Entre le CNPF, puis le Medef et la CGPME on a longtemps joué sur le mode « Je t’aime, moi non plus ». Dans les années 70, 80 et 90, on se plaisait rue Pierre 1er de Serbie à cultiver l’ambiguïté en expliquant qu’il n’y avait pas de différence de nature entre les deux organisations patronale puisque la CGPME était affiliée au CNPF auquel elle payait ses cotisations. La CGPME de Léon Gingembre, puis de René Bernasconi s’est accommodée de cette situation qui s’est prolongée peu ou prou jusqu’à la fin du mandat d’Ernest-Antoine Seillière.
Tout a basculé en 2007 quand Laurence Parisot a entrepris de déstabiliser l’UIMM, dont la CGPME était considérée comme une alliée. Jean-François Roubaud s’est alors vu contraint de « décrocher » la CGPME du Medef et de prendre ses distances. L’UPA avait fait de même quelques années plus tôt en ne suivant pas EAS dans son boycott des organismes de sécurité sociale. Quant au dernier scrutin prud’homal de 2008, il avait fait apparaître la montée en pression d’un patronat de l’économie sociale qui franchissait la barre des 19 %. Une évidence s’impose donc aujourd’hui : l’hégémonie du Medef a vécu et le débat sur la représentativité devrait consacrer l’existence de plusieurs patronats.
« Un droit à la différence »
Devant l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis), ce jeudi 16 avril, le nouveau président de la CGPME, François Asselin s’est bien gardé de jeter de l’huile sur le feu et d’entretenir la division. Se présentant comme quelqu’un soucieux de « travailler pour le bien commun », il a repris un discours très « gattazien » sur les contraintes dans lesquelles s’est laissé enfermer le mouvement patronal désireux de « tout écrire » au point d’en arriver à « un marché du travail sclérosé. Et d’ajouter qu’il souhaite passer « d’un dialogue social contraint à un dialogue social serein ».
Cela posé François Asselin n’en a pas moins revendiqué « un droit à la différence » tant il est vrai que sur la plupart des grandes questions sociales, notamment sur la modernisation du dialogue social « il est difficile d’être d’accord selon qu’on s’intéresse aux TPE ou aux entreprises de plus de 1000 salariés ». En matière de représentativité la difficulté n’est pas moindre pour une organisation qui compte nombre de PME dans les grandes branches professionnelles. Le ton se fait alors plus menaçant pour rappeler que personne n’a intérêt à ce que des milliers de petites entreprises soient « maltraitées »…
Pour l’essentiel donc, la CGPME revendique :
– la levée d’un certain nombre de « freins à l’embauche » (sécurisation de la sortie de l’emploi, réduction du délai de contestation de 3 ans à 6 mois, toilettage des textes sur la formation à la prévention « autour de laquelle s’est développé un vrai business » et substitution d’une logique de récompense à une logique de sanction),
– une révision du pacte de responsabilité,
– la mise en place du « CDI de croissance » (le CDI est acquis si un projet a rempli ses objectifs au bout de 3 ans. En cas contraire l’employeur et le salarié reprennent leur liberté),
– la suppression de la fiche individuelle de pénibilité. La CGPME se dit prête à rediscuter des métiers exposés si les Français acceptaient « la retraite à 65 ans quel que soit le régime », faute de quoi, explique-t-elle, les employeurs n’appliqueront pas cette obligation et « on fera appel aux salariés détachés et aux salariés étrangers »,
– la mise en place d’un Observatoire pour faire remonter les informations sur la formation et l’ouverture d’une négociation sur une politique qui vise au final à assurer la pérennité de l’entreprise.