Pessimisme patronal sur la loi El-Khomri

Dans les milieux patronaux, le pessimisme domine à l’approche d’une semaine cruciale où les organisations syndicales de salariés se sont levées comme un seul homme pour dénoncer un texte qu’elles jugent dangereux. Alors que François Hollande termine son mandat et que sa majorité se fracasse sur un projet de loi dont la logique politique est difficile à percevoir, les employeurs craignent un abandon du texte en bonne et due forme, voire pire: une dérive au fil du débat parlementaire qui en dénaturerait le sens.  

Les risques d’un projet de loi sous tension

La semaine qui s’ouvre place le monde patronal sous tension. Les syndicats, CFDT en tête, ont demandé un sursis à la présentation d’un texte jugé globalement “déséquilibré”. Face aux risques de réactions syndicales virulentes, y compris dans l’enseignement supérieur où les étudiants annoncent des mobilisations, tout plaide pour que le gouvernement temporise. Pour la sphère du social, le dilemme est majeur: soit François Hollande passe en force, et le pire est à craindre (un retrait pur et simple du texte face à la contestation), soit il sursoit pour arrondir la rédaction du projet. Dans les deux cas, tout laisse à penser que le texte final, s’il existe, sera sensibement différent de la version actuelle.  

L’hypothèse d’une dérive au fil du débat

Officiellement, François Hollande s’est mis à la recherche d’une majorité pour ce texte qui le fache avec le Parti Socialiste. La manoeuvre apparaît admirablement risquée: dans l’hypothèse d’un second tour l’opposant à Marine Le Pen, François Hollande pourrait se revendiquer, vis-à-vis des électeurs de droite, d’une opération de séduction ou d’ouverture réussie. Seulement voilà: cette hypothèse de second tour paraît aujourd’hui très faible, en comparaison d’une élimination de François Hollande au premier tour, voire d’un renoncement à se présenter pour éviter une déroute.  

François Hollande pourrait faire le choix du réalisme et présenter un texte légèrement modifié, à charge pour les députés de la majorité de le rendre plus acceptable. Cette solution permettrait au Président de trouver une issue acceptable à une impasse qu’il a librement choisie. En revanche, il viderait le texte de son aspect “offensif” et décevrait forcément les employeurs.  

Le premier et le dernier texte de Myriam El-Khomri

Pour la jeune ministre du Travail en tout cas, la situation paraît plus que délicate. Ce projet de loi devait la propulser politiquement. Elle apparaît dès aujourd’hui comme un fusible idéal. Elle aura réussi l’exploit de fédérer l’ensemble des syndicats contre un texte qui n’est pas encore présenté en Conseil des Ministres. Cette performance rare dans l’histoire législative s’est doublée d’une communication maladroite sur les réseaux sociaux qui n’a guère servi sa cause. 

Une certitude est désormais acquise: le reste de sa carrière devrait se dérouler sous les auspices de ce texte polémique, dont rien ne semblait pourtant la prédestiner à le porter.  

Ajouter aux articles favoris
Please login to bookmark Close
0 Shares:
Découvrez nos analyses et capsules vidéos
Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #2 : le point sur la santé des HCR et la prévoyance des Services à la personne

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #4 : zoom sur le médico-social non lucratif

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #5 : l'actualité des CCN Syntec, chimie, sécurité sociale

Lancer la vidéo

Le pouls des CCN #3 : les enjeux de la rentrée de septembre 2025

Vous pourriez aussi aimer
Lire plus

Le socle solidaire et responsable écarté du PLFSS en 2e lecture

C'est sans grande surprise que les députés ont supprimé hier (3 décembre 2025) l'article 6 quater, créant un socle solidaire et responsable, du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. Cet article inséré par le Sénat devait permettre de commercialiser des contrats moins généreux en termes de prestations que l'actuel contrat responsable et...

La Mutualité française appelle les français à participer aux Etats généraux de la santé et de la protection sociale

Ce communiqué a été diffusé par la Mutualité française. Comment les Français peuvent-ils se réapproprier leur protection sociale ? En donnant leur avis dans le cadre des Etats généraux de la santé et de la protection sociale, estime Julien Damon, professeur associé à Sciences Po. Il s’est exprimé lors du lancement...

Intériale quitte la Mutualité Française

Plusieurs confrères de la presse spécialisée annoncent, ces dernières heures, la décision prise par Intériale, ayant longtemps joué un rôle central dans l'assurance santé des agents et anciens agents du ministère de l'Intérieur, de quitter la fédération nationale de la mutualité française. Cette décision résulterait notamment des tensions survenues entre opérateurs mutualistes, et dans le cadre de leur représentation, au cours de la mise en œuvre de la réforme...

Avis d’extension d’avenants à la CCN de la production cinématographique

Le ministre du travail et des solidarités, envisage d’étendre, par avis publié le 4 décembre 2025, les dispositions de l’avenant du 26 mars 2025 relatif à la révision des salaires minima et de l'avenant du 26 septembre 2025 relatif à la classification, conclus dans le cadre de la convention collective nationale de la production cinématographique du 19 janvier 2012 (...

Avis d’extension d’un accord territorial dans la métallurgie de la Sarthe

Le ministre du travail et des solidarités, envisage d’étendre, par avis publié le 4 décembre 2025, les dispositions de l’accord territorial de la Sarthe du 23 octobre 2025 relatif à la détermination de la valeur de point pour le calcul de la prime d'ancienneté, à compter du 1er janvier 2026, conclu dans le cadre de la convention collective régionale de la métallurgie de Gard-Lozère (départements 30 et 48) (...