Le délégué du personnel dont le CDD est requalifié en CDI est-il protégé ?

Cette publication provient du site du syndicat de salariés FO.

Dans cette affaire, un salarié est recruté en CDD. Au cours de la relation de travail, le salarié est élu en qualité de délégué du personnel titulaire. Après 73 CDD, la société ne propose pas au salarié un nouveau contrat.

Ce dernier saisit la juridiction prud’homale. II souhaite obtenir la requalification de la relation de travail en CDI. Il demande en conséquence la requalification de la rupture en licenciement nul pour violation par l’employeur du statut protecteur, et sa réintégration dans l’entreprise.

Saisie de la question de savoir si les règles relatives au statut protecteur du salarié sont applicables à la rupture d’un CDD requalifié en CDI, la Cour de cassation conclut que :

Ayant constaté que le salarié avait été élu le 6 juin 2013, en tant que délégué du personnel titulaire, elle [la cour d’appel] en a déduit à bon droit qu’il incombait à l’employeur, en application de l’article L 2411-5 du code du travail, de solliciter l’autorisation de l’inspecteur du travail pour le licencier et qu’à défaut d’autorisation le licenciement était nul de plein droit (Cass. soc., 20-10-21, n°20-12434).

La Cour de cassation nous rappelle, dans cette décision, comment s’articulent les règles relatives au statut protecteur, avec celles sur le licenciement et celles relatives à la requalification du CDD en CDI.

 Lorsqu’un salarié protégé, embauché en CDD, voit son contrat être rompu, les règles du statut protecteur s’appliquent :

  • C’est le cas lorsque le CDD est rompu à l’initiative de l’employeur et avant le terme du CDD (en cas de faute grave ou d’inaptitude, articles L 2412-2 et L 2412-3 et suivants du code du travail). En cas d’accord des parties et de force majeure, la DGT considère qu’aucune autorisation auprès de l’Inspection du travail n’a à être demandée (Guide DGT « salariés protégés », 20-9-19, fiche 13a).
  • A noter toutefois que la chambre criminelle a jugé qu’un salarié protégé ne peut pas négocier avec son employeur la rupture de son contrat de travail (Cass. crim., 14-11-06, n°05-87554).
  • C’est le cas également lorsque le contrat est rompu en raison de la survenance du terme du CDD quelle que soit sa durée ou la possibilité ou non de le proroger (Cass. soc., 11-12-01, n°99-43799 ; Cass. soc., 5-4-11, n°10-10424 ; Cass. soc., 10-12-03, n°01-44703 ; art. L 2412-2, L 2412-3 et suivants du code du travail).
  • Lorsqu’un CDD est requalifié en CDI, les règles du licenciement s’appliquent à la rupture du contrat en raison de l’arrivée au terme.

Les règles ainsi rappelées, la décision de la Cour de cassation nous paraît difficilement contestable.

Son raisonnement est de considérer que, le CDD est en réalité un CDI, dont la rupture n’a pas suivi les exigences légales car elle viole le statut du salarié protégé. Pour elle, la requalification entraîne l’application des règles propres au licenciement à la rupture du 20 juin 2014, résultant de la survenue du terme du dernier contrat à durée déterminée.

Dès lors, il incombait à l’employeur, en application de l’article L 2411-5 du code du travail, de solliciter l’autorisation de l’inspecteur du travail pour le licencier et qu’à défaut d’autorisation, le licenciement était nul de plein droit.

Cette décision est aussi l’occasion de faire un bref rappel de ce que pourrait demander un salarié dont le statut protecteur avait été violé en raison de l’absence de demande d’autorisation ou si l’autorisation avait été refusée [*]. Il pourra solliciter :

  • Avant la survenance du terme et parallèlement à l’action au fond en requalification de son CDD en CDI, le salarié peut saisir le juge des référés pour ordonner la poursuite du contrat au-delà de son terme, en attendant qu’il soit statué au fond (Cass. soc., 8-3-17, n°15-18560).
  • Sa réintégration, comme cela était le cas dans l’arrêt commenté, auquel cas il aura droit à une indemnisation égale au montant de la rémunération qu’il aurait perçue entre son licenciement et sa réintégration, à condition que sa réintégration ait été demandée par le salarié protégé avant l’expiration de la période de protection (Cass. soc., 24-9-02, n°00-44018).

 Son indemnisation sans réintégration. Cela impliquera (Cass. soc., 12-6-01, n°99-41695) :

  • une indemnité forfaitaire au titre de la violation de son statut protecteur, égale au montant des rémunérations qu’il aurait dû percevoir entre son éviction et l’expiration de la période de protection en cours,
  • les indemnités de rupture de son contrat de travail (indemnité de licenciement, de préavis, etc.),
  • une indemnité liée à la nullité du licenciement, sans application « du barème Macron » (art. L 1235-3-1 du code du travail), selon l’administration.
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