’annulation. Alors qu’une annulation a normalement un effet rétroactif, le code du travail admet dorénavant que le juge puisse décider, notamment, que l’annulation de l’accord ne produira des effets que pour l’avenir lorsqu’une annulation rétroactive aurait des conséquences manifestement excessives.