Complémentaire santé: guerre des prix contre désignations

Guillaume Sarkozy a récemment fait le buzz en évoquant une “guerre des prix” rendue inévitable par la généralisation de la complémentaire santé. La résonance que cette petite phrase a produite dans la profession de l’assurance collective est un signal fort: l’ANI sur la sécurisation de l’emploi fait, en profondeur, bouger les lignes. De façon tout à fait paradoxale, il prouve a posteriori les bienfaits économiques (pour les salariés) de la concurrence, et il dément toutes les craintes sur un renchérissement du marché après la fin des désignations. 

La guerre des prix, une évidence qui prend le marché à la gorge

Les acteurs du marché ont encore tous en tête les arguments qui furent déployés au premier semestre de 2013 sur les bienfaits supposés des désignations de branche: elles garantissaient les meilleurs prix, elles protégeaient les petites entreprises contre des tarifs trop élevés et, au fond, elles étaient bénéfiques pour les salariés, qui disposaient ainsi de meilleures garanties aux tarifs les plus favorables. A l’époque, le gouvernement soutenait aussi que cette concurrence, jugée néfaste dans le domaine de l’assurance collective, était en revanche très positive dans l’assurance individuelle. C’est d’ailleurs pour cette raison que Benoît Hamon a imposé la résiliation infra-annuelle des contrats d’assurance. 

Quelques mois plus tard, de l’aveu même de Guillaume Sarkozy, les intuitions du gouvernement sur la résiliation infra-annuelle en assurance individuelle se vérifient… en assurance collective. De l’aveu même de Guillaume Sarkozy, la concurrence exacerbée ouverte par la fin des clauses de désignation, jointe à la création d’une nouvelle obligation d’assurance, produit un résultat immédiat: les prix baissent. Pour les chefs d’entreprise, sollicités plusieurs fois par semaine, voire par jour, par des assureurs collectifs, la généralisation de la complémentaire est donc un mal pour un bien. S’il s’agit d’une obligation de plus, elle présente l’intérêt de pouvoir bénéficier de contrats à prix cassés. 

C’est bête à dire, mais la généralisation de la complémentaire santé, et surtout la fin des désignations, prouve toute la validité des théories sur le lien entre concurrence et baisse des prix. 

Les désignations prennent un nouveau coup de vieux

Alors que certains tentent de raviver le mythe de la désignation comme source de bienfait pour l’entreprise, la baisse des prix dont les chefs d’entreprise devraient tirer profit constitue probablement le démenti le plus difficile à combattre pour les nostalgiques du bon temps où les branches décidaient pour toutes leurs ouailles. Les employeurs qui découvrent aujourd’hui la palette de contrats moins chers et à garanties plus favorables qui leur sont proposés par le marché ne devraient pas tarder à s’en persuader: l’ouverture du marché à la concurrence leur prouve jour après jour que le discours péremptoire sur la solidarité de branche avait bien quelque chose à cacher. 

Les adeptes de la liberté de choix de l’entreprise et de la libre concurrence en feront leur miel. L’état de fait qui est en train de se créer périme jour après jour un peu plus les vieux discours sur la mutualisation qui protège le salarié de la très petite entreprise contre les abus mercantiles. En réalité, ce salarié-là voit sa condition s’améliorer grâce à la liberté de choix de son employeur. Dans les discours délirants qui sont tenus sur la protection du salarié, cette donnée-là devrait peser lourd pour expliquer que la solidarité de branche consiste en réalité à financer des rentes de situation dont la première et principale victime est la très petite entreprise. 

Jusqu’à quand le dumping sera-t-il tenable?

C’est de notoriété publique: la baisse des prix qui fait rage sur le marché conduit au dumping. Certains tarifs proposés aux souscripteurs se situent très au-dessous de l’équilibre du contrat. Les adeptes de ces pratiques se situent d’ailleurs dans l’ensemble des familles qui s’affrontent: institutions de prévoyance, compagnies, intermédiaires, mutuelles.  

Combien de temps cette pratique de dumping pourra-t-elle durer? Certains parient déjà sur le fait que, dès la première année, les déséquilibres des contrats devraient contraindre à de fortes majorations de tarifs. Ces Sioux du marché attendent sagement 2017 pour présenter une offre à tarif raisonnable, en misant sur des résiliations rapides au bout d’un premier exercice chaotique. En réalité, le marché s’est durablement installé dans une concurrence qui limitera les prix… 

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