Retraites : le mystérieux calcul de François Bayrou

Alors que François Bayrou doit prononcer cet après-midi sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée Nationale, la rumeur publique se fait de plus en plus insistante selon laquelle il serait sur le point de suspendre la dernière réforme des retraites.

Quoi que l’on pense, sur le fond, de cette réforme des retraites, le calcul politique et budgétaire effectué par François Bayrou, s’il devait effectivement opérer une telle suspension, apparaîtrait pour le moins mystérieux.

Une réforme des retraites qui ne passe pas

Interrogé ce matin sur RMC et BFM TV, Olivier Faure, le premier secrétaire du parti socialiste (PS), par ailleurs député, a affirmé qu’un accord était “possible” avec François Bayrou au sujet d’une mise en veille de la dernière réforme des retraites. “Nous sommes peut-être à quelques heures d’un accord” sur ce sujet, a-t-il en effet déclaré, se disant “serein” que les choses aboutissent. Chiffrant le coût structurel d’une remise en cause de la réforme de 2023 à “15 milliards” par an, il a estimé que “d’autres modes de financement” que la dégradation des droits à pension des assurés sociaux pouvaient être dégagés afin de boucler le budget de l’opération. Certains jugeraient ainsi opportun de lorgner du côté du fonds de réserve pour les retraites (FRR) afin de revenir sur le recul à 64 ans de l’âge de départ à la retraite – et peu importe qu’il ait beaucoup fondu du fait des ponctions diverses et variées qui lui ont été imposées ces dernières années !

Un calcul politique peu compréhensible

S’il devait bel et bien annoncer une suspension de la réforme des retraites, François Bayrou s’attirerait, il est vrai, les faveurs aussi bien du Rassemblement National (RN) que des partis situés à la gauche de l’échiquier politique. Ceci permettrait, par exemple, au Premier ministre d’espérer obtenir, par la suite, un vote de ses budgets ainsi qu’un éloignement du spectre d’une motion de censure. En l’état, ce calcul semble pourtant fort incertain, dans la mesure où une mise entre parenthèses de la dernière réforme des retraites déplairait clairement à la droite républicaine – qui l’a explicitement fait savoir – et sèmerait sans nul doute le trouble au sein du camp macroniste. Dans une telle configuration, on voit mal de quel côté François Bayrou pourrait se tourner à l’Assemblée afin de trouver un soutien parlementaire un tant soit peu solide.

Une équation budgétaire insoluble

En revenant sur l’une des réformes les plus importantes décidées par le Président de la République au cours de son mandat, François Bayrou ne s’embarquerait pas seulement dans une affaire au rendement politique loin d’être garanti : il engagerait également la nation dans une voie budgétaire périlleuse. Tout le monde le sait, la situation budgétaire du pays est calamiteuse. S’agissant du budget de la Sécurité sociale, en l’absence de mesures nouvelles de maîtrise des dépenses ou de hausses des recettes, le déficit est attendu à quelque 25 milliards d’euros cette année. Sauf à revoir de fond en comble l’organisation du budget de la nation – option fort peu probable en l’état – s’engager dans une voie qui reviendrait à rajouter 15 milliards de dépenses sociales annuelles constituerait, dès lors et quelles que soient les critiques que l’on peut formuler à l’endroit de la dernière réforme des retraites, une décision difficilement compréhensible. De complexe, l’équation budgétaire deviendrait insoluble.

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