La Cour des Comptes a publié hier son traditionnel rapport annuel sur les comptes de la Sécurité sociale. Si les magistrats de la rue Cambon relèvent l’amélioration de l’équilibre comptable de la Sécurité sociale, ils ne se perdent pas en chemin, déplorant le caractère fragile du processus et appelant à des économies importantes dans le domaine de l’assurance maladie.
Une fragile réduction du déficit
A la Cour des Comptes, on n’a pas la satisfaction facile. C’est en effet sur un ton très neutre qu’elle annonce l’amélioration globale de l’équilibre financier de la Sécurité sociale. “En 2017, le déficit de la sécurité sociale a continué à se réduire : il a ainsi atteint 4,8 Md€, contre 7 Md€ en 2016. Sous réserve de la réalisation de la hausse attendue des recettes, la sécurité sociale serait presque à l’équilibre en 2018”. Comparés aux “29,6 Md€” de déficit observés en 2010, ce chiffre de 4,8 milliards d’euros apparaîtrait pourtant presque comme un quasi-équilibre comptable. Mais la Cour ne se laisse pas si facilement tromper : le processus de réduction du déficit est encore fragile. Les dépenses de la Sécurité sociale étant en effet en hausse de 2 % en 2017 par rapport à 2016, elle ne doit ce résultat qu’à la “conjoncture économique”, qui a permis une hausse de 3,4 % des recettes.
La médecine de ville pointée du doigt
Dans le détail, la Cour des Comptes insiste notamment sur le fait que le déficit de l’assurance maladie “s’est détérioré”, à 4,9 milliards d’euros contre 4,8 milliards d’euros. En cause d’après elle ? La médecine de ville, dont “la hausse tendancielle des dépenses [demeure] très dynamique” – + 2,2 %, un chiffre plus élevé que celui prévu par le PLFSS. Ne craignant pas de mettre le feu aux poudres, la rue Cambon préconise, dans ce contexte, une mesure qui ne manquera pas d’irriter au plus haut point l’ensemble du secteur : “instaurer une réserve prudentielle infra-annuelle permettant de maîtriserles dépassements et mettant en jeu plusieurs mécanismes possibles en fonction de la nature des dépenses de ville concernées (accords prix/volume, mise en réserve annuelle d’une partie des augmentations conventionnelles ou des dotations forfaitaires” serait, d’après elle, opportun.
L’hôpital prié d’en faire plus
A première vue, la Cour est plus clémente avec l’hôpital. Conséquence d’une “hausse du nombre de séjours plus faible que les années précédentes (+ 1,8 % contre + 5 % en 2016 et + 2,4 % en moyenne annuelle de 2013 à 2015 pour le secteur public”, les “dépenses relatives aux établissements de santé (+1,8 % par rapport à 2016) ont été moindres que prévu”. Afin de conforter cette évolution, les magistrats de la Cour estiment que le “développement du mode ambulatoire” doit être soutenu – notamment pour les activités dites “de médecine” des hôpitaux. Par ailleurs, les activités hospitalières de chirurgie ayant, elles, largement entamé le “virage ambulatoire”, ils proposent de mettre fin au “sur-financement des séjours” institué par l’Etat afin d’encourager les hôpitaux à développer la chirurgie ambulatoire. Une proposition qui, n’en doutons pas, plaira largement dans les services hospitaliers de chirurgie…
A la bonne santé des fumeurs et des buveurs !
Enfin, à la lecture du rapport de la Cour des Comptes, un dernier point retiendra l’attention de ceux qui se demandent toujours, non sans craintes, quelles pourront bien être les prochaines hausses de taxes imaginées par les dirigeants de l’Etat. Insistant sur le “coût humain et financier important et croissant” de “la lutte contre les maladies cardio-neurovasculaires” – leur coût financier s’élève à “16,1 Md€ en 2016” – les magistrats proposent notamment de “mieux prévenir l’apparition et l’aggravation” de ces pathologies. Pour ce faire, on n’a encore rien trouvé de plus efficace que… d’augmenter les taxes ! Sur le tabac, les boissons alcoolisées et les boissons sucrées, en l’occurrence. Si les autres recommandations de la Cour, souvent politiquement sensibles, ne seront sans doute pas toutes suivies par le gouvernement, gageons que cette invitation à relever la fiscalité convaincra plus l’éxecutif.