Cet article a été initialement publié sur le site du syndicat la CFE-CGC
Même si nous saluons dans le rapport du comité présidé par Robert Badinter l’objectif affiché de promotion des droits fondamentaux et les vertus pédagogiques de cette liste de 61 principes qui gouvernent les relations du travail, nous regrettons que ces principes n’aient vocation qu’à trouver une place dans un chapitre autonome du Code du Travail. En effet, pour garantir la pérennité de ces principes fondamentaux nous proposions de constitutionaliser les principes dégagés par ce comité comme cela avait été fait avec la charte de l’environnement.
Sans cette valeur « supra-législative », ces principes pourraient n’avoir qu’une durée de vie limitée.
S’agissant des principes énoncés, nous saluons tout particulièrement :
Le rappel de la compétence législative s’agissant de la durée normale du travail et de la fixation des durées maximales de travail ;
Le rappel de l’exigence d’un motif réel et sérieux pour le licenciement ;
Le rappel du principe selon l’exercice, par le salarié, de son droit à saisir la justice ou à témoigner ne peut, sauf abus, donner lieu à sanction ;
Le rappel de la protection de la vie privée du salarié et de ses données personnelles.
Pour autant, certaines formulations nous laissent perplexe :
Sur le contrat de travail, nous attendions que le comité soit plus précis en indiquant que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ;
L’exigence du consentement exprès du salarié pour toute modification de son contrat de travail n’est pas clairement énoncée, même si elle est contenue à l’article 12 : « Le contrat de travail se forme et s’exécute de bonne foi. Il oblige les parties ».
L’article 9 ne consacre pas précisément un « droit à la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle » ;
L’article 20 qui reprend le droit à la formation professionnelle laisse dans l’ombre le droit à la qualification aujourd’hui contenu à l’article L.6314-1 du Code du travail ;
L’article 21 prévoit que « l’employeur assure l’adaptation du salarié à l’évolution de son emploi. Il concourt au maintien de sa capacité à exercer une activité professionnelle ». L’expression « concourt » laisse penser qu’il y participe, mais n’est pas le seul responsable en matière de maintien de l’employabilité du salarié. Qui serait alors coresponsable ? Les pouvoirs publics ? La personne elle-même ?
L’article 24 sur la rupture du contrat de travail place au même niveau licenciement, démission et rupture d’un commun accord. Cette formulation passe quelque peu sous silence les conditions spécifiques indispensables visant à garantir le consentement du salarié à la rupture ;
L’indépendance de l’inspection du travail laisse la place à une protection contre « toute pression extérieure indue » (article 58).
D’autres principes sont clairement ambigus. Si certains d’entre eux énoncent qu’ils sont définis par la loi ce n’est pas le cas, par exemple, de la compensation à laquelle a droit un salarié qui effectue des heures supplémentaires.
Pourtant, les principes essentiels dégagés par le comité ne constituent-ils pas tous a minima des principes fondamentaux du droit du travail au sens de l’article 34 de la Constitution pour lesquels le législateur doit exercer pleinement sa compétence ?
Pour se prémunir d’une telle ambiguïté, la CFE-CGC avait fait valoir devant le comité que « Tout principe de droit du travail trouve sa déclinaison dans une loi impérative qui doit le définir et le mettre en œuvre de manière suffisamment précise pour en garantir l’effectivité ». Nous regrettons de ne pas retrouver notre proposition dans les articles présentés.