A partir de quand le représentant de section syndicale devient-il salarié protégé ?

Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat de salariés CFDT.

C’est une affaire banale qui vient souligner la fragilité de la protection accordée aux représentants syndicaux et l’intransigeance de la Haute juridiction dans l’interprétation de ces règles. Dans un arrêt récent, la Chambre sociale nous rappelle en effet que la loi prévoit que, pour bénéficier de la protection contre le licenciement à l’issue de leur mandat, les représentants de section syndicale doivent, comme les délégués syndicaux, avoir été en poste pendant « au moins un an ». Cour de cassation, 30.09.20, n°19-12845. 

  • Faits, procédure, prétentions

Un salarié, embauché en 1992 en qualité d’analyse programmeur et devenu spécialiste du service application, est désigné représentant de section syndicale (RSS) le 6 juillet 2012. 

Le 5 juillet 2013, le syndicat qui l’avait initialement désigné procède à la désignation d’une nouvelle RSS. Quelques mois plus tard (en décembre), il est licencié sans autorisation de l’inspection du travail. 

Le salarié décide donc de saisir le conseil de prud’hommes pour demander la réparation du préjudice subi car il considère avoir été licencié en violation du statut protecteur. En outre, il conteste que la simple désignation d’une nouvelle RSS mette fin à son mandat. 

Débouté de ses demandes, il décide de former un pourvoi devant la Cour de cassation. La Haute juridiction confirme néanmoins la décision des juges du fond : son mandat a pris fin et, de surcroît, il ne peut prétendre bénéficier de la protection. 

  • La désignation d’un nouveau RSS met fin au mandat

Tout d’abord, la Cour considère que la désignation d’une nouvelle RSS vaut cessation du mandat de l’ancien RSS sans qu’il soit nécessaire que la révocation soit expresse. 

En effet, un syndicat ne disposant du droit de désigner qu’un RSS par entreprise ou établissement, la désignation d’un nouveau RSS emporte logiquement la fin du mandat du premier. 

La règle nous rappelle donc que, hormis les conditions personnelles que les militants doivent remplir (âge, ancienneté, … mais aussi audience pour les délégués syndicaux), la désignation demeure une prérogative à l’entière main du syndicat. 

L’article L.2142-1-1 du Code du travail permet aux syndicats constituant une section syndicale dans les entreprises ou établissements d’au moins 50 salariés mais ne remplissant pas la condition de représentativité nécessaire à la désignation d’un délégué syndical de désigner un représentant de section syndicale dans l’entreprise ou l’établissement. 

  • Pour être protégé, c’est 1 an de mandat ou rien !

En application de l’article L. 2142-1-2 du Code du travail, les RSS bénéficient de la même protection que les délégués syndicaux. A savoir une protection d’une durée de 12 mois à compter de la cessation de ses fonctions. 

Sauf que, comme les délégués syndicaux, les RSS doivent pour cela avoir exercé leurs fonctions pendant « au moins un an » (article L.2411-3 du Code du travail). 

Règle qui est appliquée en l’espèce dans toute sa rigueur, puisque la nouvelle désignation avait eu lieu un jour avant la date anniversaire : il ne manquait qu’1 jour pour que le RSS puisse bénéficier de la protection ! 

Pourtant, dans de tels cas, où l’ancienneté du salarié est importante et la durée du mandat non négligeable (1 an moins 1 jour), on peut quand même suspecter un lien entre le mandat et le licenciement. 

A défaut de pouvoir changer la loi, qui pose une condition de durée d’exercice des fonctions de « au moins un an » que le juge ne peut ignorer, ne serait-il pas préférable de plaider la discrimination syndicale ? 

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Vous pourriez aussi aimer

Un premier avenant intéressant pour la PSC du ministère de l’Intérieur

Un an après la signature de l’accord ministériel du 16 mai 2024 sur la protection sociale complémentaire (PSC) des agents du ministère de l’Intérieur et des outre-mer, un premier avenant est venu, le 12 mars 2025, en corriger plusieurs aspects. Publié au Journal officiel d'aujourd'hui, ce texte modifie la structure des bénéficiaires, ajuste un article sur la gouvernance et corrige une rédaction ambiguë sur les ayants droit. La principale évolution porte sur...

Budget 2025 : plus de 33 milliards d’euros alloués aux établissements médico-sociaux par la CNSA

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui, fixe pour l’année 2025 l’objectif de dépenses et le montant total annuel des financements alloués aux établissements et services médico-sociaux relevant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). L’objectif de dépenses est établi à 33 248,30 Md€ pour l’ensemble du secteur. Ce montant se répartit entre 17 538,87 Md€ pour les établissements et services accueillant des personnes âgées...

Dotations médico-sociales 2025 : 32,55 Md€ répartis entre les régions par la CNSA

Par décision du 2 juin 2025, publiée au Journal officiel d'aujourd'hui, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a fixé les dotations régionales limitatives applicables aux établissements et services médico-sociaux pour l’année 2025. Ces dotations, réparties par Agence régionale de santé (ARS), concernent à la fois les structures accueillant des personnes âgées et celles destinées aux personnes en situation de handicap. Le montant total...