La Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques (DARES), du ministère du Travail, vient de publier une analyse des facteurs qui “influencent la capacité des salariés à faire le même travail jusqu’à la retraite”.
Consistant essentiellement en une mise en perspective du sentiment qu’ont les salariés du caractère soutenable ou non du travail qu’ils exercent, l’étude de la DARES décrit surtout, en filigrane, une autre insoutenabilité : celle, pour de nombreuses catégories de travailleurs, du projet de réforme des retraites actuellement défendu par le gouvernement.
Parmi les résultats de son étude que la DARES met en avant, on relève le taux de salariés qui “ne se sentent pas capables de tenir dans leur travail jusqu’à la retraite”. D’après l’institution de recherche du ministère du Travail, ils sont 37 %. Précisant ce taux, elle montre, entre autres choses, que les femmes sont davantage concernées que les hommes et que certains métiers, les plus pénibles, sont bien davantage en cause que les autres : “certaines professions sont jugées particulièrement insoutenables, parfois de manière majoritaire, par les salariés qui les exercent […]. Il s’agit notamment des métiers requérant l’accueil du public (caissiers, employés de la banque, des assurances et de l’hôtellerie-restauration), ceux du soin et de l’action sociale (infirmières et aides-soignantes), ainsi que certains métiers d’ouvriers non qualifiés”.
Outre ces enseignements, guère étonnants il faut bien le reconnaître, le lecteur quelque peu averti prendra connaissance avec intérêt de “l’éclairage 1” proposé par l’étude en page 7, concernant le lien entre “soutenabilité du travail jusqu’à la retraite et départs en retraite”. Il y découvrira notamment, comme le montre le graphique A, que les salariés ayant jugé leur travail non soutenable en 2016 ont, en 2019, bien plus fréquemment que les autres salariés, pris leur retraite sans avoir atteint l’âge légal de la retraite et/ou sans avoir rempli les conditions leur permettant de prétendre à une pension à taux plein.
L’étude ayant porté sur une configuration régie par l’actuelle règlementation de la retraite, il y a tout lieu de penser qu’un report à 64 ans de l’âge de la retraite, couplé à une hausse de la durée de cotisation, ne feraient que renforcer les termes du constat dressé par la DARES. Les opposants au projet gouvernemental de réforme des retraites en concluront que, d’après le ministère du Travail lui-même, pour de nombreuses catégories de salariés, ce projet a toutes les chances de s’avérer insoutenable.