Annonces sur le déconfinement : les réactions syndicales et patronales

Dans son discours prononcé hier à l’Assemblée Nationale, le Premier ministre Edouard Philippe a précisé les conditions dans lesquelles sera opéré le déconfinement du pays le 11 mai prochain. La reprise progressive du travail comptant parmi les aspects les plus importants de ce processus, les dirigeants des organisations patronales et salariales françaises ont suivi attentivement ce discours.

 

Tripalio vous propose de prendre connaissance des réactions syndicales et patronales à ce discours. 

Pour le patronat, un déconfinement entre soulagement et doutes

Pour le Medef, les annonces du Premier ministre sur le déconfinement constituent une bonne nouvelle. En effet, l’organisation “salue le retour progressif à une activité économique normale à partir du 11 mai”. La principale confédération patronale convient de la nécessité d’organiser la reprise de l’activité en recourant au dialogue social : “le dialogue social continuera à jouer tout son rôle pour préciser les conditions d’une reprise alliant sécurité et activité”. En particulier, le Medef assure qu’il “sera au rendez-vous pour finaliser les guides de bonnes pratiques et compléter le plan de déconfinement”. Ces points positifs étant formulés, l’organisation ne s’en inquiète pas moins de l’état et des perspectives du tissu économique, soulignant “le risque d’une économie atone qui fait peser une menace sur la reprise et sur l’emploi”. Partant de là, le Medef demande le maintien du dispositif de l’activité partielle au-delà du 1er juin. 

Comme le Medef, l’U2P, l’organisation de l’artisanat et des professions libérales, se félicite de la perspective du déconfinement : “la confirmation de l’ouverture des commerces et des marchés (sauf exception) à compter du 11 mai va dans le bon sens”. En vue de la reprise, l’U2P souligne elle aussi l’importance du dialogue social : “l’U2P travaille d’arrache-pied avec les partenaires sociaux des branches professionnelles pour établir les guides métiers qui proposeront aux entreprises les bonnes pratiques à mettre en œuvre”. Cela étant, la confédération patronale pose la question de la capacité des employeurs à assumer le surcoût des mesures sanitaires annoncées par l’exécutif. Elle demande en outre l’annulation des charges des entreprises ayant été fermées administrativement. Enfin, elle insiste sur la nécessité d’assurer “dans les meilleurs délais possibles” la reprise d’activité des hôtels-cafés-restaurants. 

Du côté de la confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), ce sont plutôt les craintes qui l’emportent sur le soulagement. La CPME juge en effet ne pas disposer de la “visibilité” qu’elle escomptait concernant les modalités du déconfinement. De la même manière que l’U2P, la CPME s’inquiète du “coût financier direct et indirect” des mesures sanitaires pour les entreprises, jugeant qu’une annulation des “charges fiscales et sociales” permettrait peut-être de faire face à ce surcoût. Par ailleurs, comme le Medef, la CPME demande à ce que le dispositif de l’activité partielle soit maintenu au-delà du 1er juin. Enfin, la CPME attire l’attention commune sur les risques juridiques encourus par les employeurs : tout en affirmant que les mesures nécessaires pour garantir la santé et la sécurité des salariés seront prises, elle juge toutefois que “l’obligation de résultat devra être explicitement écartée”. 

Pour les syndicats, un déconfinement sujet à caution

Du côté des confédérations salariales, le ton se veut globalement plus critique vis-à-vis des mesures annoncées par le Premier ministre concernant le déconfinement du pays. Certes, la CFTC et l’Unsa, connues pour leur modération, saluent chacune dans leur propre communiqué, un certain nombre d’éléments du discours ministériel : acceptation du “triptyque […] protéger, tester, isoler” et promotion du “dialogue social” notamment. Pourtant, ces deux organisations soulignent qu’au-delà de ces “grands principes” de “cadrage général”, la mise en œuvre concrète du plan n’est pas précisée. Ainsi, l’UNSA déplore les “annonces sur l’école”, qui suscitent d’après elle “une incompréhension très forte, tant de la part des parents d’élèves que des professionnels”. Pour sa part, la CFTC s’interroge sur les modalités du déconfinement départementalisé ainsi sur l’adaptation du fonctionnement des transports publics. 

Du côté des deux autres organisations salariales : la CGT et FO, qui se sont exprimées, à cette heure, sur le discours d’Edouard Philippe, les analyses sont plus virulentes encore. Jugeant que “la santé doit primer avant tout”, la CGT estime d’une part qu’il y a bien “trop de questions sans réponses” pour pouvoir opérer une sortie de confinement dans des conditions acceptables. L’organisation dénonce aussi bien la reprise des activités scolaires – dont elle considère qu’elle est uniquement un moyen de remettre les Français au travail – que les annonces de l’exécutif pour le redémarrage des transports publics ou, enfin, l’invocation des “guides de bonnes pratiques” pour garantir la sécurité et la santé des salariés. “La reprise économique reste la priorité du gouvernement, ce qui laisse beaucoup de libertés aux entreprises, sans réelles garanties sanitaires ou de droits pour ceux qui travaillent” affirme la centrale de Montreuil. 

Enfin, Force Ouvrière pointe du doigt les “nombreuses incertitudes et questions” que posent selon elle les annonces du Premier ministre sur le déconfinement. Outre les éléments cités par les autres organisations salariales, FO s’interroge sur l’effectivité de la mise à disposition de matériel de protection pour les salariés ainsi que sur les “risques de stigmatisation et de discrimination” liés à la politique de test de la population. En outre, FO appelle au prolongement du dispositif du chômage partiel et à l’annulation de la réforme de l’assurance chômage. Enfin, ne manquant pas l’occasion de souligner l’intérêt du paritarisme, l’Avenue du Maine appelle à la tenue d’une négociation nationale et interprofessionnelle : l’une sur le télétravail, “intégrant le droit à la déconnexion”, et rappelle qu’elle a défendu l’ouverture de la négociation, “d’actualité”, sur la santé au travail. 

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