Réintégration du salarié protégé : combien de temps perdure sa protection ?

Cette analyse provient du site du syndicat de salariés CFDT.

Lorsqu’un salarié protégé est licencié puis réintégré dans son emploi, sans pour autant être réintégré dans son mandat représentatif, il continue de bénéficier de la protection contre le licenciement pendant une durée de 6 mois. Ce délai court à compter de sa reprise effective du travail.

C’est ce qu’a décidé récemment le Conseil d’Etat. CE, 24.01.2022, n° 443356.

  • Annulation de l’autorisation de licenciement et réintégration dans une nouvelle entreprise

Dans cette affaire, un salarié, représentant syndical au sein du comité d’entreprise et délégué syndical a fait l’objet d’une procédure de licenciement par la société Transdev Equipages. La société a sollicité une autorisation administrative de licenciement, accordée par la ministre du travail.

Le salarié a contesté cette autorisation devant le tribunal administratif, qui l’a annulée, décision confirmée par la cour administrative d’appel.  

Aussi le salarié a-t-il demandé sa réintégration dans l’entreprise par un courrier reçu le 16 décembre 2015 par l’employeur.

Le Code du travail organise le droit à réintégration du salarié protégé. Lorsque l’autorisation de licenciement d’un salarié protégé est annulée par le ministre du travail ou par le juge administratif, il a le droit d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent, s’il le demande dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision d’annualation(1).  

Seulement, son contrat a été transféré à la société Keolis Roissy Services aéroportuaires en application de l’article L. 1224-1 du Code du travail . Au final, il n’a été réintégré et n’a repris effectivement le travail qu’à compter du 19 janvier 2016. Il n’a en revanche pas pu reprendre ses mandats suite au transfert.

  • Licenciement après réintégration

Quelques mois plus tard, par une lettre du 19 juillet 2016, le nouvel employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable et a sollicité une autorisation de licenciement auprès de l’inspection du travail. L’autorisation accordée a cependant été annulée par la ministre du Travail. Elle a considéré qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur cette demande dans la mesure où, selon elle, le salarié ne bénéficiait plus de la protection attachée aux mandats qu’il avait exercés.

Dans le cas où le salarié protégé réintégré dans l’entreprise est membre du CSE ou représentant de proximité, il est également réintégré dans son mandat si celui-ci n’a pas pris fin (renouvellement de l’instance, transfert ect.). Dans le cas contraire, le salarié réintégré bénéficie pendant une durée de 6 mois « à compter du jour où il retrouve sa place dans l’entreprise » de la protection contre le licenciement(2).

La ministre, sans le dire explicitement, n’a pu que considérer que le délai de 6 mois pendant lequel le salarié bénéficiait de la protection contre le licenciement avait expiré.

Le salarié a contesté ces décisions, mais ses demandes ont été rejetées par les juges du fond. C’est dans ce contexte que le salarié a formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat. Celui-ci, pour trancher le litige, a dû déterminer le point de départ de ce délai de 6 mois.

  • Protection pendant 6 mois à compter de la reprise effective du travail

Le Conseil d’Etat donne raison au salarié considérant qu’à la date d’envoi de la convocation à l’entretien préalable, il était encore protégé. Il commence par rappeler les règles entourant le droit à réintégration du salarié à la suite d’une annulation de l’autorisation de son licenciement. Il précise ensuite que le salarié réintégré dans ce cadre « sans pour autant être réintégré dans son mandat représentatif, bénéficie de la protection […] pendant une durée de six mois à compter du jour de sa reprise effective du travail dans l’entreprise ».

Aussi, c’est bien la date de reprise effective du travail qu’il faut prendre en compte et pas la date de demande de réintégration comme l’a fait l’employeur. Dans les faits, le délai de 6 mois n’était donc pas expiré au moment de la convocation à l’entretien préalable au licenciement.

(1) Art. L2422-1 C.trav.

(2) Art. L2422-2 C.trav.

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pourriez aussi aimer

Un premier avenant intéressant pour la PSC du ministère de l’Intérieur

Un an après la signature de l’accord ministériel du 16 mai 2024 sur la protection sociale complémentaire (PSC) des agents du ministère de l’Intérieur et des outre-mer, un premier avenant est venu, le 12 mars 2025, en corriger plusieurs aspects. Publié au Journal officiel d'aujourd'hui, ce texte modifie la structure des bénéficiaires, ajuste un article sur la gouvernance et corrige une rédaction ambiguë sur les ayants droit. La principale évolution porte sur...

Budget 2025 : plus de 33 milliards d’euros alloués aux établissements médico-sociaux par la CNSA

Un arrêté publié au Journal officiel d'aujourd'hui, fixe pour l’année 2025 l’objectif de dépenses et le montant total annuel des financements alloués aux établissements et services médico-sociaux relevant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). L’objectif de dépenses est établi à 33 248,30 Md€ pour l’ensemble du secteur. Ce montant se répartit entre 17 538,87 Md€ pour les établissements et services accueillant des personnes âgées...

Dotations médico-sociales 2025 : 32,55 Md€ répartis entre les régions par la CNSA

Par décision du 2 juin 2025, publiée au Journal officiel d'aujourd'hui, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a fixé les dotations régionales limitatives applicables aux établissements et services médico-sociaux pour l’année 2025. Ces dotations, réparties par Agence régionale de santé (ARS), concernent à la fois les structures accueillant des personnes âgées et celles destinées aux personnes en situation de handicap. Le montant total...