Droits sociaux des demandeurs d’emploi au sein de l’Union

Un arrêt du 15 septembre 2015 rendu par la Cour de justice de l’Union européenne vient préciser le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement et du conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale. 

Principe de non-discrimination et dérogations

Aux termes de son article 4, intitulé « Égalité de traitement », les ressortissants de l’un des Etats membres ainsi que les autres personnes auxquelles le règlement s’applique bénéficient des mêmes prestations et sont soumises aux mêmes obligations, en vertu de la législation de tout État membre, que les ressortissants de celui-ci. C’est une des applications par l’Union du fameux principe de non-discrimination. 

Celui-ci souffre néanmoins quelques exceptions et n’est pas absolu. Les prestations spéciales en espèces à caractère non contributif, définies à l’article 70 du même règlement entrent dans le champ d’application de ce principe. La Cour apporte cependant une précision sur ce point au regard notamment de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. 

En effet, tout en confirmant pour les citoyens de l’Union un droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, la directive pose certaines limites. Le considérant 10 est à ce titre des plus évocateurs ; « Il convient cependant d’éviter que les personnes exerçant leur droit de séjour ne deviennent une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil pendant une première période de séjour. L’exercice du droit de séjour des citoyens de l’Union et des membres de leur famille, pour des périodes supérieures à trois mois, devrait, dès lors, rester soumis à certaines conditions ». S’agissant du droit aux prestations d’assistance sociale, l’article 24 paragraphe 2 de la directive dispose en substance que « par dérogation, l’État membre d’accueil n’est pas obligé d’accorder ce droit pendant les trois premiers mois de séjour (–) ni tenu, avant l’acquisition du droit de séjour permanent, d’octroyer des aides d’entretien aux études, y compris pour la formation professionnelle, sous la forme de bourses d’études ou de prêts, à des personnes autres que les travailleurs salariés, les travailleurs non salariés, les personnes qui gardent ce statut, ou les membres de leur famille. 

L’interprétation des juges de l’Union

Saisie d’une question préjudicielle par une juridiction allemande, la Cour de justice devait se prononcer sur les droits sociaux du demandeur d’emploi accueilli dans un Etat membre. 

Les Juges Luxembourgeois rappellent tout d’abord que le travailleur qui se trouve en chômage involontaire dûment constaté à la fin de son contrat de travail à durée déterminée inférieure à un an ou après avoir été involontairement au chômage pendant les douze premiers mois, conserve le statut de travailleur pendant au moins six mois. A ce titre il est fondé à bénéficier du principe d’égalité de traitement. 

Mais au-delà des six mois ? La Cour relève que, dans un tel cas, l’État membre d’accueil peut se fonder sur la dérogation de l’article 24, paragraphe 2, de cette directive, aux fins de ne pas accorder audit citoyen la prestation d’assistance sociale réclamée. La Haute juridiction estime que la période de six mois après la cessation d’une activité professionnelle pendant laquelle le droit à l’aide sociale est maintenu, est de nature à garantir un niveau élevé de sécurité juridique et de transparence dans le cadre de l’octroi de prestations d’assistance sociale de l’assurance de base, tout en étant conforme au principe de proportionnalité. Etant précisé que lorsque cette période de six mois est expirée, un citoyen de l’Union ne peut être éloigné de l’État membre d’accueil tant qu’il est en mesure de faire la preuve qu’il continue à chercher un emploi et qu’il a des chances réelles d’être engagé. 

En conclusion la CJUE dit pour droit que l’article 24 de la directive du 29 avril 2004, et l’article 4 du règlement (CE) n° 883/2004 du même jour, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation d’un État membre qui exclut du bénéfice de certaines «prestations spéciales en espèces à caractère non contributif», les ressortissants d’autres États membres qui se trouvent dans la situation telle que celle visée à l’article 14, paragraphe 4, sous b), de ladite directive, alors que ces prestations sont garanties aux ressortissants de cet État membre qui se trouvent dans la même situation. 

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