Activité partielle de longue durée : un nouveau mécanisme en perspective

Cette publication provient du site du syndicat de salariés CFDT.

Les parlementaires se sont mis d’accord en commission mixte paritaire sur la création d’un nouveau dispositif de recours à l’activité partielle de longue durée. Ce nouveau cas de recours à l’activité partielle comporte la particularité d’être conditionné à la signature d’un accord, quel que soit son niveau, et de comporter des engagements en contrepartie de la mise en activité partielle, notamment en termes de « maintien de l’emploi ». Si la loi en prévoit l’ossature générale, un certain nombre de points doivent être précisés dans un décret à venir.  

Loi prévoyant diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d’autres mesures urgentes ainsi qu’au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne, article 1er, vicies (le 10.06 au Sénat). 

  • L’activité réduite pour le maintien de l’emploi (ARME)

Le Gouvernement a souhaité s’inspirer de propositions issues de la Métallurgie afin de créer un dispositif de recours à l’activité partielle favorisant le maintien de l’emploi, déployé sur une durée plus longue que celle que supposent les cas existants. Lors des débats au Parlement, le texte, qui se présentait à l’origine comme une habilitation à prendre des mesures par ordonnance, s’est finalement transformé en un texte de loi autonome. Il ne nécessite donc pas la prise d’une ordonnance, ni celle d’une loi de ratification. Toutefois, un décret en Conseil d’Etat est à venir et devra préciser certains points. 

Le but affiché de ce nouveau dispositif est d’« Assurer le maintien dans l’emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité ».  

En théorie donc, le dispositif n’a pas vocation à s’appliquer aux entreprises dans lesquelles des mesures de réorganisation ou de suppressions d’emploi sont envisagées ou ont été prises.  

En revanche, il peut faire concurrence, voire se cumuler dans certains cas, avec un accord de performance collective. En effet, l’ARME suppose d’abord l’existence d’un accord collectif, quel que soit son niveau (établissement, entreprise, groupe, branche). De prime abord, la proximité des objectifs de ces deux types d’accord peut inquiéter. Ce serait oublier que les APC ont désormais un champ très large, alors que le présent dispositif semble présenter davantage de garanties en matière d’engagements pris en contrepartie, même s’ils ne sont pas, aux termes de la loi, ces engagements ne sont pas obligatoirement dans tous les cas des engagements de maintien de l’emploi, contrairement à l’objectif affiché du dispositif. 

Par ailleurs, ce dispositif repose sur un système d’homologation/validation par l’administration. Le contrôle est plus poussé si son recours se fait par document unilatéral, précisant l’application des stipulations d’un accord de branche, que s’il se fait par accord d’entreprise, d’établissement ou de groupe. 

  • Les conditions de recours à l’ARME

La principale condition pour prétendre recourir à l’ARME est d’avoir conclu ou d’être dans le champ d’un accord collectif. 

Cet accord collectif peut indifféremment être

-un accord d’établissement, 

-un accord d’entreprise, 

-un accord de groupe, 

-un accord de branche étendu par arrêté ministériel après avis de la CNNC. 

Si l’accord est un accord de branche étendu, l’entreprise qui souhaite bénéficier du dispositif doit en outre élaborer un document unilatéral (DU) conforme à cet accord et définissant les engagements spécifiques en matière d’emploi. Ce document est soumis à la consultation du CSE, « s’il existe ». 

L’accord doit porter sur les points suivants

-sa durée d’application, 

– les activités et salariés concernés par l’activité partielle spécifique, 

-les réductions de l’horaire de travail pouvant donner lieu à indemnisation, 

-les engagements souscrits en contrepartie, notamment pour le maintien de l’emploi. 

 

  • Un régime à part d’activité partielle à part

Les deniers publics étant sollicités, la loi crée un système d’homologation/validation par l’administration qui accorde les aides. L’accord (d’établissement, de groupe, d’entreprise) est transmis à l’administration pour validation. Le document unilatéral, élaboré en application de l’accord de branche, est transmis pour homologation. Les accords ou documents unilatéraux pourront être transmis à l’administration au plus tard le 30 juin 2022. 

En cas de validation, c’est-à-dire si on est en présence d’un accord d’entreprise, d’établissement ou de groupe, le contrôle porte sur les points suivants

-la validité de l’accord et régularité de la procédure de négociation, 

-la présence dans l’accord de l’ensemble des points obligatoires. 

Si un avenant est conclu, une nouvelle validation est nécessaire. 

La décision de l’administration est notifiée à l’employeur, au CSE s’il existe, et aux OSR signataires « lorsqu’elles existent », dans un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord. Le silence de l’administration vaut acceptation

La mention du fait que la notification se fait aux « organisations syndicales signataires lorsqu’elles existent » confirme malheureusement la possibilité, comme pour tout accord, de recourir au référendum patronal… 

En cas d’homologation, c’est-à-dire si on est en présence d’un DU en application d’un accord de branche étendu, le contrôle est plus poussé et porte sur les points suivants

-la régularité de la procédure d’information-consultation du CSE, 

-la présence dans le document de l’ensemble des points obligatoires, 

-la conformité du DU aux stipulations de l’accord de branche, 

-la présence d’engagements spécifiques en matière d’emploi. 

En cas de reconduction ou d’adaptation du DU, une nouvelle homologation doit être demandée. 

La décision de l’administration est notifiée à l’employeur et au CSE « s’il existe » dans un délai de 21 jours à compter de la réception de l’accord. Le silence de l’administration vaut acceptation. 

Par ailleurs, le régime de l’ARME se distingue de celui de l’activité partielle « classique » par le fait que certaines dispositions ne lui sont pas applicables. 

Ainsi, en cas d’activité partielle mise en place par l’ARME, il n’y aura pas de possibilité : 

-de bénéficier d’une indemnité majorée pendant le temps de formation, 

– ni d’utiliser le placement en activité partielle individualisée. 

En outre, la loi prévoit que les dispositions des accords relatifs à l’activité partielle conclus avant l’entrée en vigueur de la loi ne sont pas applicables à l’ARME. 

Enfin, nombre de points doivent être précisés par le Décret et sont actuellement en cours de discussion.  

Selon les termes de la loi, un décret doit encore préciser : 

-le contenu de l’accord ; 

-les conditions d’application et de renouvellement du DU ; 

– les conditions et les cas dans lesquels le pourcentage de l’indemnité et le montant de l’allocation peuvent être majorés, selon des caractéristiques liées à l’activité de l’entreprise. 

Pour la CFDT, ce décret doit être l’occasion de renforcer la nécessité de réels engagements sur l’emploi qui, en l’état du texte de loi, ne sont contrôlés qu’en cas de document unilatéral, et de définir les autres types d’engagement qui pourraient figurer dans de tels accords. 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Découvrez nos analyses et capsules vidéos
Lancer la vidéo

Webinaire Tripalio #3 : les CCN face à l'assurance obsèques de l'enfant de -12 ans

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #2 : le point sur la santé des HCR et la prévoyance des Services à la personne

Lancer la vidéo

Webinaire Tripalio #2 : Le point sur les catégories objectives dans les CCN

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #1 : le régime santé de la CCN Syntec

Vous pourriez aussi aimer
Lire plus

La double authentification arrive sur Tripalio le 5 janvier 2026 pour une sécurité renforcée

Pour protéger les données et sécuriser l'accès de tous nos utilisateurs à nos informations stratégiques, à notre base de données CCN et à nos outils de conformité juridique, nous faisons évoluer la connexion au site Tripalio à partir du 5 janvier 2026. Dès le début de l'année 2026, un mécanisme simple de double authentification par mail vous permettra de vous connecter à Tripalio. ...

Avis d’extension d’un avenant dans la CCN des remontées mécaniques et domaines skiables

Le ministre du travail et des solidarités envisage d’étendre, par avis publié le 5 décembre 2025, les dispositions de l'avenant du 26 novembre 2025 à l'accord du 27 octobre 2025 relatif à la mise en place d'un dispositif d'activité partielle de longue durée rebond - APLD-R, conclu dans le cadre de la convention collective nationale des remontées mécaniques et domaines skiables du 15 mai 1968 (...

Avis d’extension d’un avenant dans la CCN des fleuristes, de la vente et des services des animaux familiers

Le ministre du travail et des solidarités envisage d’étendre, par avis publié le 5 décembre 2025, les dispositions de l'avenant n° 2 du 24 octobre 2025 à l'accord du 13 juin 2022 relatif aux frais de santé, conclu dans le cadre de la convention collective nationale des fleuristes, de la vente et des services des animaux familiers du 29 septembre 2020 (...

Avis d’extension d’un accord dans la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage à sec, pressing et teinturerie

Le ministre du travail et des solidarités envisage d’étendre, par avis publié le 5 décembre 2025, les dispositions de l'accord du 20 octobre 2025 relatif aux classifications professionnelles, conclu dans la convention collective nationale de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage à sec, pressing et teinturerie du 17 novembre 1997 (...

Avis d’extension d’un accord dans la CCN des expertises en matière d’évaluations industrielles et commerciales

Le ministre du travail et des solidarités envisage d’étendre, par avis publié le 5 décembre 2025, les dispositions de l'accord du 8 septembre 2025 relatif au télétravail, conclu dans le cadre de la convention collective nationale des entreprises d’expertises en matière d’évaluations industrielles et commerciales du 7 décembre 1976, qui est devenue convention collective nationale des sociétés d’expertises et d’évaluations (...