En ces temps de campagne électorale présidentielle, l’équipe sortante fait feu de tout bois afin de vanter les mérites de son action : la présentation gouvernementale des comptes 2021 définitifs de la Sécurité sociale fournit un bon exemple de cette mobilisation générale au service de la candidature d’Emmanuel Macron.
Alors que la situation financière de la Sécurité sociale est très dégradée, une lecture un peu distraite du communiqué gouvernemental relatif à cette situation en viendrait presque à donner le sentiment d’une bonne tenue des comptes sociaux de la nation.
Une “amélioration” qui tombe à pic
Dans le communiqué de presse publié hier par le ministère des Solidarités et de la Santé d’une part et par celui de l’Economie et des Finances d’autre part, au sujet des comptes définitifs de la Sécurité sociale pour l’exercice 2021, il est beaucoup question d’optimisme. Intitulé “Un déficit des comptes de la sécurité sociale en 2021 en nette amélioration par rapport à 2020, et moins creusé que prévu”, ce communiqué n’hésite pas à insister lourdement sur le thème de l’amélioration, cité six fois en six courts paragraphes. Cette “amélioration” des comptes sociaux est notamment mise en lien avec le retour d’une “croissance économique plus élevée qu’attendu”. Si la Sécurité sociale est donc bel et bien en déficit, la situation serait non seulement sous contrôle mais, mieux encore, en voie de normalisation.
A la lecture de ces propos gouvernementaux fort rassurants, le lecteur un peu distrait pourrait en conclure – c’est, en tout cas, ce qui est probablement attendu de lui – que l’équipe dirigeante sortante mène décidément bien sa barque dans la période de gros temps que nous connaissons depuis maintenant plus de deux ans. Partant de là, dans la mesure où les crises semblent se succéder les unes aux autres, il est également censé en conclure qu’il s’agit raisonnablement de ne pas changer de capitaine. A quelques semaines du premier tour de l’élection présidentielle, “l’amélioration” des comptes sociaux tombe à pic !
La Sécurité sociale en déficit de 24,4 milliards d’euros
Hélas pour notre lecteur, les chiffres sont têtus. En 2021, la Sécurité sociale a été déficitaire, et pas qu’un peu : à hauteur de 24,4 milliards d’euros, plus précisément. S’il est vrai, pour paraphraser l’humoriste, que la situation n’est pas plus mal que si elle était pire – puisque ce solde négatif est moins important qu’initialement escompté, de l’ordre de 9 milliards d’euros – il n’en demeure pas moins que ce déficit se hisse sur le podium des déficits sociaux les plus importants connus par la France. N’en déplaise à l’exécutif, la Sécurité sociale se trouve dans une situation financière très dégradée. Surtout, la trajectoire de son retour à l’équilibre budgétaire, à moyen voire à long termes, continue d’apparaître très incertaine.
Dans le détail, c’est surtout l’assurance maladie qui contribue à ce déficit considérable. En effet, alors que les branches accidents du travail et famille sont en excédent budgétaire, “à hauteur respectivement de 1,2 milliards d’euros et 2,9 milliards d’euros”, “tout comme la nouvelle branche autonomie pour 0,3 milliard d’euros”, et que la branche vieillesse et le FSV connaissent un déficit limité à 2,6 milliards d’euros, la branche maladie, pour sa part, connaît un déficit abyssal, de 26,1 milliards d’euros. Dans une telle configuration, les mauvais esprits se demanderont, au passage, ce à quoi pourrait bien ressembler, d’un point de vue budgétaire, la fameuse “Grande Sécu” voulue par Olivier Véran.