Cela fait une semaine que le projet de créer la 5e branche de la Sécurité sociale dédiée à la dépendance est acté. Cette annonce clôt plusieurs années de débats sur une ouverture potentielle de ce marché important à l’assurance privée. Mais le mutisme des assureurs sur le sujet n’a pas joué en leur faveur alors que le manque de moyen des EHPAD est au centre de la place publique depuis le début de la crise liée à l’épidémie de coronavirus. Pour tenter d’appuyer cette décision financer la dépendance par la Sécurité sociale, la Drees (service statistique du ministère de la santé) s’est fendue d’une étude opportune sur ce que souhaitent les français.
Sans que cela nous étonne réellement, il ressort de l’étude qui vient de paraître que les français “souhaitent une prise en charge par l’Etat de la perte d’autonomie des personnes âgées“. Avec un tel titre, le gouvernement ne peut être que conforté dans sa décision qui se traduira très probablement par la création d’une nouvelle taxe, elle-même approuvée par la moitié des français sondés d’après l’étude de la Drees. Il est important de noter que les résultats de l’étude regroupent les réponses de 3 000 personnes interrogées en 2018. Cette antériorité laisse penser que l’idée de faire financer la dépendance par l’Etat était probablement déjà bien ancrée dans les projets gouvernementaux.
On peut aussi ironiser sur l’impression qui est donnée que le gouvernement répond à une demande exprimée par le peuple quand le personnel soignant réclame, en vain, depuis plusieurs années la fin d’une bureaucratie tétanisante et l’amélioration des salaires (censée être discutée lors du Ségur de la santé mené par l’ex-secrétaire générale de la CFDT).
Seulement 11% des français sondés favorables à une dépendance aux mains des assureurs
La publication de la Drees propose quelques statistiques qui ne sont clairement pas favorables aux organismes assureurs. La plus flagrante est celle qui permet de voir que seulement 11% des sondés sont favorables à un financement de la dépendance par l’épargne ou par la souscription d’une assurance privée. Les français les plus aisés sont un peu plus nombreux à pencher pour l’assurance privée avec 16% de réponses favorables. Mais plus le niveau de vie diminue, plus l’intervention de l’Etat prend une part importante. Ainsi les personnes sondées les moins aisées ne sont que 6% à penser à l’assurance privée contre 70% à demander un financement par l’Etat.
Là où les données proposées par la Drees manquent de précision, c’est qu’elles s’attachent surtout à parler du financement de la dépendance par l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) sans évoquer le financement des EHPAD. Sur l’APA, 7 personnes sur 10 souhaiteraient qu’elle ne bénéficie qu’aux français dont les revenus sont faibles. En revanche, aucune information n’est donnée sur les ressources apportées aux EHPAD qui sont pourtant un point essentiel de la prise en charge de la dépendance. En effet, la seule véritable information découlant de l’étude dévoile que ces établissements sont loin d’être attractifs. Seulement 18% des sondés placeraient leurs parents en perte d’autonomie dans un EHPAD.
Finalement, l’étude n’embrasse qu’une partie du projet actuel du gouvernement et sa sortie ressemble plus à une publication d’opportunité pour appuyer les dernières annonces officielles.