C’est hier que s’est tenue la première réunion de concertation entre le gouvernement et les partenaires sociaux au sujet de l’avenir de l’assurance chômage.
A la sortie de la réunion, les dirigeants des organisations salariales sont apparus bien plus irrités que leurs homologues patronaux. Ils semblent avoir redécouvert ce que l’exécutif exige depuis plusieurs mois : d’importantes économies sur l’assurance chômage.
Le patronat fait profil bas
Si l’on en croit les déclarations recueillies par l’AFP à l’issue des discussions avec la ministre du Travail Muriel Pénicaud, le patronat faisait profil bas hier soir. Ainsi, Geoffroy Roux de Bézieux, le président du MEDEF se voulait ouvert à la cause des salariés : “Nous avons préféré faire des propositions pour accompagner les salariés plutôt que de punir les entreprises”. Il faut dire que le patronat a été forcé de constater que le gouvernement n’a pas abandonné son projet de bonus-malus sur le recours aux contrats courts. “Tout ce qui était sur la table est toujours sur la table” a en effet reconnu Alain Griset, le président de l’U2P.
En somme : bien conscient qu’il n’est pas nécessairement en position de force dans le cadre de la concertation sur l’assurance chômage, le patronat espère s’en tirer à bon compte en évitant les postures trop offensives. Ceci lui permettra-t-il d’éviter le bonus-malus ? Rien n’est moins sûr.
Les syndicats en colère
Du côté des dirigeants des principales centrales salariales, le ton était très différent. D’abord, Philippez Martinez, de la CGT, a dénoncé l’inspiration patronale des projets gouvernementaux. “Le gouvernement s’apprête à mettre en œuvre toutes les mauvaises idées du patronat” a-t-il dénoncé. Dans la même veine, François Hommeril, le président de la CFE-CGC, s’est emporté contre la proposition de l’exécutif de s’attaquer aux indemnisations chômage des hauts cadres. Il a jugé cette idée “populiste”, rappelant que les cotisations chômage des cadres s’élèvent à “quinze milliards d’euros”, tandis que les allocations qui sont versées à cette catégorie de salariés représentent “cinq milliards d’euros”.
Même Laurent Berger, le traditionnellement (très) modéré secrétaire général de la CFDT, n’a pas pu s’empêcher de déplorer les propos de Mme Pénicaud concernant certains chômeurs, qui toucheraient plus, d’après elle, en indemnités chômage que s’ils travaillaient – type de chômeurs dont elle a d’ailleurs estimé la proportion à 20 %. Laurent Berger s’est inscrit en faux contre cette analyse, qu’il a qualifiée de “polémique” et “caricaturale” : “Alors que la plupart des chômeurs ne choisissent pas quand ils travaillent, vous généralisez certaines situations et cela vous permet de dire que les chômeurs profitent du système”.
Atterrissage syndical sur l’assurance chômage
Au total, ces déclarations croisées ne manquent pas d’étonner. Alors que, lors de la négociation paritaire sur l’assurance chômage, les syndicats de salariés se sont montrés – à tort ou à raison, là n’est pas le problème – tout à fait inflexibles au sujet du bonus-malus, contribuant, de fait, à la reprise en main du dossier par l’Etat, ils se montrent aujourd’hui très irrités par les propositions défendues par les pouvoirs publics.
La réaction des dirigeants syndicaux est d’autant plus curieuse qu’ils connaissent lesdites propositions depuis plusieurs mois déjà, puisque le gouvernement les avait consignées dans la lettre de cadrage de la négociation chômage.
A trop s’être sentis en position de force vis-à-vis du patronat sur la question du bonus-malus lors de la négociation paritaire, les dirigeants des organisations salariales auraient-ils fini par oublier qu’ils n’avaient pourtant pas plus intérêt que le patronat à une étatisation de l’assurance chômage ? Ceci est une hypothèse tout à fait sérieuse.